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10/05/1999 | FRANCE | N°176918

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 10 mai 1999, 176918


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 janvier et 17 mai 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AUXERRE, dont le siège est ..., la CHAMBRE DE METIERS DE L'YONNE, dont le siège est ..., le COMITE DE DEFENSE DES COMMERCANTS ET ARTISANS DU TONNERROIS, dont le siège est à Tonnerre (89700), la SA DEBIASTRE-MULLARD, dont le siège est 5 place de la Gare à Tonnerre (89700), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux dûment habilités à cet effet et domiciliés audit

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 janvier et 17 mai 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AUXERRE, dont le siège est ..., la CHAMBRE DE METIERS DE L'YONNE, dont le siège est ..., le COMITE DE DEFENSE DES COMMERCANTS ET ARTISANS DU TONNERROIS, dont le siège est à Tonnerre (89700), la SA DEBIASTRE-MULLARD, dont le siège est 5 place de la Gare à Tonnerre (89700), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux dûment habilités à cet effet et domiciliés audit siège, la SA Etablissements DELPRAT, dont le siège est ..., agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux dûment habilités à cet effet et domiciliés audit siège, la Société LE COIN FLEURI, dont le siège est 1, place Charles-de-Gaulle à Tonnerre (89700), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux dûment habilités à cet effet et domiciliés audit siège, M. Philippe EVRARD, demeurant 29, rue de l'Hôtel de Ville à Tonnerre (89700), la SARL GONAT, dont le siège est ..., agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux dûment habilités à cet effet et domiciliés audit siège, la SARL MICRO-TONNERRE, dont le siège est 8, rue du Collège à Tonnerre (89700), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux dûment habilités à cet effet et domiciliés audit siège, la SA PERRIN, dont le siège est ...Hôpital à Tonnerre (89700), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux dûment habilités à cet effet et domiciliés audit siège, Mme Z..., demeurant ...Hôtel de Ville à Tonnerre (89700), la SARL TV SERVICE, dont le siège est ...Hôpital à Tonnerre (89700), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux dûment habilités à cet effet et domiciliés audit siège, la SA TMT, dont le siège est 13, place Charles-de-Gaulle à Tonnerre (89700), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux dûment habilités à cet effet et domiciliés audit siège, la SARL TONNERREACCESSOIRES, dont le siège est ..., agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux dûment habilités à cet effet et domiciliés audit siège, M. B..., demeurant ..., la Société GAMM VERT, dont le siège est à Epineul (89700), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux dûment habilités à cet effet et domiciliés audit siège et M. X..., demeurant ... à Sel, à Tonnerre (89700) ; la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AUXERRE et autres demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision en date du 17 octobre 1995 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a, sur recours exercé par la société Tailfer contre une décision de la commission départementale d'équipement commercial de l'Yonne du 30 juin 1995, autorisé ladite société à créer sur le territoire de la commune de Tonnerre un magasin de 2 500 m de surface de vente consacré au commerce de meubles, d'appareils électroménagers, d'appareils de radio et de télévision et d'articles de bricolage et de jardinage ;
2°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 30 000 F sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat modifiée ;
Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 modifié ;
Vu l'arrêté du 16 novembre 1993 fixant le contenu de la demande d'implantation de certains magasins de commerce de détail ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Olson, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AUXERRE, et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SA Tailfer,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la société Tailfer :
Sur les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 32 du décret du 9 mars 1993 susvisé : "La commission nationale d'équipement commercial entend à leur requête, le maire de la commune d'implantation, l'auteur de la demande d'autorisation, ainsi que l'auteur ou l'un des auteurs du recours. Elle peut entendre toute personne qu'elle juge utile de consulter" ;
Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que le secrétariat de la commission nationale d'équipement commercial a fait savoir au maire de la commune de Tonnerre, par note expédiée par voie postale le 6 octobre 1995, que le recours formé par la société Tailfer serait inscrit à l'ordre du jour de la séance de ladite commission prévue le 17 octobre 1995 ; que si, par suite d'un retard d'acheminement postal, ladite note n'est parvenue à son destinataire que le 16 octobre 1995, cette circonstance ne faisait toutefois pas matériellement obstacle à ce que le maire de cette commune fasse connaître à la commission nationale, par tout moyen approprié, son intention de formuler des observations sur ce recours ou lui demande de reporter l'examen de l'affaire à une séance suivante ; qu'il est constant que le maire n'a pas manifesté une telle intention ; que, dès lors, les conditions dans lesquelles le maire de la commune a été informé de l'examen du recours formé par la société Tailfer n'ont pas entaché d'irrégularité la procédure au terme de laquelle a été prise la décision attaquée ;
Considérant, d'autre part, qu'en décidant de procéder à l'audition de M. A..., directeur général de la société Schiever, la commission nationale d'équipement commercial s'est bornée à faire usage de son pouvoir d'entendre toute personne qu'elle estime utile de consulter ; que, par suite, cette audition n'a pas été de nature à entacher d'irrégularité la procédure suivie devant la commission nationale ;
Considérant qu'en vertu du troisième alinéa de l'article 30 du décret du 9 mars 1993, la commission nationale d'équipement commercial ne peut valablement délibérer qu'en présence de cinq membres au moins ; qu'il ressort du procès-verbal de la séance du 17 octobre 1995 au cours de laquelle ladite commission a pris la décision attaquée que ce quorum était atteint ; que par suite, le moyen tiré de ce qu'il n'aurait pas été satisfait, en l'espèce, à ladite exigence doit être écarté ;
Sur le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact :

