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29/04/1998 | FRANCE | N°160694

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 29 avril 1998, 160694


Vu la requête, enregistrée le 5 août 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Bernard X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande dirigée contre, d'une part, la décision du 6 juin 1988 de la commission départementale d'aménagement foncier de l'Ain ayant statué sur la situation de ses propriétés et, d'autre part, l'arrêté du 10 février 1989 par lequel le préfet de l'Ain a ordonné le dépôt en mairie du plan de remembrement

de Saint-Cyr-sur-Menthon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette d...

Vu la requête, enregistrée le 5 août 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Bernard X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande dirigée contre, d'une part, la décision du 6 juin 1988 de la commission départementale d'aménagement foncier de l'Ain ayant statué sur la situation de ses propriétés et, d'autre part, l'arrêté du 10 février 1989 par lequel le préfet de l'Ain a ordonné le dépôt en mairie du plan de remembrement de Saint-Cyr-sur-Menthon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision et ledit arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code rural ;
Vu la loi n° 62-933 du 8 août 1962 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Pineau, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision de la commission départementale de l'aménagement foncier de l'Ain du 6 juin 1988 en tant qu'elle concerne les propriétés de M. X... :
Sur la légalité externe :
Considérant qu'en application de l'article 2-4 du code rural, les décisions prises par la commission communale d'aménagement foncier peuvent être portées par les intéressés devant la commission départementale d'aménagement foncier ; qu'aux termes de l'article 10 du décret n° 86-1415 du 31 décembre 1986 concernant la commission départementale : "Il est tenu procès-verbal des séances" ; et qu'aux termes de son article 11 : "Les intéressés présentent par écrit ( ...) leurs observations et réclamations. Sur leur demande adressée par écrit au président de cette commission, ils sont entendus par celle-ci. ( ...) les observations et réclamations adressées par écrit sont inscrites sur un registre d'ordre et il en est donné récépissé. Il est tenu procès-verbal des dires des intéressés" ; qu'en application de ces dispositions, le requérant a été entendu par la commission départementale d'aménagement foncier de l'Ain, en sa séance du 21 mars 1988 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la procédure à l'issue de laquelle la commission a pris la décision du 6 juin 1988 ait été irrégulière ;
Sur la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 19 du code rural alors applicable : "Le remembrement, applicable aux propriétés rurales non bâties, se fait au moyen d'une nouvelle distribution des parcelles morcellées et dispersées. Il a principalement pour but, par la constitution d'exploitations rurales d'un seul tenant ou à grandes parcelles bien groupées, d'améliorer l'exploitation agricole des biens qui y sont soumis ( ...) Sauf accord des propriétaires et exploitants intéressés, le nouveau lotissement ne peut allonger la distance moyenne des terres au centre d'exploitation principal, si ce n'est dans la mesure nécessaire au regroupement parcellaire" ; qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 8 août 1962 : "Toutefois, sont autorisées les dérogations aux dispositions de l'article 19 du code rural qui seraient rendues inévitables en raison de l'implantation de l'ouvrage et des caractéristiques de la voirie mise en place à la suite de sa réalisation" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment du plan de situation, que l'éloignement de son centre d'exploitation dont se plaint le requérant concernant les parcelles d'attribution anciennement cadastrées A 626 et D 371, qui , d'ailleurs, sont contiguës à des parcelles d'apports réattribuées, soit excessif, alors que la distance moyenne a été réduite et que le requérant bénéficie d'un bon regroupement parcellaire ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 21 du même code : "Chaque propriétaire doit recevoir, par la nouvelle distribution, une superficie globaleéquivalente, en valeur de productivité réelle, à celle des terrains qu'il a apportés, déduction faite de la surface nécessaire aux ouvrages collectifs visés à l'article 25 ..." ; qu'il résulte des dispositions précitées que si la loi ne garantit aux propriétaires ni une égalité absolue entre la surface et la productivité des terres qui leur sont attribuées et celles de leurs apports, ni une équivalence parcelle par parcelle ou classe par classe entre ces terres, les modifications appréciées compte par compte qui sont apportées à la répartition des terres ne doivent pas entraîner un grave déséquilibre dans les conditions d'exploitation ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la fiche de répartition du compte n° 32100 Q, que M. X... a reçu 5 hectares 37 ares 50 centiares en catégorie unique "terre" valant 42 845 points en échange d'apports réduits de 5 hectares 03 ares 45 centiares valant 41 180 points ; que la circonstance, à la supposer établie, que la parcelle d'attribution anciennement cadastrée Section D 371, qui est d'une superficie réduite, soit inondable, n'a pas entraîné, dans les circonstances de l'espèce, un grave déséquilibre dans les conditions d'exploitation de l'ensemble de la propriété ; qu'ainsi, M. X... ne peut se prévaloir d'une atteinte à la règle d'équivalence posée par l'article 21 du code rural ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 20 du code rural, dans sa rédaction issue de la loi du 11 juillet 1975 : "Doivent être réattribués à leurs propriétaires, sauf accord contraire, et ne subir que les modifications de limites indispensables à l'aménagement : ( ...) 4° les terrains qui, en raison de leur situation dans une agglomération ou à proximité immédiate d'une agglomération et de leur desserte effective à la fois par des voies d'accès, un réseau électrique, des réseaux d'eau et éventuellement d'assainissement, de dimensions adaptées à la capacité des parcelles en cause, présentent le caractère de terrain à bâtir, à la date de l'arrêté préfectoral instituant la commission de remembrement ; 5° de façon générale, les immeubles dont les propriétaires ne peuvent bénéficier de l'opération de remembrement, en raison de l'utilisation spéciale desdits immeubles" ; que, d'une part, il ressort des pièces du dossier que les parcelles d'apport anciennement cadastrées B 343, 355, 356, 358 et 376 dont le requérant demande la restitution sur le fondement du 4° susmentionné de l'article 21 du code rural, et qui sont à usage agricole exclusif, ne sont pas situées à proximité immédiate d'une agglomération ; que, par suite, ces parcelles ne présentent pas le caractère de terrains à bâtir au sens desdites dispositions ; que, d'autre part, la culture de courges muscade sur sa parcelle d'apport C 820 n'est pas de nature à faire regarder cette parcelle comme un terrain à utilisation spéciale au sens des dispositions de l'article 20-5° précitées ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du préfet de l'Ain du 10 février 1989 ordonnant le dépôt en mairie du plan de remembrement de Saint-Cyr-sur-Menthon :
Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la loi n° 62-933 du 8 août 1962 telle que modifiée par les lois n° 67-1253 du 30 décembre 1967 et n° 80-502 du 4 juillet 1980 : "Lorsque les expropriations en vue de la réalisation des aménagements ou ouvrages mentionnés à l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature sont susceptibles de compromettre la structure des exploitations dans une zone déterminée, l'obligation sera faite au maître de l'ouvrage ( ...) de remédier aux dommages causés en participant financièrement à l'exécution d'opérations de remembrement ( ...) lorsqu'un remembrement est réalisé en application du présent article, les dispositions du chapitre III du titre Ier du livre Ier du code rural sont applicables ; qu'en vertu de l'article 22 du code rural alors applicable, le préfet de département ordonne le dépôt et l'affichage du plan définitif de remembrement ; que son arrêté est soumis aux règles d'édiction et de publicité prévues àl'article 30 du décret n° 86-1415 du 31 décembre 1986 ;
Considérant, d'une part, que la circonstance que l'arrêté du 10 février 1989 ne mentionne pas les délais et voies de recours conformément au décret du 11 janvier 1965 tel qu'il a été modifié par le décret du 28 novembre 1983 et, d'autre part, le fait qu'à la date de son intervention, tous les litiges concernant les opérations de remembrement n'étaient pas réglés, sont sans incidence sur la légalité de cet arrêté ;

