Vu la requête, enregistrée le 24 février 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Gilles X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 98-1181 du 23 décembre 1998 portant revalorisation du revenu minimum d'insertion ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ouvert à la signature à New York le 19 décembre 1966 ;
Vu la charte sociale européenne du 18 octobre 1961 ;
Vu le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ;
Vu la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 modifiée ;
Vu le décret n° 88-1111 du 12 décembre 1988 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de la Ménardière, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la loi du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion énonce dans son article 1er que : "Toute personne qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation de l'économie ou de l'emploi se trouve dans l'impossibilité de travailler, a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence. Dans ce but, il est institué un revenu minimum d'insertion ( ...). Ce revenu minimum d'insertion constitue l'un des éléments d'un dispositif global de lutte contre la pauvreté ..." et dans son article 3 que : "Le revenu minimum d'insertion varie dans des conditions fixées par voie réglementaire selon la composition du foyer et le nombre de personnes à charge. Son montant est fixé par décret et révisé deux fois par an en fonction de l'évolution des prix." ; qu'en application de ces dispositions, le décret attaqué a fixé à 2 502,30 F, au 1er janvier 1999, le montant mensuel du revenu minimum d'insertion pour un allocataire ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X..., ce montant n' a pas été déterminé en prenant pour base l'évolution du salaire minimum interprofessionnel de croissance ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret aurait été pris en méconnaissance des critères de révision prévus par l'article 3 de la loi du 1er décembre 1988 ne peut qu'être écarté ;
Considérant que le décret attaqué ne constitue pas une mesure d'application des précédents décrets ayant revalorisé le revenu minimum d'insertion ; que l'exception d'illégalité soulevée à l'encontre de ces décrets n'est donc pas recevable ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11-1 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels : " Les Etats parties au présent pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu'une amélioration constante de leurs conditions d'existence. Les Etats parties prendront des mesures appropriées pour assurer la réalisation de ce droit et ils reconnaissant à cet effet l'importance d'une coopération internationale librement consentie." ; que ces stipulations qui ne produisent pas d'effet direct à l'égard des particuliers, ne peuvent être utilement invoquées à l'appui de conclusions tendant à l'annulation d'une décision individuelle ou réglementaire ; que le moyen tiré de ce que la France aurait méconnu les engagements souscrits lors de la signature de la charte sociale européenne n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant que le revenu minimum d'insertion est l'un des éléments du dispositif d'aide sociale aux personnes démunies de ressources ; que, compte tenu des autres aides susceptibles d'être apportées, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en fixant à 2 502,30 F le montant mensuel, le gouvernement aurait méconnu les dispositions du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel se réfère le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958, selon lesquelles "tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler, a le droit d'obtenir des moyens convenables d'existence", ou commis une erreur manifeste d'appréciation ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Gilles X..., au Premier ministre et au ministre de l'emploi et de la solidarité.