Considérant qu'aux termes de l'article 28 de la loi du 27 décembre 1973 susvisée dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : "Il est créé une commission départementale d'équipement commercial ( ...)/ Dans le cadre des principes définis aux articles 1er, 3 et 4, la commission statue en prenant en considération l'offre et la demande globale pour chaque secteur d'activité dans la zone de chalandise concernée ( ...)" ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 18 du décret du 9 mars 1993 dans sa rédaction issue du décret du 16 novembre 1993 : "La demande d'autorisation est accompagnée ( ...) c) d'une étude destinée à permettre à la commission d'apprécier l'impact prévisible du projet au regard des critères prévus par l'article 28 de la loi du 27 décembre 1973 susvisée et justifiant du respect des principes posés par les articles 1er et 3 de la même loi./ Cette étude ( ...) 2° Evalue le marché théorique de la zone de chalandise. 3° Récapitule l'équipement commercial de la zone de chalandise. 4° Mentionne les équipements commerciaux exerçant une attraction sur la zone de chalandise ( ...)" ;
Considérant, en premier lieu, que l'étude d'impact jointe au dossier de la demande déposée par le pétitionnaire faisait apparaître une prévision de chiffre d'affaires annuel de 26 millions de francs, soit environ 20 millions de francs pour la vente d'articles de bricolage de décoration et de jardinage et environ 6 millions de francs pour la vente de meubles et d'articles d'équipement de la maison ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des rapports rédigés par les services instructeurs tant devant la commission départementale que devant la commission nationale d'équipement commercial, que de telles prévisions aient été fondées sur des évaluations erronées ; qu'ainsi l'évaluation du marché théorique de la zone de chalandise n'était pas entachée d'inexactitude matérielle ;
Considérant, en second lieu, que dès lors que la demande présentée par la société Tailfer prévoyait de consacrer une partie des surfaces de vente en cause à la vente d'appareils d'électroménager et d'appareils de radio et de télévision, il appartenait au pétitionnaire de récapituler l'équipement commercial existant, pour ce secteur d'activité, dans la zone de chalandise ; que, d'une part, il n'est pas contesté que la zone de chalandise était dépourvue de magasins non spécialisés disposant de rayons de même nature que ceux visés par le projet ; que si, d'autre part, n'ont pas été mentionnés dans l'étude d'impact cinq magasins spécialisés dans la vente des articles susmentionnés et situés dans la zone de chalandise, il est constant que chacun de ces magasins présentait une surface de vente inférieure à 400 m ; que l'annexe de l'arrêté du 16 novembre 1993 susvisé en son paragraphe 4-2 n'imposait le recensement exhaustif que des magasins d'une surface de vente supérieure à 400 m ; qu'au demeurant, le rapport de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AUXERRE versé au dossier d'instruction de la demande faisait mention de l'existence de ces commerces ;

