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28/12/2001 | FRANCE | N°233428

France | France, Conseil d'État, 3 ss, 28 décembre 2001, 233428


Vu la requête, enregistrée le 7 mai 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Fadhila Y..., demeurant ... ; Mme Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 3 avril 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 26 février 2001 par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière ainsi que la décision distincte du même jour fixant la Tunisie comme pays de destination;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces déci

sions ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7 176 F au titre de ...

Vu la requête, enregistrée le 7 mai 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Fadhila Y..., demeurant ... ; Mme Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 3 avril 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 26 février 2001 par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière ainsi que la décision distincte du même jour fixant la Tunisie comme pays de destination;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7 176 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Delion, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Fadhila Y... s'est maintenue sur le territoire national plus d'un mois à compter de la notification de la décision du 10 mai 1999 par laquelle le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'il ressort du dossier que Mme Y... a établi sa cellule familiale en France où résident sa soeur de nationalité française, son frère et sa tante, titulaires d'une carte de résident ainsi qu'un autre frère et où elle a eu un enfant en 1998 avec un ressortissant tunisien en situation régulière, M. X..., qui exerce avec elle l'autorité parentale ; que, depuis sa séparation avec ce dernier, la garde de sa fille lui a été attribuée par ordonnance du 23 février 1999 du juge aux affaires familiales au tribunal de grande instance de Lyon, le père pouvant exercer librement son droit de visite et d'hébergement et l'enfant ne pouvant sortir du territoire qu'avec l'accord exprès des deux parents ;
Considérant qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que le juge des affaires familiales ait modifié son ordonnance ni que M. X... ait expressément donné son consentement à la sortie du territoire de son enfant ; que, dès lors, l'exécution de l'arrêté litigieux aurait nécessairement pour conséquence soit que Mme Y... se sépare de sa fille pour regagner le Maroc, ce qui porterait une atteinte manifestement disproportionnée à son droit à une vie familiale normale constitutive d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, soit qu'elle quitte avec sa fille le territoire, en violation des énonciations, pénalement sanctionnées, de l'ordonnance précitée du juge des affaires familiales ; que l'arrêté du 26 février 2001 est, par suite, illégal ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Y... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 février 2001 et de la décision du même jour fixant le pays de destination ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de condamner l'Etat à verser à Mme Y... la somme de 7 176 F (1 093,97 euros) qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 3 avril 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon, l'arrêté du 26 février 2001 du préfet du Rhône ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y... et la décision distincte du même jour fixant le pays de destination sont annulés.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mme Y... une somme de 7 176 F (1 093,97 euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Fadhila Y..., au préfet du Rhône et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 ss
Numéro d'arrêt : 233428
Date de la décision : 28/12/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 26 février 2001
Code de justice administrative L761-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 2001, n° 233428
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Delion
Rapporteur public ?: M. Austry

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:233428.20011228
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