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09/02/2000 | FRANCE | N°157562

France | France, Conseil d'État, 09 février 2000, 157562


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril et 5 août 1994 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE (MACIF), dont le siège est Centre de gestion de Saint-Etienne, ZI Sud à Andrezieux Bouthéon (42160) ; la MACIF demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 25 janvier 1994, par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, à la demande du département des Bouches-du-Rhône, annulé un jugement du tr

ibunal administratif de Marseille en date du 14 juin 1991 condamnan...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril et 5 août 1994 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE (MACIF), dont le siège est Centre de gestion de Saint-Etienne, ZI Sud à Andrezieux Bouthéon (42160) ; la MACIF demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 25 janvier 1994, par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, à la demande du département des Bouches-du-Rhône, annulé un jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 14 juin 1991 condamnant ce département à lui verser une somme de 367 379,60 F et a rejeté pour irrecevabilité sa requête tendant à la condamnation de la ville de Marseille et du département des Bouches-du-Rhône à l'indemniser des sommes versées par elle aux victimes de l'accident de la circulation survenu le 13 août 1983 sur la bretelle de sortie de l'autoroute littorale de Marseille, à l'échangeur du Y... Janet, en raison d'un défaut d'entretien de la voie publique ;
2°) de condamner la partie adverse au versement d'une somme de 15 000 F en application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertésfondamentales ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, notamment son article 75-I ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 88-905 du 2 septembre 1988 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Thiellay, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boré, Xavier, avocat de la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE (MACIF), de la SCP Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, avocat du département des Bouches-du-Rhône et de la SCP Coutard, Mayer, avocat de la ville de Marseille,
- les conclusions de M. Salat-Baroux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un jugement en date du 14 juin 1991, le tribunal administratif de Marseille a déclaré le département des Bouches-du-Rhône responsable des conséquences dommageables de l'accident survenu le 13 août 1983 à MM. X... et Z... Giovanni et l'a condamné à indemniser la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE DU COMMERCE (MACIF) prise en sa qualité d'assureur subrogé dans les droits des victimes ; que, par un arrêt en date du 25 janvier 1994, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé sur ce point le jugement au motif, soulevé d'office, que le représentant du centre de gestion locale de la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE, qui avait introduit la demande de celle-ci devant le tribunal, n'avait pas justifié de sa qualité pour représenter cette société d'assurances ;
Mais considérant que la recevabilité de l'action introduite par le représentant local de la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE pour faire valoir les droits d'assureur subrogé de cette mutuelle n'était pas subordonnée à la production de pièces justifiant la qualité de ce représentant local à agir au nom de cette société ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué est entaché d'erreur de droit ;
Considérant, dès lors, que la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; qu'il y a lieu, en l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987 et de statuer au fond ;
Sur la régularité du jugement du tribunal administratif :
Considérant que, si le département des Bouches-du-Rhône soutient que l'Etat aurait dû être mis en cause en première instance du fait que sa responsabilité avait été invoquée par la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE, il ressort d'un mémoire présenté par cette dernière et enregistré le 7 juillet 1987 devant le tribunal administratif que la mutuelle entendait mettre en cause la responsabilité du département des Bouches-du-Rhône et non celle de l'Etat ; qu'il s'ensuit que le moyen doit être écarté ;
Considérant que le tribunal administratif a jugé que la circonstance que M. X... a engagé son véhicule dans le sens interdit de la voie où s'est produit l'accident était entièrement imputable à la configuration de l'ouvrage et à l'absence d'une signalisation appropriée ; qu'ainsi les premiers juges ont implicitement écarté toute faute de M. X... ; que, dès lors, le département des Bouches-du-Rhône n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif n'aurait pas répondu au moyen tiré de ce que M. X... aurait eu une part de responsabilité dans la survenance de l'accident ;
Sur la responsabilité :

Considérant que, le 13 août 1983, le véhicule conduit par M. X... s'est engagé dans le sens interdit sur la voie routière qui enjambe l'autoroute dite "du littoral" à proximité de l'échangeur dit "du cap Janet", dans l'agglomération de Marseille, et a heurté le véhicule conduit par M. Z... Giovanni qui arrivait en sens inverse ; qu'il résulte de l'instruction que c'est en raison de l'absence d'une signalisation appropriée que M. X... s'est engagé à contre sens sur la voie routière en question ; qu'en effet, si un panneau "sens interdit" était implanté sur l'un des côtés de la voie, ce panneau était masqué par la végétation et aucune autre signalisation n'indiquait l'interdiction d'emprunter cette voie ; que dans ces conditions, le département à qui incombait l'entretien de cette voie n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de son entretien normal ; qu'il résulte de l'instruction qu'aucune faute ne peut être reprochée à M. X... ni à M. Z... Giovanni ; qu'ainsi la responsabilité du département des Bouches-du-Rhône est engagée envers la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE, sans que ce département puisse s'exonérer de cette responsabilité en invoquant des fautes commises par la ville de Marseille dans l'exercice par celle-ci de ses compétences en matière de signalisation de la voie publique ; qu'il appartient seulement au département, s'il s'y croit fondé, d'exercer une action récursoire à l'encontre de la commune sur la base de fautes imputables à celle-ci et ayant concouru à la réalisation du dommage ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le département des Bouches-du-Rhône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accident survenu à M. X... ;
Sur le préjudice :
Considérant que la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE a justifié devant la cour administrative d'appel avoir versé, après que le tribunal administratif a statué, une somme supplémentaire de 418 604 F à Mme Brigitte X... en réparation des dommages qu'elle a subis du fait de l'accident ; qu'en revanche, le surplus de ses conclusions n'est accompagné d'aucune justification ; qu'il y a lieu, dès lors, de porter la somme que le département a été condamné à verser à la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE de 367 379,60 F à 785 983,60 F ;
Sur les conclusions présentées devant la cour par la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire :
Considérant que les conclusions présentées devant la cour par la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire sont nouvelles en appel et sont, par suite, irrecevables ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la MACIF, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser au département des Bouches-du-Rhône la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant que les conclusions par lesquelles la MACIF demande le remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ne désignent pas la partie contre laquelle elles sont dirigées ; qu'il s'ensuit que ces conclusions doivent être rejetées ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 25 janvier 1994 est annulé.
Article 2 : Le montant de l'indemnité que l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Marseille du 14 juin 1991 a condamné le département des Bouches-du-Rhône à verser à la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE est porté à 785 983,60 F.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel du département des Bouches-du-Rhône est rejeté.
Article 4 : Les conclusions présentées devant la cour administrative d'appel par le département des Bouches-du-Rhône et par la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire sont rejetées.
Article 5 : Les conclusions de la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE et du département des Bouches-du-Rhône tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE, au département des Bouches-du-Rhône, à la ville de Marseille et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 157562
Date de la décision : 09/02/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FONDEMENT DE LA RESPONSABILITE - RESPONSABILITE SANS FAUTE - RESPONSABILITE ENCOURUE DU FAIT DE L'EXECUTION - DE L'EXISTENCE OU DU FONCTIONNEMENT DE TRAVAUX OU D'OUVRAGES PUBLICS.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - PROBLEMES D'IMPUTABILITE - PERSONNES RESPONSABLES - ETAT OU AUTRES COLLECTIVITES PUBLIQUES - ETAT OU DEPARTEMENT.

VOIRIE - REGIME JURIDIQUE DE LA VOIRIE - ENTRETIEN DE LA VOIRIE - CHEMINS DEPARTEMENTAUX.


Références :

Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 09 fév. 2000, n° 157562
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Thiellay
Rapporteur public ?: M. Salat-Baroux

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:157562.20000209
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