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30/03/2001 | FRANCE | N°216974

France | France, Conseil d'État, 30 mars 2001, 216974


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er février et 2 juin 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE, dont le siège est ... ; la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre de l'emploi et de la solidarité sur sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil d'administration de la

caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er février et 2 juin 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE, dont le siège est ... ; la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre de l'emploi et de la solidarité sur sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés en date du 1er décembre 1999 relative au référencement de contrats d'assurance maladie complémentaire ;
2°) l'annulation de cette délibération ;
3°) la condamnation de la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés à lui payer la somme de 24 120 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité instituant la Communauté européenne ;
Vu le code de la sécurité sociale
Vu le code de commerce ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Boulouis, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE et de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés (CANAM),
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés et le ministre de l'emploi et de la solidarité :
Considérant que la fédération requérante demande l'annulation de la délibération du 1er décembre 1999 par laquelle le conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariésa décidé du principe et des principales modalités d'un dispositif consistant à subordonner l'aide financière que les caisses mutuelles régionales de ce régime décideraient d'apporter, dans le cadre de leur action sanitaire et sociale, à leurs ressortissants désireux de souscrire un contrat d'assurance maladie complémentaire et disposant de faibles ressources, au choix des seuls organismes proposant de tels contrats sélectionnés par lui au regard d'une charte de référence ainsi que la décision implicite par laquelle les ministres de tutelle ont approuvé cette délibération ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
Considérant que la délibération contestée n'entre pas dans le champ de l'article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale qui est relatif aux actions expérimentales menées dans le domaine médical ou médico-social ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la procédure prévue à cet article n'aurait pas été respectée est inopérant ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 611-4 du code de la sécurité sociale : "La caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés est chargée ( ...), d'animer, de coordonner et de contrôler l'action des caisses mutuelles régionales ( ...) ainsi que d'exercer des actions d'intérêt général en matière d'action sanitaire et sociale et de promouvoir une action de prévention, d'éducation et d'information sanitaires" ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article R. 613-6 du même code : "( ...) Un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget fixe les orientations générales de l'action sanitaire et sociale des caisses du régime d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles" ; que l'article 2 de l'arrêté du 9 mai 1986 relatif aux orientations générales de l'action sanitaire et sociale des caisses de ce régime d'assurance maladie dispose que : "Les caisses mutuelles régionales affectent par priorité les ressources de leurs fonds d'action sanitaire et sociale au financement d'actions individuelles, et notamment pour prendre en charge des cotisations" ;

Considérant que la délibération contestée n'a ni pour objet, ni pour effet de restreindre les compétences en matière d'action sanitaire et sociale des caisses mutuelles régionales qui ne sont pas tenues de prendre en charge à ce titre les cotisations à une assurance maladie complémentaire ; qu'elle n'entre pas davantage dans le champ réservé au contrat d'objectifs et de gestion que doit conclure la caisse nationale avec l'Etat en application de l'article L. 611-6-1 du code de la sécurité sociale ; qu'elle vise seulement à coordonner, par la définition d'un cadre de référence, l'action de celles de ces caisses qui décideraient, comme elles peuvent le faire, de prendre en charge des cotisations à une assurance complémentaire ; que, dès lors, les moyens tirés de ce que la délibération serait entachée d'incompétence et méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article 2 de l'arrêté du 9 mai 1986 doivent être écartés ;
Considérant qu'aux termes de l'article 86 du traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté européenne, devenu l'article 82 (CE) : "Est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où le commerce entre Etats membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ou sur une partie substantielle de celui-ci" ; qu'en vertu de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, devenu l'article L. 420-2 du code de commerce, est prohibée "l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci" ;
Considérant, en premier lieu, que la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés, qui gère un régime d'assurance maladie obligatoire et ne gère, directement ou indirectement, aucun régime d'assurance maladie complémentaire, n'est pas une entreprise au sens des stipulations ou dispositions précitées ; qu'en second lieu, la délibération attaquée n'a pas pour effet de mettre les organismes de protection complémentaire habilités par la caisse nationale en situation d'abuser de leur position dominante, à supposer qu'elle existe, sur le marché de l'assurance maladie complémentaire ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 86 du traité du 25 mars 1957 et de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 doivent être écartés ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE n'est pas fondée à demander l'annulation de la délibération du 1er décembre 1999 du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés ainsi que de la décision implicite par laquelle le ministre de l'emploi et de la solidarité a rejeté la demande tendant à ce qu'il exerce sur cette délibération son droit d'opposition ;
Sur les conclusions de la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés et de la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE à payer à la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés la somme de 17 940 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE la somme qu'elle demande au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;
Article 1er : La requête de la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE est rejetée.
Article 2 : La FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE versera à la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés la somme de 17 940 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE, à la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 216974
Date de la décision : 30/03/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

62-01-02 SECURITE SOCIALE - ORGANISATION DE LA SECURITE SOCIALE - REGIMES DE NON-SALARIES


Références :

Arrêté du 09 mai 1986 art. 2, art. 82
Code de commerce L420-2
Code de justice administrative L761-1
Code de la sécurité sociale L162-31-1, L611-4, R613-6, L611-6-1
Ordonnance 86-1243 du 01 décembre 1986 art. 8


Publications
Proposition de citation : CE, 30 mar. 2001, n° 216974
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Boulouis
Rapporteur public ?: Mme Boissard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:216974.20010330
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