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13/06/2001 | FRANCE | N°219160

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 13 juin 2001, 219160


Vu la requête, enregistrée le 21 mars 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 29 novembre 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 16 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Fatou X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du

2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avo...

Vu la requête, enregistrée le 21 mars 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 29 novembre 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 16 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Fatou X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Lafouge, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (.) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait (.)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X..., de nationalité sénégalaise, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 25 juin 1998, de l'arrêté du 19 juin 1998 par lequel le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi n° 97-396 du 24 avril 1997 : "Ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion, en application de l'article 23 : (.) 8° L'étranger résidant habituellement en France atteint d'une pathologie grave nécessitant un traitement médical dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (.) Les étrangers mentionnés aux 1° à 6° et 8° ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application de l'article 22 de l'ordonnance" ;
Considérant que s'il ressort des pièces du dossier que Mlle X..., qui réside en France depuis 1953, fait l'objet d'examens médicaux en vue d'une fécondation in vitro, elle ne peut être regardée comme atteinte d'une pathologie nécessitant un traitement médical dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une extrême gravité ; que, dans ces conditions, Mlle X... ne se trouvait pas, à la date de l'arrêté litigieux, dans le cas où, en application des dispositions du 8° de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, un étranger ne peut être reconduit à la frontière ; que, par suite, c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la violation de ces dispositions pour annuler l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X... ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle X... tant devant le Conseil d'Etat que devant le tribunal administratif de Paris ;

Considérant que si, à l'appui de sa requête dirigée contre l'arrêté du 16 novembre 1998, Mlle X... fait valoir qu'elle est intégrée dans la société française et vit maritalement avec un ressortissant français et que son éloignement du territoire français aurait de graves conséquences sur sa vie privée, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des conditions de son séjour en France et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au respect dû à sa vie privée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que Mlle X... ne peut, en tout état de cause, exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été notifié à l'encontre de la décision de reconduite, au motif que ce refus violerait les dispositions du 11° de l'article 12 bis et celles de l'article 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant que le préfet n'est tenu de procéder à la saisine de la commission du titre de séjour que dans le seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les articles 12 bis et 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant que si, à l'appui de ses conclusions contre les dispositions de l'arrêté du 16 novembre 1998 prévoyant sa reconduite à destination de son pays d'origine, Mlle X... soutient qu'elle serait exposée à des risques en cas de retour au Sénégal, en violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle n'assortit pas ses affirmations de justifications de nature à établir la réalité de ces risques, qui n'a d'ailleurs été retenue ni par l'office français de protection des réfugiés et apatrides ni par la commission des recours des réfugiés ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 29 novembre 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 16 novembre 1998 ;
Article 1er : Le jugement du 29 novembre 1999 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mlle Fatou X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 219160
Date de la décision : 13/06/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 19 juin 1998
Arrêté du 16 novembre 1998
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8
Loi 97-396 du 24 avril 1997 art. 23
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25, art. 12 quater, art. 12 bis, art. 15


Publications
Proposition de citation : CE, 13 jui. 2001, n° 219160
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lafouge
Rapporteur public ?: Mlle Fombeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:219160.20010613
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