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24/05/2000 | FRANCE | N°202503

France | France, Conseil d'État, 24 mai 2000, 202503


Vu 1°), sous le n° 202503, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 9 décembre 1998 et 8 avril 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT NATIONAL DES ANESTHESIOLOGISTES-REANIMATEURS FRANCAIS dont le siège est ..., représenté par son président en exercice ; le SYNDICAT NATIONAL DES ANESTHESIOLOGISTES-REANIMATEURS FRANCAIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 98-900 du 9 octobre 1998 relatif aux conditions techniques de fonctionnement auxquelles doivent satisfaire les éta

blissements de santé pour être autorisés à pratiquer les activités d'...

Vu 1°), sous le n° 202503, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 9 décembre 1998 et 8 avril 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT NATIONAL DES ANESTHESIOLOGISTES-REANIMATEURS FRANCAIS dont le siège est ..., représenté par son président en exercice ; le SYNDICAT NATIONAL DES ANESTHESIOLOGISTES-REANIMATEURS FRANCAIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 98-900 du 9 octobre 1998 relatif aux conditions techniques de fonctionnement auxquelles doivent satisfaire les établissements de santé pour être autorisés à pratiquer les activités d'obstétrique, de néonatologie ou de réanimation néonatale et modifiant le code de la santé publique ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu 2°), sous le n° 202507, la requête enregistrée le 9 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'ASSOCIATION NATIONALE DES PUERICULTRICES DIPLOMEES D'ETAT dont le siège est ..., représentée par sa présidente en exercice ; l'ASSOCIATION NATIONALE DES PUERICULTRICES DIPLOMEES D'ETAT demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret n° 98-900 du 9 octobre 1998 relatif aux conditions techniques de fonctionnement auxquelles doivent satisfaire les établissements de santé pour être autorisés à pratiquer les activités d'obstétrique, de néonatologie ou de réanimation néonatale et modifiant le code de la santé publique ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 47-1544 du 13 août 1947 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Donnat, Auditeur,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du SYNDICAT NATIONAL DES ANESTHESIOLOGISTES-REANIMATEURS FRANCAIS et de Me Delvolvé, avocat de l'ASSOCIATION NATIONALE DES PUERICULTRICES DIPLOMEES D'ETAT,
- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête n° 202503 du SYNDICAT NATIONAL DES ANESTHESIOLOGISTES-REANIMATEURS FRANCAIS et la requête n° 202507 de l'ASSOCIATION NATIONALE DES PUERICULTRICES DIPLOMEES D'ETAT sont dirigées contre le décret n° 98-900 du 9 octobre 1998 relatif aux conditions techniques de fonctionnement auxquelles doivent satisfaire les établissements de santé pour être autorisés à pratiquer les activités d'obstétrique, de néonatologie ou de réanimation néonatale ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la légalité externe :
Considérant qu'en vertu de l'article L. 200-3 du code de la sécurité sociale, les conseils d'administration de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés, de la caisse nationale des allocations familiales et de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale ainsi que la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles "sont saisis, pour avis et dans le cadre de leurs compétences respectives, de tout projet de mesure législative ou réglementaire ayant des incidences sur l'équilibrefinancier de la branche ou entrant dans leur domaine de compétence" ;
Considérant que le décret attaqué, qui a pour objet le renforcement des normes techniques, notamment en matière d'emploi des personnels, auxquelles doivent satisfaire certains établissements de santé, ne comprend aucune disposition réglementaire entrant dans le domaine de compétence de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et n'a qu'une incidence indirecte sur l'équilibre financier de la branche de l'assurance maladie ; que, par suite, il a pu légalement intervenir sans consultation préalable du conseil d'administration de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés ;