Considérant, enfin, que si le pétitionnaire a cru devoir, dans l'étude d'impact, classer en tant qu'équipements commerciaux n'exerçant pas d'attraction sur la zone de chalandise divers commerces situés à Avallon, Bar-sur-Seine, Joigny et Semur-en-Auxois, soit à des distances comprises entre 50 et 65 kilomètres du site du magasin que la société Tailfer se proposait de créer à Tonnerre, le moyen tiré de ce qu'une telle affirmation aurait été entachée d'erreur de fait n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutiennent la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AUXERRE et autres, l'étude d'impact produite à l'appui de la demande litigieuse satisfaisait aux dispositions précitées du c) de l'article 18 du décret du 9 mars 1993 susvisé ;
Sur la méconnaissance des principes d'orientation résultant de la loi du 27 décembre 1973 modifiée :
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973, dans sa rédaction issue de la loi du 29 janvier 1993, que le régime des autorisations de création ou d'extension des équipements commerciaux a pour objet d'assurer "l'expansion de toutes les formes d'entreprises" de commerce et d'artisanat et d'éviter "qu'une croissance désordonnée des formes nouvelles de distribution ne provoque l'écrasement de la petite entreprise et le gaspillage des équipements commerciaux" ; qu'en vertu de l'article 28 de la même loi la commission départementale puis, sur recours, la commission nationale d'équipement commercial prennent notamment en considération "l'effet potentiel du projet sur l'appareil commercial ( ...) de cette zone et sur l'équilibre souhaitable entre les différentes formes de commerce" et "la nécessité d'une concurrence suffisante au sein de chaque forme de commerce ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet objet de l'autorisation contestée tendait à la création, sur le territoire de la commune de Tonnerre (Yonne) d'un magasin Maxibrico de 2 500 m de surface de vente consacré à la vente de meubles d'appareils d'électroménager, d'appareils de radio et de télévision et d'articles de bricolage et de jardinage ; que la zone de chalandise était dépourvue de grandes surfaces spécialisées dans la vente de meubles, et comportait des surfaces limitées spécialisés dans la vente d'articles de jardinage ; que la densité constatée des équipements commerciaux de ladite zone, spécialisés dans les articles d'équipement de la maison et d'articles de bricolage, était inférieure aux moyennes départementale et nationale ; que le magasin projeté était de nature à fixer localement une clientèle susceptible d'orienter ses achats vers les équipements commerciaux extérieurs à la zone de chalandise ; que, par suite, la commission nationale d'équipement commercial a pu, par la décision attaquée, autoriser ledit projet sans porter atteinte aux principes susrappelés définis par l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 susvisée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AUXERRE et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision susvisée de la commission nationale d'équipement commercial en date du 17 octobre 1995 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 susvisée font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AUXERRE et autres la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AUXERRE et autres est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AUXERRE, à la CHAMBRE DE METIERS DE L'YONNE, au COMITE DE DEFENSE DES COMMERCANTS ET ARTISANS DU TONNERROIS, à la SA DEBIASTREMULLARS, à la SA Etablissements DELPRAT, à la Société LE COIN FLEURI, à M. Philippe Y..., à la SARL GONAT, à la SARL MICRO-TONNERRE, à la SA PERRIN, à Mme Z..., à la SARL TV SERVICE, à la SA TMT, à la SARL TONNERRE ACCESSOIRES, à M. B..., à la Société GAMM VERT, à M. X..., à la société Tailfer, à la commission nationale d'équipement commercial et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 4 / 1 ssr
Numéro d'arrêt : 176918
Date de la décision : 10/05/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

68-04-043 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - AUTRES AUTORISATIONS D'UTILISATION DES SOLS - AUTORISATION D'URBANISME COMMERCIAL (VOIR COMMERCE, INDUSTRIE, INTERVENTION ECONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE).


Références :

Arrêté du 16 novembre 1993 annexe
Décret 93-306 du 09 mars 1993 art. 32, art. 30, art. 18
Loi 73-1193 du 27 décembre 1973 art. 28, art. 1
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 10 mai. 1999, n° 176918
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olson
Rapporteur public ?: M. Schwartz

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:176918.19990510
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