Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2000 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SAVOIE ; le PREFET DE LA SAVOIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 23 novembre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 8 novembre 2000 fixant le pays à destination duquel Mlle Karima X... doit être reconduite en exécution de l'arrêté du 8 novembre 2000 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Grenoble en tant qu'elle est relative à cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Hourdin, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : "(.) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (.)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X..., de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 21 septembre 2000, de l'arrêté du 11 septembre 2000 par lequel le PREFET DE LA SAVOIE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ; que le PREFET DE LA SAVOIE a assorti l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de Mlle X... le 8 novembre 2000 d'une décision en date du même jour désignant l'Algérie comme pays de destination de l'intéressée ; que le PREFET DE LA SAVOIE demande l'annulation du jugement du 23 novembre 2000 par lequel le vice-président délégué du tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la lettre de menace personnalisée dont elle a été destinataire, que Mlle X..., avant de quitter son pays, a fait l'objet de plusieurs agressions physiques émanant du même groupe que les auteurs de ladite lettre, et serait exposée, en cas de retour dans son pays d'origine, à des menaces graves sur sa vie et sa liberté ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, la décision du 8 novembre 2000 fixant l'Algérie comme pays de destination de Mlle X... méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SAVOIE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le vice-président délégué du tribunal administratif de Grenoble a annulé sa décision du 8 novembre 2000 ;
Article 1er : La requête du PREFET DE LA SAVOIE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SAVOIE, à Mlle Karima X... et au ministre de l'intérieur.