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07/07/1999 | FRANCE | N°203590

France | France, Conseil d'État, 3 ss, 07 juillet 1999, 203590


Vu la requête enregistrée le 15 janvier 1999 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Philomène Y...
X..., demeurant chez M. Tshimanga Z..., ... ; Mlle MBIMBI X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 7 décembre 1998 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 novembre 1998 par lequel le préfet des Yvelines a ordonné sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
3°) de décider qu'il sera s

ursis à l'exécution de cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la conven...

Vu la requête enregistrée le 15 janvier 1999 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Philomène Y...
X..., demeurant chez M. Tshimanga Z..., ... ; Mlle MBIMBI X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 7 décembre 1998 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 novembre 1998 par lequel le préfet des Yvelines a ordonné sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
3°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et notamment ses articles 3 et 8 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Stéfanini, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée susvisée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle MBIMBI X..., ressortissante de la République démocratique du Congo, qui a fait l'objet le 12 mai 1998 d'un refus de délivrance de titre de séjour qui lui a été notifié le 17 mai 1998, s'est maintenue dans ces conditions sur le territoire français et entrait donc, à la date de l'arrêté attaqué, dans le champ d'application des dispositions précitées ;
Considérant que Mlle MBIMBI X... n'a soulevé, dans sa demande présentée devant le tribunal administratif de Versailles et dirigée contre l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre le 16 novembre 1998, aucun moyen se rattachant à la légalité externe ; que, par suite, si l'intéressée invoque devant le Conseil d'Etat le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté, ces prétentions, fondées sur une cause juridique distincte de celles sur lesquelles reposaient les moyens qu'elle avait soulevés en première instance, constituent une demande nouvelle, présentée pour la première fois en appel et, par suite, non recevable ;
Considérant que Mlle MBIMBI X... soutient que l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article 27 ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée susvisée et est entaché d'une irrégularité substantielle, dès lors que, ne comportant aucune indication quant au pays de destination de la mesure d'éloignement, il n'est pas davantage accompagné d'une décision distincte fixant ce pays ; que, toutefois, ce moyen manque en fait dès lors que la désignation du pays de destination de l'intéressée résulte tant des mentions figurant sur le bulletin de notification de l'arrêté attaqué que d'une décision, distincte de ce dernier, prise le 16 novembre 1998 par le directeur de cabinet du préfet des Yvelines, agissant par délégation du préfet de ce département ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, àla défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;

Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre la mesure d'éloignement prise à son encontre le 16 novembre 1998, Mlle MBIMBI X... fait valoir que sa soeur et son frère sont établis en France et, qu'entrée en France alors qu'elle était encore mineure, elle n'a plus d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée, célibataire et sans enfant, arrivée en France alors qu'elle était âgée de plus de dix-sept ans, ne réside pas chez les personnes dont elle prétend qu'elles sont sa soeur et son frère et qu'il n'est pas établi qu'elle n'ait plus d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que, dès lors, l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants" ;
Considérant que, par la décision distincte précitée, le préfet des Yvelines a décidé que Mlle MBIMBI X... "sera reconduite à destination de tout pays dans lequel elle est légalement admissible" ; que cette décision, dans les termes où elle est rédigée, doit être regardée comme fixant la République démocratique du Congo, pays d'origine de la requérante ainsi qu'il a été dit ci-dessus, comme pays de destination ; qu'eu égard à son argumentation, l'intéressée doit être regardée comme ayant également présenté des conclusions tendant à l'annulation de cette décision ;
Considérant que Mlle MBIMBI X... soutient que son oncle a été arrêté par des soldats du gouvernement de son pays, qu'il est depuis lors porté disparu et qu'elle est également sans nouvelles, depuis mai 1997, de ses parents ; qu'elle produit, à l'appui de sa requête, une lettre datée du 23 novembre 1998, en provenance de ce pays ; qu'elle affirme, par ailleurs, faire partie de l'opposition au gouvernement de son pays et avoir participé à Paris à une manifestation organisée par celle-ci ; que toutefois, ses allégations quant aux risques personnels que comporterait pour elle son retour dans son pays ne sont pas assorties de justifications ni de précisions suffisantes ;
Considérant que si Mlle MBIMBI X... soutient qu'elle a déposé, dans le courant du mois de novembre 1998, une demande d'asile territorial, sans alléguer avoir à l'appui de cette demande, fourni d'élément nouveau relatif aux risques personnels qu'elle encourrait en cas de retour dans son pays d'origine, la réalité de cette demande n'est pas établie ; que dans ces conditions, l'intéressée ne peut être regardée comme s'étant trouvée, à la date d'intervention de l'arrêté de reconduite à la frontière, dans une situation qui aurait entaché cette décision d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle MBIMBI X... et la décision désignant le pays de destination auraient méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait être accueilli ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle MBIMBI X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation del'arrêté du 16 novembre 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : La requête de Mlle MBIMBI X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Philomène Y...
X..., au préfet des Yvelines et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 ss
Numéro d'arrêt : 203590
Date de la décision : 07/07/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 27 ter


Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 1999, n° 203590
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Stéfanini
Rapporteur public ?: M. Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:203590.19990707
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