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21/02/1997 | FRANCE | N°172634;178388

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 21 février 1997, 172634 et 178388


Vu, 1°) sous le n° 172634, la requête enregistrée le 8 septembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil, présentée pour M. Philippe X... demeurant ... (75012) Paris ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision en date du 18 juillet 1995 par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'insertion professionnelle a rejeté sa demande tendant à l'abrogation des articles 8, 9 et 10 du décret n° 79-479 du 19 juin 1979 instituant une commission nationale compétente pour appréci

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Vu, 1°) sous le n° 172634, la requête enregistrée le 8 septembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil, présentée pour M. Philippe X... demeurant ... (75012) Paris ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision en date du 18 juillet 1995 par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'insertion professionnelle a rejeté sa demande tendant à l'abrogation des articles 8, 9 et 10 du décret n° 79-479 du 19 juin 1979 instituant une commission nationale compétente pour apprécier l'aptitude des candidats aveugles, amblyopes ou grands infirmes à exercer des fonctions de direction, d'inspection, d'enseignement, d'éducation, de surveillance, d'information et d'orientation dans les établissements ou services relevant du ministère de l'éducation nationale ;
2°) d'enjoindre au Premier ministre, sous astreinte de 1 000 F au moins par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, d'abroger lesdits articles ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu, 2°) sous le n° 178388, la requête enregistrée le 28 février 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. X... demeurant 4, BoulevardSoult à Paris (75012) ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 4 janvier 1996 par laquelle la commission nationale d'aptitude instituée par l'article 8 du décret n° 79-479 du 19 juin 1979 a confirmé sa décision du 21 décembre 1994 le déclarant inapte à exercer les fonctions de professeur d'histoire et géographie et a refusé de l'autoriser à se présenter aux épreuves correspondantes du certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement secondaire ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 8 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 ;
Vu le décret n° 78-392 du 17 mars 1978 ;
Vu le décret n° 79-479 du 19 juin 1979 ;
Vu la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 modifiée par la loi n° 95-125 du 8 février 1995 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Balmary, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Balat, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de M. X... présentent à juger des questions voisines ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions présentées par M. X... tendant à l'annulation de la décision du 4 janvier 1996 de la commission nationale d'aptitude :
Considérant qu'aux termes de l'article 27 de la loi du 30 juin 1975 : "Un décreten Conseil d'Etat détermine la composition de la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel prévue à l'article L. 323-11 du code du travail lorsqu'elle examine la candidature d'une personne handicapée à un emploi de l'Etat ou d'une des collectivités ou établissements visés à l'article L. 323-12-4° du code du travail ; ce décret peut également attribuer compétence à une commission spéciale pour certaines catégories d'agents" ; qu'il résulte de ces dispositions que seul un décret en Conseil d'Etat peut instituer une commission spéciale pour certaines catégories d'agents ; qu'ainsi l'article 3 du décret du 17 mars 1978 pris pour l'application desdites dispositions n'a pu, sans les méconnaître renvoyer à un décret simple la création de commissions spéciales compétentes pour apprécier l'aptitude des candidats à un emploi ... "d'inspection, de direction, d'enseignement, d'éducation, d'orientation, d'information et de surveillance relevant du ministère de l'éducation nationale" et la fixation de leur composition ; que, dès lors, les articles 8, 9 et 10 du décret du 19 juin 1979 lequel, pris sur le fondement de cette disposition, n'a pas été soumis au Conseil d'Etat, n'ont pu légalement instituer une commission nationale compétente pour apprécier l'aptitude des candidats aveugles, amblyopes et grands infirmes aux emplois énumérés ci-dessus et en fixer la composition ;
Considérant que la décision attaquée, qui déclare M. X... inapte aux fonctions de professeur d'histoire et géographie, émane de la commission nationale d'aptitude instituée par l'article 8 du décret du 19 juin 1979 susvisé ; que cette commission, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ne pouvait être instituée que par décret en Conseil d'Etat ; que, dès lors, la décision du 4 janvier 1996 est entachée d'incompétence ; que M. X... est donc fondé à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'insertion professionnelle a rejeté la demande tendant à l'abrogation des articles 8, 9 et 10 du décret du 19 juin 1979 :
Considérant que M. X... a demandé, au Premier ministre, par lettre du 3 avril 1995, l'abrogation des articles 8 à 10 du décret du 19 juin 1979 relatif à l'application à certaines catégories d'agents relevant du ministère de l'éducation de l'article 27 de la loi du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées ; que par lettre du 18 juillet 1995 le ministre de l'éducation nationale, a fait connaître à M. X... le refus du Premier ministre d'abroger les articles susmentionnés ; que celui-ci est dès lors, recevable à demander l'annulation de cette décision ;

Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, les dispositions des articles 8 à 10 du décret du 19 juin 1979 sont dépourvues de base légale ; que, par suite, l'autorité disposant du pouvoir réglementaire était tenue d'en prononcer l'abrogation ; que, dès lors, M. X... est fondé à demander l'annulation de la décision du 18 juillet 1995 qui refuse d'abroger lesdites dispositions ;
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit fait application de l'article 6-1 de la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 modifiée :
Considérant qu'aux termes de l'article 6-1 introduit dans la loi du 16 juillet 1980 par la loi du 8 février 1995 : "Lorsqu'il règle un litige au fond par une décision qui implique nécessairement une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le Conseil d'Etat, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure et peut assortir sa décision d'une astreinte à compter d'une date qu'il détermine" ; que l'annulation de la décision du Premier ministre refusant d'abroger les articles 8 à 10 du décret du 19 juin 1979 implique nécessairement l'édiction de mesuresmettant fin à l'application des dispositions réglementaires dont l'illégalité a été constatée cidessus ; qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'ordonner cette édiction dans un délai de six mois ; que compte tenu de toutes les circonstances de l'espèce, il y a lieu de prononcer contre l'Etat, à défaut de justifier de l'édiction desdites mesures dans le délai prescrit, une astreinte de 1 000 F par jour jusqu'à la date à laquelle la présente décision aura reçu exécution ;
Sur les conclusions relatives à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, par application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 20 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La décision en date du 4 janvier 1996 de la commission nationale d'aptitude instituée par le décret du 19 juin 1979 est annulée.
Article 2 : La décision en date du 18 juillet 1995 par laquelle le Premier ministre et le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'insertion professionnelle ont refusé l'abrogation des articles 8, 9 et 10 du décret du 19 juin 1979 est annulée.
Article 3 : Une astreinte de 1 000 F par jour est prononcée à l'encontre de l'Etat s'il ne justifie pas, dans les six mois suivant la notification de la présente décision, avoir pris les mesures réglementaires nécessaires à l'exécution de l'article 2 ci-dessus.
Article 4 : L'Etat est condamné à verser à M. X... la somme de 20 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe X..., au Premier ministre et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Synthèse
Formation : 4 / 1 ssr
Numéro d'arrêt : 172634;178388
Date de la décision : 21/02/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

54-06-07-008,RJ1,RJ2 PROCEDURE - JUGEMENTS - EXECUTION DES JUGEMENTS - PRESCRIPTION D'UNE MESURE D'EXECUTION -Annulation du refus d'abroger un décret illégal - Injonction faite au Premier ministre de procéder à l'abrogation sous astreinte (1) (2).

54-06-07-008 Les articles 8 à 10 du décret n° 79-479 du 19 juin 1979 relatif à l'application à certaines catégories d'agents relevant du ministère de l'éducation de l'article 27 de la loi du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées étant entachés d'incompétence (1), le Premier ministre, saisi d'une demande en ce sens, était tenu de procéder à l'abrogation de ces dispositions. Annulation du refus opposé à la demande d'abrogation. Injonction faite au Premier ministre de prendre les mesures réglementaires nécessaires à l'abrogation. Injonction assortie, compte tenu des circonstances de l'espèce, d'une astreinte de 1000 F par jour à l'encontre de l'Etat s'il ne justifie pas avoir pris les mesures nécessaires dans un délai de six mois (2).


Références :

Décret 78-392 du 17 mars 1978 art. 3
Décret 79-479 du 19 juin 1979 art. 8, art. 9, art. 10, art. 8 à 10
Loi 75-534 du 30 juin 1975 art. 27
Loi 80-539 du 16 juillet 1980 art. 6-1
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Loi 95-125 du 08 février 1995

1.

Cf. 1991-03-08, Ministre de l'éducation nationale c/ Roger, p. 84 ;

1991-12-06, Cierco, p. 419. 2.

Cf., pour l'injonction de prendre un décret, Section, 1996-07-06, Association lyonnaise de protection des locataires, p. 293 ;

pour une injonction assortie d'astreinte, CE 1997-01-13, Viscontini, T. p.


Publications
Proposition de citation : CE, 21 fév. 1997, n° 172634;178388
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: M. Balmary
Rapporteur public ?: M. Schwartz

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:172634.19970221
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