Vu la requête enregistrée le 6 mars 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE DE PARIS ; le PREFET DE POLICE DE PARIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 8 décembre 1994 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 1er décembre 1994 ordonnant que Mme X... soit reconduite à la frontière,
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Desrameaux, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, lorsqu'un étranger se trouve dans un des cas où, en vertu de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, le préfet peut décider qu'il sera reconduit à la frontière et alors même que ni les dispositions de l'article 25 de la même ordonnance, ni celles de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme ne font obstacle à une décision de reconduite il appartient au préfet d'apprécier si la mesure envisagée n'est pas de nature à comporter des conséquences d'une gravité exceptionnelle sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant que Mme X..., ressortissante algérienne, s'est maintenue sur le territoire pendant plus d'un mois à compter de la décision, notifiée le 30 juin 1994, par laquelle le PREFET DE POLICE DE PARIS lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salariée et l'a invitée à quitter le territoire ; que, par suite, elle se trouvait dans l'un des cas où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière sur le fondement des dispositions de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;
Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... est née en France en 1950 et y a vécu jusqu'à l'âge de 21 ans, lorsqu'elle a été renvoyée en Algérie par ses parents où elle a contracté mariage avec un ressortissant algérien dont elle a eu trois enfants ; que cette union a pris fin par un divorce prononcé en 1985, après que Mme X... a été abandonnée par son époux ; qu'elle est régulièrement rentrée en France, en 1991 puis en 1992, accompagnée de ses trois enfants mineurs ; que la majeure partie de sa famille réside régulièrement en France, et subvient partiellement à ses besoins ; que ses trois enfants sont scolarisés en France ; que l'état de santé de l'intéressée exige des soins médicaux constants ; qu'ainsi, eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, le PREFET DE POLICE DE PARIS a entaché d'une erreur manifeste son appréciation de la gravité des conséquences que l'exécution de la mesure de reconduite à la frontière contestée était susceptible d'avoir sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE DE PARIS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 1er décembre 1994 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... ;
Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE DE PARIS est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE DE PARIS, à Mme X... et au ministre de l'intérieur.