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20/11/2000 | FRANCE | N°219405

France | France, Conseil d'État, 9 ss, 20 novembre 2000, 219405


Vu la requête, enregistrée le 27 mars 2000 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 26 janvier 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 1er décembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y... Maria Silva Z... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Silva Z... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;<

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Vu la requête, enregistrée le 27 mars 2000 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 26 janvier 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 1er décembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y... Maria Silva Z... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Silva Z... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mahé, Auditeur,
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Silva Z..., ressortissante du Cap-Vert, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 20 juin 1998, de la décision du 17 juin 1998 par laquelle le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, Mme Silva Z... a fait valoir qu'elle vit en concubinage avec un ressortissant du Cap-Vert, titulaire d'une carte de résident, dont elle a eu une fille née le 12 octobre 1997 ; que, dans ces circonstances et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, cet arrêté n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté susvisé du 1er décembre 1998, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme Silva Z... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant que le moyen tiré de ce que Mme Silva Z... ne se serait pas vue remettre l'original de l'arrêté susvisé du 1er décembre 1998, mais une ampliation, est inopérant ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, cette ampliation n'était pas simplement revêtue d'un cachet humide avec la mention "Le Préfet - pour le Préfet, Le Secrétaire Général - Jean-Jacques X...", mais portait la signature manuscrite de M. X..., secrétaire général de la préfecture des Hauts-de-Seine ; qu'en vertu d'un arrêté du 13 novembre 1995, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, M. X... avait délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que l'article 22 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 ne fait pas obstacle à une telle délégation ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté susvisé du 1er décembre 1998 aurait été signé par une autorité incompétente manque en fait ;

Considérant que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Silva Z... énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est, par suite suffisamment motivé ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l'administration et les usagers : "Sauf urgence ou circonstances exceptionnelles, sous réserve des nécessités de l'ordre public et de la conduite des relations internationales, et exception faite du cas où il est statué sur une demande présentée par l'intéressé lui-même, les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé ait été mis à même de présenter ses observations écrites" ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, relatives à la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, et notamment des articles 22 et 22 bis qui ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ce recours et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite à la frontière et, par suite, exclure l'application des dispositions précitées de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 dont Mme Silva Z... ne peut utilement se prévaloir ;
Considérant que Mme Silva Z... expose qu'elle a introduit le 4 novembre 1998 devant le tribunal administratif de Paris un recours contre la décision du 17 juin 1998 lui refusant un titre de séjour ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, il ressort des pièces du dossier que la lettre de notification de cette décision, qui lui est parvenue le 20 juin 1998, comportait l'indication du délai de deux mois dans lequel un recours administratif ou juridictionnel pouvait être formé ; que cette décision, qu'elle n'a pas contestée dans le délai du recours contentieux, était donc devenue définitive à la date à laquelle elle a demandé l'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, soit le 9 décembre 1998 ; qu'elle n'est, dès lors, pas recevable à exciper de son illégalité ;
Considérant que la circulaire du 24 juin 1997 du ministre de l'intérieur est dépourvue de caractère réglementaire ; que, par suite, et en tout état de cause, Mme Silva Z... ne saurait utilement s'en prévaloir ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à demander l'annulation du jugement du 26 janvier 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 1er décembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Silva Z... ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à Mme Silva Z... la somme de 1 000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 26 janvier 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par Mme Silva Z... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE, à Mme Y... Maria Silva Z... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 9 ss
Numéro d'arrêt : 219405
Date de la décision : 20/11/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 13 novembre 1995
Arrêté du 01 décembre 1998
Circulaire du 24 juin 1997
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 8
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 22 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 20 nov. 2000, n° 219405
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Mahé
Rapporteur public ?: M. Courtial

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:219405.20001120
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