Considérant qu'en vertu de l'article R. 712-19 du code de la santé publique, la section sanitaire du comité national de l'organisation sanitaire et sociale comprend en particulier quatre représentants des organisations d'hospitalisation les plus représentatives, quatre représentants des organisations d'hospitalisation privée les plus représentatives, quatre représentants des syndicats médicaux les plus représentatifs, deux représentants des organisations syndicales les plus représentatives des personnels hospitaliers non médicaux ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de la séance du 19 mars 1998 au cours de laquelle le comité national de l'organisation sanitaire et sociale (section sanitaire) a examiné le projet de décret, que tous ses membres ont été régulièrement convoqués à cette séance ; que le projet dont le comité a été saisi comportait notamment les dispositions critiquées relatives à la présence éventuelle au sein des unités d'obstétrique, de néonatologie et de réanimation néonatale, d'infirmiers diplômés d'Etat non spécialisés en puériculture ; qu'ainsi, le comité national de l'organisation sanitaire et sociale a été mis à même de se prononcer sur les questions susceptibles d'être soulevées par ces dispositions ; qu'il résulte de ce qui précède que l'ASSOCIATION NATIONALE DES PUERICULTRICES DIPLOMEES D'ETAT n'est pas fondée à soutenir que la consultation du comité national de l'organisation sanitaire et sociale a été irrégulière ;
Considérant qu'aucun texte n'exigeait que l'association requérante fût consultée sur le projet de décret ;
Sur la légalité interne :
En ce qui concerne l'article D. 712-84 inséré dans le code de la santé publique par le décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article D. 712-84 : "Le personnel intervenant dans le secteur de naissance ne peut être inférieur à tout instant aux effectifs suivants : ( ...) 2° En ce qui concerne les médecins : Quel que soit le nombre de naissances constatées dans un établissement de santé, celui-ci doit organiser la continuité obstétricale et chirurgicale des soins tous les jours de l'année, 24 heures sur 24, dans l'unité d'obstétrique. Cette continuité est assurée : soit par un gynécologue-obstétricien ayant la qualification chirurgicale ; soit lorsque l'établissement ne peut disposer que d'un praticien ayant seulement une compétence obstétricale, à la fois par cet obstétricien et par un praticien de chirurgie générale ou viscérale de l'établissement./ A cet effet, pour les unités réalisant moins de 1 500 naissances par an, la présence des médecins spécialistes est assurée par : ( ...) un anesthésiste-réanimateur sur place ou d'astreinte opérationnelle permanente et exclusive pour le site dont le délai d'arrivée est compatible avec l'impératif de sécurité ; ( ...)/ Pour les unités réalisant plus de 1 500 naissances par an, la présence médicale est assurée par : un anesthésiste-réanimateur présent tous les jours de l'année, 24 heures sur 24, dans l'établissement de santé, sur le même site, en mesure d'intervenir dans l'unité d'obstétrique dans des délais compatibles avec l'impératif de sécurité ; si l'unité réalise plus de 2 000 naissances par an, l'anesthésiste-réanimateur est présent tous les jours de l'année, 24 heures sur 24, dans l'unité d'obstétrique : ( ...)" ;

