La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/07/2000 | FRANCE | N°214759

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 28 juillet 2000, 214759


Vu 1°), sous le n° 214759, la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 25 novembre 1999 présentée par le PREFET DE POLICE ; le préfet demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 octobre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Laroussi X...
Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu

2°), sous le n° 215922, la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du ...

Vu 1°), sous le n° 214759, la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 25 novembre 1999 présentée par le PREFET DE POLICE ; le préfet demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 octobre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Laroussi X...
Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu 2°), sous le n° 215922, la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 31 décembre 1999 présentée pour M. Laroussi X...
Y..., demeurant ... ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) de rejeter le recours introduit par le préfet de police de Paris en annulation du jugement du tribunal administratif de Paris en date du 6 octobre 1999 annulant l'arrêté en date du 9 novembre 1998 par lequel ledit préfet a ordonné la reconduite à la frontière de M. Y... ;
2°) de condamner l'Etat aux dépens ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le PREFET DE POLICE demande, par requête enregistrée sous le n° 214759, l'annulation du jugement du 6 octobre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Laroussi X...
Y... ainsi que le rejet de la demande présentée par ce dernier devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant que la pièce enregistrée sous le n° 215922 constitue en réalité un mémoire en défense présenté pour M. Y... et faisant suite à la requête du PREFET DE POLICE enregistrée sous le n° 214759 ; que, par suite, ce document doit être rayé des registres du secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat et être joint à la requête enregistrée sous le n° 214759 ;
Considérant que, devant le tribunal administratif, M. Y... n'a pas présenté, pour contester la légalité de l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière de moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce moyen, qui n'était pas au nombre des moyens pouvant être relevés d'office, pour annuler l'arrêté du 9 novembre 1998 décidant la reconduite à la frontière de M. Y... ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur la demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par M. Y... et tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 novembre 1998 ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3°) si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titrede séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y..., de nationalité tunisienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 2 juillet 1998, de la décision du 25 juin 1998 du PREFET DE POLICE lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider de la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sur l'exception d'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour :

Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. Y... excipe de l'illégalité de la décision du 25 juin 1998 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il s'est pourvu dans le délai de recours administratif contre cette dernière décision qui n'était ainsi pas devenue définitive à la date à laquelle il a saisi le tribunal administratif ; que, dès lors l'exception d'illégalité est recevable ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 susvisé : "Sauf urgence ou circonstances exceptionnelles, sous réserve des nécessités de l'ordre public et de la conduite des relations internationales et exception faite des cas où il est statué sur une demande présentée par l'intéressé lui-même les décisions qui doivent être motivées ... ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé eut été mis à même de présenter des observations écrites" ; que, dès lors que la demande d'autorisation de séjour émanait de M. Y... lui-même, le PREFET DE POLICE n'était pas tenu d'entendre ce dernier ; que, par suite, le moyen fondé par la violation des dispositions précitées ne peut qu'être rejeté ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, si M. Y... justifie être entré une première fois en France le 13 juin 1987, il n'établit pas y avoir résidé habituellement entre 1987 et 1992 ; qu'ainsi il n'entrait pas dans le champ d'application de l'article 12 bis 3°) de l'ordonnance du 2 novembre 1945 qui ouvre droit à la délivrance d'une carte de séjour temporaire "à l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ..." ;
Considérant qu'aux termes de l'article 10 de l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 : "Un titre de séjour d'une durée de dix ans est délivré de plein droit ... f) au ressortissant tunisien qui justifie par tous moyens avoir sa résidence habituelle en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans, ou en situation régulière depuis plus de dix ans ..." ; que M. Y..., entré en France une première fois en 1987 à l'âge de 23 ans, et dont le séjour est irrégulier depuis 1992, n'est pas fondé à se prévaloir de cette stipulation ;
Sur les autres moyens :
Considérant que la circonstance que M. Y... avait introduit un recours administratif contre la décision de refus de séjour en date du 25 juin 1998 ne faisait pas obstacle à ce que le PREFET DE POLICE prît l'arrêté attaqué ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressé ;
Considérant que si M. Y... fait valoir l'ancienneté de sa présence en France et le fait qu'il y a exercé des activités professionnelles, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions de séjour du requérant en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté duPREFET DE POLICE en date du 9 novembre 1998 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. Y... contre l'arrêté du 9 novembre 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière doivent être rejetées ;
Article 1er : Les productions enregistrées sous le n° 215922 seront rayées du registre du secrétariat du Conseil d'etat pour être jointes à la requête enregistrée sous le n° 214759.
Article 2 : Le jugement du 6 octobre 1999 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 3 : La demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Laroussi X...
Y... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 214759
Date de la décision : 28/07/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 25 juin 1998
Arrêté du 09 novembre 1998
Décret 83-955 du 28 novembre 1983 art. 8, art. 12 bis
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2000, n° 214759
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. de Longevialle
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:214759.20000728
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award