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13/06/1997 | FRANCE | N°162224

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 13 juin 1997, 162224


Vu l'ordonnance en date du 4 octobre 1994, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 10 octobre 1994, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à cette Cour par la SOCIETE ANONYME
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Vu la demande, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy, le 22 septembre 1994 et le mémoire complémentaire enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil

d'Etat le 27 octobre 1994, présentés par la SOCIETE ANONYME
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Vu l'ordonnance en date du 4 octobre 1994, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 10 octobre 1994, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à cette Cour par la SOCIETE ANONYME
X...
;
Vu la demande, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy, le 22 septembre 1994 et le mémoire complémentaire enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 27 octobre 1994, présentés par la SOCIETE ANONYME
X...
, dont le siège social est à Villersexel (70110), représentée par son président-directeur général en exercice, et tendant à l'annulation du jugement du 21 juillet 1994 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de la Haute-Saône en date du 25 août 1993 ordonnant la fermeture dominicale des négoces de meuble dans le département, ainsi qu'à l'annulation de cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le Traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté européenne, et notamment son article 85 ;
Vu la directive 76/207 du Conseil des Communautés européennes du 9 février 1976 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotionprofessionnelles, et les conditions de travail ;
Vu le code du travail, notamment son article L. 221-17 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Fombeur, Auditeur,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 221-17 du code du travail : "Lorsqu'un accord est intervenu entre les syndicats d'employeurs et de travailleurs d'une profession et d'une région déterminées sur les conditions dans lesquelles le repos hebdomadaire est donné au personnel suivant un des modes prévus par les articles précédents, le préfet du département peut, par arrêté, sur la demande des syndicats intéressés, ordonner la fermeture au public des établissements de la profession ou de la région pendant toute la durée de ce repos ..." ;
Considérant que la circonstance que les syndicats intéressés aient formulé une première demande au préfet avant l'intervention de l'accord prévu par l'article L. 221-17 précité du code du travail, lequel reprend d'ailleurs à son compte cette demande, est sans influence sur la régularité de la procédure ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la publication de l'arrêté du préfet de la Haute-Saône en date du 25 août 1993 au recueil des actes administratifs de la préfecture de juillet 1993 résulte d'une simple erreur matérielle ; que, dès lors, la société requérante n'est pas fondée à en déduire que l'arrêté aurait en réalité été pris avant l'intervention de l'accord entre les syndicats intéressés ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un courrier de M. X... au nom du Syndicat national du commerce moderne de l'équipement de la maison en date du 23 juillet 1993, que ce dernier syndicat avait été convié aux différentes réunions qui ont permis l'adoption du protocole d'accord susévoqué ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le syndicat aurait été écarté des négociations manque en fait ;
Considérant que, préalablement à la conclusion de l'accord, la chambre syndicale interdépartementale de l'ameublement avait procédé à une enquête auprès des commerçants du département pratiquant la vente au détail d'ameublement et literie à titre principal ou accessoire, dont il était résulté que la majorité des commerçants intéressés étaient favorables à la fermeture dominicale ; que la société requérante n'apporte aucun élément de nature à mettre en cause la validité de cette enquête ; que, si elle soutient qu'auraient également dû être consultées les organisations syndicales représentant les commerces ayant des rayons de meubles et de literie, elle n'indique pas quelles étaient ces organisations ni même s'il en existait dans la région considérée ; que, dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que l'accord, signé entre la chambre syndicale interdépartementale de l'ameublement et la confédération générale des petites et moyennes entreprises, d'une part, et les unions départementales CFDT, CFTC, CGE-CGC etCGT-FO, d'autre part, n'aurait pas exprimé la volonté de la majorité indiscutable de tous les commerçants pratiquant la vente au détail d'ameublement et de literie à titre principal ou accessoire et dont l'établissement ou partie de celui-ci était susceptible d'être fermé ;