Considérant que les obligations résultant pour les médecins anesthésistes-réanimateurs des dispositions précitées du décret attaqué, qui n'ont pas par elles-mêmes pour objet de fixer les conditions de travail de chaque anesthésiste-réanimateur, ne peuvent être regardées comme imposant à cette catégorie de praticiens un travail forcé ou obligaoire au sens des stipulations de l'article 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut qu'être écarté ;
Considérant que la différence de traitement entre médecins hospitaliers et médecins exerçant à titre libéral dans les établissements de santé privés au regard des conditions de rémunération desdites obligations ne résulte pas directement des dispositions précitées du décret du 9 octobre 1998 ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que ces dispositions méconnaîtraient le principe d'égalité doit être écarté ;
En ce qui concerne les articles D. 712-88, D. 712-96 et D. 712-101 insérés dans le code de la santé publique par le décret attaqué :
Considérant que l'article D. 712-88 du code de la santé publique prévoit notamment que, dans le cas où les enfants nés dans l'unité d'obstétrique sont atteints d'affections sans gravité ne nécessitant pas une hospitalisation en unité de néonatologie, "au minimum, une sage-femme ou un infirmier diplômé d'Etat, spécialisé en puériculture ou expérimenté en néonatologie, est présent tous les jours de l'année, 24 heures sur 24, auprès des enfants ( ...)" ; que l'article D. 712-96 impose notamment, dans toute unité de néonatologie ne pratiquant pas des soins intensifs de néonatologie, "la présence continue d'au moins un infirmier diplômé d'Etat, spécialisé en puériculture ou expérimenté en néonatologie, pour six nouveaux-nés" et, dans toute unité de néonatologie qui pratique des soins intensifs, "la présence continue d'un infirmier diplômé d'Etat, spécialisé en puériculture ou expérimenté en néonatologie, pour trois nouveaux-nés" ; qu'enfin, l'article D. 712-101 impose dans toute unité de réanimation néonatale notamment "la présence permanente tous les jours de l'année 24 heures sur 24, d'au moins un infirmier diplômé d'Etat , spécialisé en puériculture ou expérimenté en néonatologie, pour deux nouveaux-nés hospitalisés en réanimation néonatale et pour trois nouveaux-nés hospitalisés en soins intensifs de néonatologie" ;
Considérant que ni le décret du 13 août 1947 instituant un diplôme d'Etat de puéricultrice, ni aucun autre texte ne donne une compétence exclusive aux infirmiers titulaires du diplôme d'Etat dans la spécialité de puériculture pour exercer les fonctions d'infirmier au sein des unités d'obstétrique, de néonatologie ou de réanimation néonatale ; qu'ainsi, en exigeant la présence dans ces unités, indifféremment d'un infirmier diplômé d'Etat spécialisé en puériculture ou d'un infirmier diplômé d'Etat expérimenté en néonatologie, les auteurs du décret attaqué n'ont pas entaché leur décision d'erreur de droit ; qu'ils n'ont pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il appartient au chef de service responsable de l'unité d'obstétrique, de néonatologie ou de réanimation néonatale d'apprécier si l'expérience acquise en néonatologie par un infirmier diplômé d'Etat est de nature à lui permettre d'exercer ses fonctions dans ces unités ; que le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait entaché d'illégalité faute de fixer les critères permettant de définir ce qu'il faut entendre par "infirmier diplômé d'Etat expérimenté en néonatalogie" doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le SYNDICAT NATIONAL DES ANESTHESIOLOGISTES-REANIMATEURS FRANCAIS et l'ASSOCIATION NATIONALE DES PUERICULTRICES DIPLOMEES D'ETAT ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret du 9 octobre 1998 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans les présentes instances la partie perdante, soit condamné à payer au SYNDICAT NATIONAL DES ANESTHESIOLOGISTES-REANIMATEURS FRANCAIS et à l'ASSOCIATION NATIONALE DES PUERICULTRICES DIPLOMEES D'ETAT les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes du SYNDICAT NATIONAL DES ANESTHESIOLOGISTES-REANIMATEURS FRANCAIS et de l'ASSOCIATION NATIONALE DES PUERICULTRICES DIPLOMEES D'ETAT sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT NATIONAL DES ANESTHIOSIOLOGISTES-REANIMATEURS FRANCAIS, à l'ASSOCIATION NATIONALE DES PUERICULTRICES DIPLOMEES D'ETAT et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 202503
Date de la décision : 24/05/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

61-01-01 SANTE PUBLIQUE - PROTECTION GENERALE DE LA SANTE PUBLIQUE - POLICE ET REGLEMENTATION SANITAIRE.


Références :

Code de la santé publique R712-19, D712-84, D712-88, D712-96, D712-101
Code de la sécurité sociale L200-3
Décret 47-1544 du 13 août 1947
Décret 98-900 du 09 octobre 1998 décision attaquée confirmation
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 24 mai. 2000, n° 202503
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Donnat
Rapporteur public ?: Mlle Fombeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:202503.20000524
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