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17/05/2000 | FRANCE | N°203231

France | France, Conseil d'État, 5 ss, 17 mai 2000, 203231


Vu la requête, enregistrée le 4 janvier 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 13 novembre 1998 en tant que, par ledit jugement, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté préfectoral du 28 octobre 1998 décidant la reconduite à la frontière de Mme Khaddouj X... et renvoyé en formation collégiale les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-2 du code des tribunaux a

dministratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autre...

Vu la requête, enregistrée le 4 janvier 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 13 novembre 1998 en tant que, par ledit jugement, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté préfectoral du 28 octobre 1998 décidant la reconduite à la frontière de Mme Khaddouj X... et renvoyé en formation collégiale les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Le Bihan-Graf, Auditeur,
- les conclusions de M. Salat-Baroux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ... 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant que si Mme Khaddouj X..., de nationalité marocaine, entrée en France le 23 septembre 1990, a épousé le 4 octobre 1997 un ressortissant tunisien résidant régulièrement en France, il ressort des pièces du dossier, qu'eu égard notamment à la durée et aux conditions du séjour en France de l'intéressée et à la possibilité qui est ouverte à son conjoint de présenter une demande tendant au bénéfice du regroupement familial, l'arrêté du PREFET DU VAL-D'OISE en date du 28 octobre 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière n'a pas porté au droit de Mme X... au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que pour annuler ledit arrêté, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur le motif qu'il aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Considérant que l'arrêté portant reconduite à la frontière de Mme X... qui énonce les considérations de droit et de fait qui lui servent de fondement, est suffisamment motivé ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ...7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus" ;

Considérant que pour contester, par la voie de l'exception d'illégalité, la décision du PREFET DU VAL-D'OISE refusant de lui attribuer un titre de séjour, Mme X... soutient que cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que cependant, comme il a été dit ci-dessus, eu égard à la faculté légalement offerte à son conjoint de déposer une demande de regroupement familial, cette décision n'a, en tout état de cause, méconnu ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté contesté serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure de reconduite surla situation personnelle de l'intéressée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a annulé son arrêté du 28 octobre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X..., et le rejet des conclusions de la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Versailles et, tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions de Mme X... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 13 novembre 1998 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté du 28 octobre 1998 par lequel le PREFET DU VAL-D'OISE a ordonné la reconduite à la frontière de Mme X....
Article 2 : Les conclusions présentées par Mme X... devant le tribunal administratif de Versailles et tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 1998 sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de Mme X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-D'OISE, à Mme Khaddouj X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5 ss
Numéro d'arrêt : 203231
Date de la décision : 17/05/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 28 octobre 1998
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 12 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 17 mai. 2000, n° 203231
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Le Bihan-Graf
Rapporteur public ?: M. Salat-Baroux

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:203231.20000517
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