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16/05/2001 | FRANCE | N°224147

France | France, Conseil d'État, 3 ss, 16 mai 2001, 224147


Vu la requête, enregistrée le 11 août 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFECTURE DU DEPARTEMENT DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 24 mars 2000 par lequel le vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 21 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mouké Y... ;
2°) de rejeter la demande d'annulation de cet arrêté présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Melun ;
Vu les

autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droi...

Vu la requête, enregistrée le 11 août 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFECTURE DU DEPARTEMENT DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 24 mars 2000 par lequel le vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 21 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mouké Y... ;
2°) de rejeter la demande d'annulation de cet arrêté présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Melun ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me de X..., avocat M. Mouké Y...,
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Mouké Y..., qui est de nationalité malienne, s'est maintenu sur le territoire national plus d'un mois après la notification, le 26 mars 1999, de la décision du préfet du Val-de-Marne en date du 5 mars 1999 lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle se trouvait ainsi dans la situation prévue au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dans laquelle le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'en vertu des dispositions du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est, sous réserve du respect de certaines conditions, délivrée de plein droit à l'étranger dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; que l'article 12 quater de la même ordonnance dispose que "dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour ( ...)./ La commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15" ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions énoncées à l'article 12 bis ou à l'article 15 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

Considérant que si M. Y... fait valoir qu'il réside en France depuis 1992, qu'il est bien intégré, qu'il a épousé une compatriote en 1997, dont il a eu deux enfants, il ressort des pièces du dossier que compte tenu de la durée et des conditions de son séjour et de celui de son épouse, tous deux en situation irrégulière en France, des attaches familiales conservées au Mali ainsi qu'en l'absence de toute circonstance mettant les parents dans l'impossibilité d'emmener leurs enfants avec eux au Mali, pays dont ils possèdent la nationalité, le refus de titre de séjour n'a pas porté au droit de M. Y... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ce refus lui a été opposé ; que, dès lors que l'intéressé n'entrait pas dans le champ d'application des dispositions du 7° de l'article 12 bis précité de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et qu'il n'allègue ni n'établit relever d'une autre catégorie d'étrangers mentionnée aux articles 12 bis et 15, il ne peut se prévaloir de la méconnaissance de la formalité de consultation de la commission consultative du titre de séjour prévue par l'article 12 quater précité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement du 24 mars 2000 attaqué, le vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Melun s'est fondé sur le moyen tiré de la méconnaissance de la formalité de procédure instituée par l'article 12 quater de l'ordonnnance du 2 novembre 1945 pour annuler l'arrêté du 21 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y... ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Y... ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte des circonstances ci-dessus rappelées que le refus de titre de séjour opposé à M. Y... n'a ni méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni été entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. Y... ;
Considérant, d'autre part, qu'en invoquant la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales M. Y... doit être regardé comme contestant la légalité de la décision distincte contenue dans la notification de l'arrêté attaqué et fixant le Mali comme pays de destination de la reconduite ; que l'intéressé n'apporte toutefois aucune précision, document ou justification relatifs aux risques qu'il encourrait personnellement en cas de retour dans son pays d'origine ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-DE-MARNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 21 mars 2000 décidant la reconduite à la frontière de M. Y... ;
Article 1er : Le jugement en date du 24 mars 2000 du vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Melun est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-DE-MARNE, à M. Mouké Y... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 ss
Numéro d'arrêt : 224147
Date de la décision : 16/05/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 21 mars 2000
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 12 bis, art. 15, art. 12 quater


Publications
Proposition de citation : CE, 16 mai. 2001, n° 224147
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Burguburu
Rapporteur public ?: M. Austry

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:224147.20010516
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