Considérant que, dans la mesure où les articles de literie sont pour la plupart également proposés par les commerces d'ameublement, où une concurrence peut s'établir entre eux que favoriserait l'application aux uns seulement de l'arrêté de fermeture et où il n'apparaît pas que les commerces de literie soient représentés dans la région considérée par des organisations professionnelles distinctes de celles représentant les commerces d'ameublement, les commerçants pratiquant la vente au détail d'ameublement et de literie doivent être regardés comme constituant une même profession au sens de l'article L. 221-17 du code du travail ; que, dès lors, le préfet de la Haute-Saône a pu légalement prendre un arrêté visant cette unique profession ;
Considérant que les signataires du protocole, à l'article 2 de celui-ci, demandaient que soit pris un arrêté ordonnant "la fermeture au public le dimanche des entreprises ou établissements qui exercent à titre unique ou principal la vente d'ameublement et de literie, ainsi que des rayons et surfaces de vente de meubles et de literie dans les autres commerces" ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet, en visant également la literie, aurait prescrit une mesure qui n'aurait pas fait l'objet de l'accord intervenu manque en fait ;
Considérant que quand bien même la chambre syndicale interdépartementale de l'ameublement n'aurait pas procédé au dépôt de la modification de ses statuts comme l'exige l'article L. 411-3 du code du travail, cette omission a pour seul effet de rendre inopposables aux tiers les modifications intervenues sans pour autant priver d'existence légale la chambre syndicale, qui avait procédé au dépôt des statuts lors de sa création ; qu'il ressort clairement des pièces du dossier, et notamment du compte-rendu de l'assemblée générale de la chambre syndicale du 21 juin 1993, que M. Y... a été renouvelé en sa qualité de membre du comité directeur par cette assemblée ; que, dès lors, il pouvait en conformité avec les statuts du syndicat être désigné en qualité de président ; que le moyen tiré de ce que la chambre syndicale n'aurait pas été représentative au sens des dispositions de l'article L. 133-2 du code du travail est inopérant, l'article L. 221-17 du même code ne subordonnant pas la validité de l'accord intervenu entre les syndicats d'employeurs et de travailleurs à une telle représentativité des syndicats d'employeurs signataires ; qu'il suit de là que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'accord ne pouvait être valablement signé par M. Y... au nom de la chambre syndicale interdépartementale de l'ameublement ;

Considérant que, d'une part, s'il ressort clairement des stipulations de l'article 85 du Traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté européenne qu'elles interdisent aux entreprises tout accord ou toute pratique de nature à restreindre ou à fausser le jeu de la concurrence dans les échanges entre les Etats membres de la Communauté européenne, l'article L. 221-17 du code du travail n'a ni pour objet ni pour effet de permettre ou favoriser des ententes entre les entreprises des secteurs concernés au sens desdites stipulations ; que, d'autre part, si l'article 2 de la directive 76/207 du Conseil des Communautés européennes du 9 février 1976 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail interdit toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement, soit indirectement, il ne saurait être sérieusement soutenu que l'article L. 221-17 du code du travail aurait pour conséquence d'instaurer une telle discrimination ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice des Communautés européennes d'une question préjudicielle, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Haute-Saônea fait application d'une législation incompatible avec le traité instituant la Communauté européenne ou avec la directive précitée ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ait méconnu le pouvoir d'appréciation qu'il tient de l'article L. 221-17 du code du travail en prenant l'arrêté attaqué ;
Considérant que la société requérante se contente d'invoquer, à l'appui du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet, les difficultés entraînées pour elle-même par la décision de fermeture au public le dimanche ; que, toutefois, elle ne saurait se prévaloir du chiffre d'affaires réalisé jusqu'alors le dimanche en violation d'un précédent arrêté de fermeture et, par conséquent, dans des conditions illégales de nature à fausser la concurrence ; que, dès lors, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ne peut être que rejeté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE ANONYME
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n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Saône en date du 25 août 1993 ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE ANONYME
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est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ANONYME
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et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 162224
Date de la décision : 13/06/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-03-02 TRAVAIL ET EMPLOI - CONDITIONS DE TRAVAIL - REPOS HEBDOMADAIRE.


Références :

Code du travail L221-17, L411-3, L133-2


Publications
Proposition de citation : CE, 13 jui. 1997, n° 162224
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mlle Fombeur
Rapporteur public ?: Mme Maugüé

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:162224.19970613
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