Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2000 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 juin 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 17 février 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Abdellah X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Mahé, auditeur,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité marocaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 31 décembre 1998, de la décision du 28 décembre 1998 par laquelle le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée ... : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ... 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ..." ;
Considérant que si M. X... soutient être entré en France pour la première fois en 1983, il n'établit pas qu'il y séjournait habituellement depuis plus de dix ans le 28 décembre 1998, date de la décision par laquelle le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le refus de séjour qui lui a été opposé méconnaîtrait les dispositions du 3° de l'article 12 bis précité de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et que l'arrêté de reconduite à la frontière pris sur ce fondement serait lui-même, par voie de conséquence, illégal ; que c'est donc à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a prononcé l'annulation de cet arrêté en se fondant sur ce motif ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X... fait valoir qu'il n'a plus aucune attache avec son pays d'origine et qu'il vit chez son frère, résident en situation régulière ; que ces circonstances ne permettent pas de regarder l'arrêté attaqué comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 28 juin 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 17 février 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Article 1er : Le jugement du 28 juin 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par M. X... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Abdellah X... et au ministre de l'intérieur.