Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 20 janvier et 10 avril 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Salvatore X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 21 mars 1996 accordant son extradition aux autorités italiennes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code pénal ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;
Vu la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition des étrangers ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de L'Hermite, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Le Prado, avocat de M. Salvatore X...,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité externe :
Considérant que le décret attaqué, en date du 21 mars 1996, accordant l'extradition du requérant aux autorités italiennes n'avait pas à comporter la justification de l'accomplissement par lesdites autorités des formalités prescrites par les dispositions du b) et du c) du paragraphe 2 de l'article 12 de la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 relatives aux pièces à produire par l'Etat requérant à l'appui de la demande d'extradition ; qu'il ressort des pièces du dossier que lesdites formalités ont été respectées en l'espèce ;
Sur la légalité interne :
Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la convention susmentionnée : "L'extradition ne sera pas accordée si la prescription de l'action ou de la peine est acquise d'après la législation soit de la partie requérante soit de la partie requise" ; qu'en vertu de l'article 133-3 du code pénal : "Les peines prononcées pour un délit se prescrivent par cinq années révolues à compter de la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive" ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 10 mars 1927, cette loi s'applique "aux points qui n'auraient pas été réglementés par les traités" ; que l'article 10 précité de la convention européenne d'extradition ne précisant pas la date à laquelle il y a lieu de se placer pour apprécier la prescription de l'action ou de la peine, les dispositions applicables sur ce point sont celles du 5° de l'article 5 de la loi du 10 mars 1927, selon lesquelles la prescription de la peine s'apprécie à la date de l'arrestation de l'individu réclamé ; que le décret attaqué a accordé l'extradition de M. X... sur le fondement d'un ordre d'exécution d'un reliquat de peines résultant d'une condamnation à quatre ans et six mois d'emprisonnement par un arrêt de la cour d'appel de Rome du 19 décembre 1988 et d'une condamnation à un an et huit mois d'emprisonnement par un arrêt de la cour d'appel de Bologne du 31 mars 1992 ; que la première de ces deux condamnations est devenue définitive le 30 octobre 1990 ; que l'arrestation du requérant a eu lieu le 26 juillet 1995 ; que, dès lors, en vertu des dispositions précitées, la prescription de cette peine n'était pas acquise ; que le moyen relatif à la prescription de la seconde des peines mentionnées ci-dessus a été abandonné par le requérant ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que des mesures d'amnistie et de grâce aient exonéré M. X... de l'obligation d'exécuter tout reliquat de peines au titre des condamnations susmentionnées ; que la circonstance, à la supposer établie, que ce reliquat serait inférieur à la durée de quatre mois mentionnée au paragraphe 1 de l'article 2 de la convention européenne d'extradition est sans influence sur la légalité du décret attaqué, dès lors que la durée de quatre mois ainsi prévue s'applique à la sanction prononcée et non à la peine restant à accomplir ;
Considérant qu'en cas de condamnation à une peine unique, prononcée pour plusieurs infractions, l'extradition peut être décidée à la condition que l'une au moins de ces infractions figure parmi celles qui peuvent donner lieu à extradition et que la condamnation prononcée n'excède pas le maximum de la peine encourue pour l'ensemble des infractions pouvant donner lieu à extradition ; que le décret attaqué a accordé l'extradition de M. X... pour l'exécution des deux peines susmentionnées "et à l'exception des faits d'association de malfaiteurs et de fausseté et substitution de personne visés dans l'arrêt de la cour d'appel de Rome du 19 décembre 1988" ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, il ne ressort pas des pièces du dossier que la peine de quatre ans et six mois d'emprisonnementprononcée par la cour d'appel de Rome excède le maximum de la peine encourue pour les seules infractions retenues par le décret d'extradition ;
Considérant enfin que la prise en compte ultérieure, le cas échéant, par les autorités italiennes compétentes, de la durée de la détention du requérant en France au titre de l'écrou extraditionnel relève exclusivement desdites autorités, dans le silence de la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation du décret attaqué accordant son extradition aux autorités italiennes ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Salvatore X..., au Premier ministre et au garde des sceaux, ministre de la justice.