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25/02/1998 | FRANCE | N°168726

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 25 février 1998, 168726


Vu l'ordonnance en date du 10 avril 1995, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 avril 1995, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée à cette cour par le PREFET DE LA HAUTE-CORSE ;
Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon les 24 février et 6 avril 1995, présentés par le PREFET DE LA HAUTE-CORSE et te

ndant :
1°) à l'annulation du jugement du 18 novembre 1994 par ...

Vu l'ordonnance en date du 10 avril 1995, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 avril 1995, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée à cette cour par le PREFET DE LA HAUTE-CORSE ;
Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon les 24 février et 6 avril 1995, présentés par le PREFET DE LA HAUTE-CORSE et tendant :
1°) à l'annulation du jugement du 18 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté son déféré dirigé contre la délibération du 21 juin 1994 du conseil municipal de Saint-Florent portant création d'un emploi de directeur du port de plaisance ;
2°) à l'annulation de cette délibération ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Courtial, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir présentée par la commune de Saint-Florent :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la requête du PREFET DE LA HAUTE-CORSE tendant à l'annulation du jugement du 18 novembre 1994, en tant que par ce jugement le tribunal administratif de Bastia a rejeté son déféré dirigé contre la délibération en date du 21 juin 1994 par laquelle le conseil municipal de Saint-Florent a créé un emploi de directeur du port de plaisance, a été enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 24 février 1995, soit avant l'expiration du délai d'appel qui a commencé à courir à compter de la notification dudit jugement au préfet, le 10 janvier 1995 ; que, par suite, la commune de Saint-Florent n'est pas fondée à soutenir que la requête du préfet serait irrecevble en raison de sa tardiveté ;
Sur la légalité de la délibération attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la loi du 2 mars 1982 alors en vigueur : "Lorsque le budget d'une commune n'est pas voté en équilibre réel, la chambre régionale des comptes, saisie par le représentant de l'Etat dans un délai de trente jours à compter de la transmission prévue à l'article 2 le constate et propose à la commune, dans un délai de trente jours à compter de la saisine, les mesures nécessaires au rétablissement de l'équilibre budgétaire et demande au conseil municipal une nouvelle délibération./ La nouvelle délibération du conseil municipal, rectifiant le budget initial, doit intervenir dans un délai d'un mois à partir de la communication des propositions de la chambre régionale des comptes./ Si le conseil municipal n'a pas délibéré dans le délai prescrit, ou si la délibération prise ne comporte pas de mesures de redressement jugées suffisantes par la chambre régionale des comptes, qui se prononce sur ce point dans un délai de quinze jours à partir de la transmission de la nouvelle délibération, le budget est réglé et rendu exécutoire par le représentant de l'Etat dans le département ( ...)./ A compter de la saisine de la chambre régionale des comptes et jusqu'au terme de la procédure, le conseil municipal ne peut délibérer en matière budgétaire, sauf pour la délibération prévue au troisième alinéa du présent article et pour l'application de l'article 9" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, sur le fondement des dispositions précitées, le PREFET DE LA HAUTE-CORSE a saisi le 18 avril 1994 la chambre régionale des comptes du budget de la commune de Saint-Florent ; que, toutefois, avant le terme de cette procédure, le conseil municipal a décidé, par la délibération attaquée, la création d'un emploi et l'inscription correspondante d'un crédit au budget du service, exploité en régie dotée de la seule autonomie financière, du port de plaisance ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 323-10 du code des communes : "Les produits et les charges des régies dotées de la seule autonomie financière ( ...) font l'objet d'un budget spécial annexé au budget de la commune voté par le conseil municipal./ Dans les budgets et les comptes de la commune, ces produits et ces charges sont repris dans deux articles, l'un pour les recettes, l'autre pour les charges" ; que si ces dispositions apportent un aménagement au principe de l'unité budgétaire, elles n'ont pas pour objet ou pour effet de rendre le budget spécial du service indépendant du budget de la commune auquel il est annexé ;
Considérant, d'autre part, que bien que l'article L. 322-5 du code susmentionné, applicable notamment aux services publics communaux à caractère industriel ou commercial exploités en régie, pose le principe auquel il apporte d'ailleurs des dérogations, de l'équilibre en recettes et en dépenses du budget de ces services, ses prescriptions n'impliquent pas davantage, dans le cas d'une exploitation en régie dotée de la seule autonomie financière, l'indépendance du budget spécial par rapport au budget de la commune ;
Considérant qu'ainsi, par application des dispositions précitées de l'article 8 de la loi du 2 mars 1982, le conseil municipal de Saint-Florent ne pouvait, à compter de la saisine de la chambre régionale des comptes par le préfet et jusqu'au terme de la procédure, compétemment prendre de décision ayant une incidence tant sur le budget de la commune que sur un budget spécial annexé à celui-ci et qu'il n'a donc pu légalement délibérer sur la création d'un emploi de directeur du port de plaisance et l'inscription du crédit correspondant au budget spécial du service de l'exploitation de ce port ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-CORSE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté son déféré dirigé contre la délibération attaquée ;
Sur les conclusions de la commune de Saint-Florent tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la commune de Saint-Florent la somme qu'elle demande au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'article 2 du jugement du 18 novembre 1994 du tribunal administratif de Bastia et la délibération du 21 juin 1994 du conseil municipal de Saint-Florent sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Florent tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA HAUTE-CORSE, à la commune de Saint-Florent et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 168726
Date de la décision : 25/02/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

135-02-04-01 COLLECTIVITES TERRITORIALES - COMMUNE - FINANCES COMMUNALES - BUDGET -Interdiction de prendre des décisions affectant le budget de la commune durant la procédure engagée devant la chambre régionale des comptes lorsque le budget n'est pas voté en équilibre réel (article 8 de la loi du 2 mars 1982) - Portée - Application aux décisions concernant le budget d'une régie dotée de la seule autonomie financière.

135-02-04-01 Par application des dispositions de l'article 8 de la loi du 2 mars 1982 qui, lorsque le budget d'une commune n'est pas voté en équilibre réel, interdisent au conseil municipal, à compter de la saisine de la chambre régionale des comptes par le préfet et jusqu'au terme de la procédure, de prendre des décisions ayant une incidence tant sur le budget de la commune que sur un budget spécial annexé à celui-ci, le conseil municipal ne peut légalement prendre, durant cette période, de décision concernant le budget spécial d'une régie dotée de la seule autonomie financière.


Références :

Code des communes L323-10, L322-5
Loi 82-213 du 02 mars 1982 art. 8
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 25 fév. 1998, n° 168726
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Aubin
Rapporteur ?: M. Courtial
Rapporteur public ?: M. Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:168726.19980225
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