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12/01/2000 | FRANCE | N°200761

France | France, Conseil d'État, 3 ss, 12 janvier 2000, 200761


Vu la requête présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 20 octobre 1998 ; le PREFET DE LA SEINE-MARITIME demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 1er octobre 1998 par lequel le conseiller délégué par le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 7 septembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Abdel X...
Z... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Abdel X...
Z... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention europ

éenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la lo...

Vu la requête présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 20 octobre 1998 ; le PREFET DE LA SEINE-MARITIME demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 1er octobre 1998 par lequel le conseiller délégué par le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 7 septembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Abdel X...
Z... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Abdel X...
Z... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. Abdel X...
Z...,
- les conclusions de M. Touvet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, le représentant de l'Etat dans le département peut "décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ; qu'il est constant que M. Z..., de nationalité marocaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 6 mars 1998, de la décision du PREFET DE LA SEINE-MARITIME du 20 février 1998 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas visé au I-3° de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si M. Z..., qui est célibataire et sans enfant, fait valoir qu'il est installé depuis longtemps en France où il a fait des études, et où il a, de ce fait, créé des liens personnels et amicaux, qu'il bénéficie actuellement d'une promesse d'embauche et qu'il n'a plus d'attache au Maroc, l'arrêté attaqué du 7 septembre 1998 par lequel le PREFET DE LA SEINE-MARITIME a décidé la reconduite à la frontière de M. Z... n'a pas, eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de l'intéressé, porté au droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté du 7 septembre 1998, ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressé, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Z... devant le tribunal administratif de Rouen ;
Considérant que la circonstance que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME a rejeté, par une décision du 21 août 1998, un recours gracieux, dépourvu d'effet suspensif, dirigé contre le refus de titre de séjour en date du 20 février 1998, ne faisait pas obstacle à l'intervention le 7 septembre 1998 d'une mesure de reconduite à la frontière ; que, de même, les dispositions du I-3° de l'article 22 précité de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de subordonner la légalité d'un arrêté de reconduite à la frontière à l'examen préalable d'une nouvelle demande de titre de séjour que l'étranger a pu présenter postérieurement à la notification du refus de délivrance de ce titre ; que, dès lors, la circonstance que l'intéressé a formulé, le 23 septembre 1998, une nouvelle demande de titre de séjour n'obligeait pas le PREFET DE LA SEINE-MARITIME à surseoir à l'édiction d'un arrêté de reconduite à la frontière jusqu'à ce qu'il ait statué sur cette nouvelle demande ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué concernant M. Z... a été signé par M. Y... Parent, secrétaire général de la préfecture de la Seine-Maritime, qui avait régulièrement reçu du PREFET DE LA SEINE-MARITIME délégation à cet effet ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cet arrêté doit être écarté ; que la circonstance que la copie de la décision ne porterait pas la signature de son auteur est sans influence sur sa légalité ;
Considérant que le moyen tiré de ce que la décision complémentaire fixant le pays àdestination duquel M. Z... devait être reconduit aurait été établie au moyen d'un modèle informatisé est sans incidence sur la régularité de l'arrêté attaqué ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté dont il s'agit, par lequel le PREFET DE LA SEINE-MARITIME a décidé la reconduite à la frontière de M. Z..., énonce de façon précise les circonstances qui justifient qu'il soit fait application à l'intéressé des dispositions du I-3° de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ; que, par suite, ledit arrêté est suffisamment motivé ;
Considérant qu'aux termes de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion, en application de l'article 23 : ... 3° L'étranger qui justifie par tous moyens résider en France habituellement depuis plus de quinze ans ainsi que l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" ; ... Les étrangers mentionnés aux 1° à 6° ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application de l'article 22 de la présente ordonnance ..." ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. Z... est entré pour la première fois en France en 1978, qu'il a quitté le territoire national en 1989 et qu'il est entré pour la dernière fois en France en 1991 ; qu'ainsi, M. Z... n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions précitées ;

Considérant que, d'une part, les possibilités de régularisation à titre exceptionnel de la situation de certaines catégories d'étrangers en situation irrégulière ouvertes par la circulaire ministérielle du 24 juin 1997 ne trouvent leur fondement ni dans les dispositions de l'ordonnance susmentionnée, ni dans aucune autre disposition législative ou réglementaire et que, dans ces conditions, ladite circulaire n'a pu conférer aux intéressés aucun droit au bénéfice des mesures gracieuses qu'elle prévoit ; que, d'autre part, si M. Z... prétend que sa situation relevait également de l'article 12 bis 3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée et que, par suite, le préfet ne pouvait lui opposer un refus de séjour sans consulter la commission du séjour des étrangers, le moyen tiré par lui du défaut de consultation de la commission ne peut qu'être écarté dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé n'entrait pas dans le champ d'application de cette disposition, faute de justifier d'une résidence habituelle en France depuis plus de quinze ans ; que, par suite, le refus de séjour contenu dans la décision du 20 février 1998 n'est pas susceptible d'être utilement contesté par la voie de l'exception à l'appui du recours dirigé contre l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. Z... ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté de reconduite à la frontière pris le 7 septembre 1998 à l'encontre de M. Z... ;
Article 1er : Le jugement du 1er octobre 1998 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rouen est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Z... devant le tribunal administratif de Rouen est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SEINE-MARITIME, à M. Abdel X...
Z... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 ss
Numéro d'arrêt : 200761
Date de la décision : 12/01/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 07 septembre 1998
Circulaire du 24 juin 1997


Publications
Proposition de citation : CE, 12 jan. 2000, n° 200761
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Burguburu
Rapporteur public ?: M. Touvet

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:200761.20000112
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