Considérant que l'arrêté attaqué a été pris sur le fondement des dispositions législatives susmentionnées ; que, dès lors, le moyen tiré de que cet arrêté aurait méconnu le principe constitutionnel du droit de propriété posé à l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, à laquelle se réfère la Constitution du 4 octobre 1958, est inopérant ; que l'article 545 du code civil ne saurait faire obstacle à l'application des dispositions législatives relatives au remembrement ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Bernard X... et au ministre de l'agriculture et de la pêche.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 160694
Date de la décision : 29/04/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

03-04 AGRICULTURE, CHASSE ET PECHE - REMEMBREMENT FONCIER AGRICOLE.


Références :

Code civil 545
Code rural 2-4, 19, 21, 20, 22
Décret 65-29 du 11 janvier 1965
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983
Décret 86-1415 du 31 décembre 1986 art. 10, art. 30
Loi 62-933 du 08 août 1962 art. 10
Loi 67-1253 du 30 décembre 1967
Loi 75-621 du 11 juillet 1975
Loi 76-629 du 10 juillet 1976 art. 2
Loi 80-502 du 04 juillet 1980


Publications
Proposition de citation : CE, 29 avr. 1998, n° 160694
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Pineau
Rapporteur public ?: M. Bonichot

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:160694.19980429
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