Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Kudret X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 2 avril 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 2 août 2000 par lequel le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laigneau, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Le représentant de l'Etat dans le département et à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Kudret X..., de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire national plus d'un mois à compter de la notification, le 27 avril 2000, de la décision du 20 avril 2000 par laquelle le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; que la circonstance que l'intéressé ait formé un recours contentieux à l'encontre de ladite décision, dès lors que ce recours n'a pas de caractère suspensif, ne faisait pas obstacle à ce qu'il se trouve dans le cas où, en application des dispositions précitées de l'ordonnance susvisée, le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. X... résidait habituellement en France depuis plus de dix ans ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police ne pouvait légalement prendre à son encontre l'arrêté attaqué sans méconnaître les dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance précitée ne peut qu'être écarté ;
Considérant que si M. X... fait valoir qu'il a dû quitter son pays en raison de ses opinions et engagements politiques, ces circonstances ne suffisent pas à établir que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressé ; qu'en tout état de cause, ce moyen est inopérant à l'encontre de l'article 1er de l'arrêté du 2 août 2000 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Considérant que si M. X... fait valoir qu'il est entré en 1989 en France où il a noué des liens d'amitié, il ressort des pièces du dossier que son épouse et ses deux enfants vivent en Turquie ; que, par suite, compte tenu des conditions du séjour de l'intéressé en France, l'arrêté du 2 août 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, enfin, que dans les termes où il est rédigé, l'arrêté du 2 août 2000 doit être regardé comme comportant, dans son article 2, une décision distincte fixant la Turquie comme pays à destination duquel l'arrêté de reconduite doit être exécuté ; que la demande de M. X... tendant à ce que lui soit reconnu le statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 7 février 1990, confirmée par la Commission des recours des réfugiés respectivement le 19 février 1992 ; que les allégations de M. X... relatives aux risques que lui ferait courir son retour dans son pays d'origine, en raison de ses opinions et engagements politiques, ne sont pas assorties de justifications de nature à faire légalement obstacle à sa reconduite à destination de son pays d'origine ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Kudret X..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.