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14/01/2002 | FRANCE | N°221132

France | France, Conseil d'État, 7 ss, 14 janvier 2002, 221132


Vu la requête, enregistrée le 16 mai 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 avril 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a, d'une part, annulé son arrêté du 3 avril 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Nasser Y..., d'autre part, condamné l'Etat au versement de la somme de 3 000 F au titre des frais exposés par le requérant et non compris dans les dépens ;
2°)

de rejeter la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administra...

Vu la requête, enregistrée le 16 mai 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 avril 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a, d'une part, annulé son arrêté du 3 avril 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Nasser Y..., d'autre part, condamné l'Etat au versement de la somme de 3 000 F au titre des frais exposés par le requérant et non compris dans les dépens ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le protocole franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile modifiée en dernier lieu par la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile ; Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Méda, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y..., de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 15 juin 1999, de l'arrêté du même jour du PREFET DU VAL-D'OISE lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire après le rejet, le 28 mai 1999, par le ministre de l'intérieur de la demande de l'intéressé d'admission au séjour au titre de l'asile territorial ; que M. Y... se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que l'arrêté du 3 avril 2000 par lequel le PREFET DU VAL-D'OISE a décidé la reconduite à la frontière de M. Y... n'indique pas le pays de destination de la reconduite ; que, par suite, le moyen tiré des risques que comporterait pour l'intéressé son retour dans son pays d'origine est inopérant ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur une erreur manifeste d'appréciation des risques encourus par M. Y... en cas de retour dans son pays d'origine pour annuler l'arrêté attaqué ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Y... devant le tribunal administratif de Versailles et devant le Conseil d'Etat ;
Considérant que, par un arrêté du 5 juillet 1999, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le PREFET DU VAL-D'OISE a donné à M. Hugues X..., secrétaire général de la préfecture, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 3 avril 2000 aurait été signé par une autorité incompétente manque en fait ;

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998 : "(.) l'asile territorial est accordé par le ministre de l'intérieur ./ Les décisions du ministre n'ont pas à être motivées" ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions législatives qu'une décision refusant l'asile territorial n'a pas à être motivée ; que si M. Y... soutient qu'il court des risques graves en Algérie, notamment en raison du fait qu'il aurait refusé de délivrer à un groupe islamiste armé des médicaments auxquels il avait accès en raison de sa profession d'auxiliaire médical, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier, qui ne comporte que les déclarations de l'intéressé sans que celui-ci produise aucun témoignage à l'appui de ses allégations, que le ministre de l'intérieur ait commis une erreur manifeste d'appréciation en lui refusant l'asile territorial ; que, dès lors, M. Y... n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour serait illégal en raison de l'illégalité de la décision du ministre de l'intérieur refusant de lui accorder l'asile territorial ;
Considérant, enfin, que M. Y... ne peut utilement soutenir, à l'encontre de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, qui n'indique pas le pays à destination duquel il doit être reconduit, que cet arrêté serait entaché d'une méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à demander l'annulation du jugement du 10 avril 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 3 avril 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y... ;
Article 1er : Le jugement du 10 avril 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Versailles par M. Y... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-D'OISE, à M. Y... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 7 ss
Numéro d'arrêt : 221132
Date de la décision : 14/01/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 05 juillet 1999
Arrêté du 03 avril 2000
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3
Loi 52-893 du 25 juillet 1952 art. 13
Loi 98-349 du 11 mai 1998
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 14 jan. 2002, n° 221132
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Méda
Rapporteur public ?: M. Piveteau

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:221132.20020114
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