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04/05/2001 | FRANCE | N°223760

France | France, Conseil d'État, 9 ss, 04 mai 2001, 223760


Vu la requête, enregistrée le 2 août 2000 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 31 mars 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Taramatee Y... épouse Z... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention euro

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Vu la requête, enregistrée le 2 août 2000 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 31 mars 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Taramatee Y... épouse Z... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Mahé, auditeur,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y..., de nationalité mauricienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 27 mai 1998, de l'arrêté du 25 mai 1998 par lequel le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si Mme Y... fait valoir qu'elle réside en France depuis près de dix ans, que sa tante est de nationalité française et qu'elle a épousé un ressortissant français en novembre 1992, il ressort des pièces du dossier que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de l'interruption dès 1993 de sa vie commune avec son mari et de l'instance de divorce en cours, que l'arrêté du 31 mars 1999 du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ; que cet arrêté n'a pas davantage porté au droit de Mme Y... au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif s'est fondé sur ces motifs pour en prononcer l'annulation ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme Y... devant le tribunal administratif de Paris et devant le Conseil d'Etat ;
Considérant que M. Jean-Jacques X..., secrétaire général de la préfecture des Hauts-de-Seine, qui a signé la décision attaquée reconduisant Mme Y... à la frontière, bénéficiait d'une délégation de signature du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE en date du 15 avril 1996 régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture le 1er mai 1996 ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cette décision doit être écarté ;
Considérant que l'arrêté attaqué énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;

Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que, lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ... 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ..." ; que si Mme Y... fait valoir qu'elle n'a jamais quitté le territoire français depuis 1990, elle ne justifiait pas, à la date du 31 mars 1999 à laquelle a été pris l'arrêté contesté, d'un séjour habituel d'au moins dix ans ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ne pouvait légalement prendre à son encontre à cette date l'arrêté attaqué sans méconnaître les dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance précitée ne peut qu'être écarté ;
Considérant que la circonstance que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a, postérieurement à l'annulation de son arrêté du 31 mars 1999 par le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris, délivré à Mme Y... une autorisation de séjour provisoire du 5 septembre au 4 décembre 2000 n'a pas eu pour effet de rendre le présent litige sans objet ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à demander l'annulation du jugement du 19 mai 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 31 mars 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y... ;
Article 1er : Le jugement du 19 mai 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme Y... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE, à Mme Taramatee Y... épouse Z... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 9 ss
Numéro d'arrêt : 223760
Date de la décision : 04/05/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 25 mai 1998
Arrêté du 31 mars 1999
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 04 mai. 2001, n° 223760
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Mahé
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:223760.20010504
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