La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/02/2002 | FRANCE | N°228114

France | France, Conseil d'État, 9 ss, 27 février 2002, 228114


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 13 décembre 2000, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 12 septembre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 7 avril 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y... Hernandez ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européen

ne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ord...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 13 décembre 2000, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 12 septembre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 7 avril 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y... Hernandez ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Mahé, Auditeur,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le jugement attaqué, qui ne précise pas pour quelles raisons l'exécution de la décision de reconduite à la frontière visant Mme X... porterait une atteinte excessive à sa vie privée et familiale, est insuffisamment motivé ; que le PREFET DE POLICE est donc fondé à en demander l'annulation ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (.) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (.)" ;
Considérant que la notification de la décision du 30 juin 1998 par laquelle le PREFET DE POLICE a refusé la délivrance d'un titre de séjour à Mme X..., de nationalité colombienne, doit être réputée intervenue le 8 juillet 1998, date de présentation au domicile de l'intéressée du pli recommandé contenant cette notification ; que Mme X..., qui s'est maintenue sur le territoire plus d'un mois à compter de cette date, se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, Mme X... fait valoir que son frère et deux de ses six enfants résident en France, qu'elle est hébergée à Paris par sa fille et que sa petite-fille possède la nationalité française ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, elle n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué porterait à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et méconnaîtrait, par conséquent, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que les circonstances invoquées ne sont pas davantage de nature à faire regarder cet arrêté comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ; qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (.) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (.)" ; que toutefois, Mme X... ne peut justifier d'une telle durée de séjour en France ; que le moyen tiré de ce que le PREFET DE POLICE ne pouvait légalement prendre à son encontre l'arrêté attaqué sans méconnaître les dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance précitée doit donc être écarté ; qu'il n'y a pas lieu de surseoir à statuer jusqu'à ce que la demande de titre de séjour qu'elle a déposée sur la base de ces dispositions soit instruite ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 12 septembre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 7 avril 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... ;
Article 1er : Le jugement du 12 septembre 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par Mme X... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme Y... Hernandez et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 9 ss
Numéro d'arrêt : 228114
Date de la décision : 27/02/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 07 avril 1999
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 27 fév. 2002, n° 228114
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Mahé
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:228114.20020227
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award