La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/09/2002 | FRANCE | N°241607

France | France, Conseil d'État, 3 ss, 06 septembre 2002, 241607


Vu la requête, enregistrée le 3 janvier 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE qui demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 décembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 3 décembre 2001 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Khadija X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention eu

ropéenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu...

Vu la requête, enregistrée le 3 janvier 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE qui demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 décembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 3 décembre 2001 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Khadija X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'Etat ;
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 3° °Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait ( ...)" ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Khadija X..., ressortissante marocaine, s'est maintenue sur le territoire national plus d'un mois à compter de la notification, le 21 février 2001, de la décision du 29 janvier 2001 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si, excipant de l'illégalité du refus de titre de séjour opposé par le PREFET DU VAL-D'OISE, Mlle X... fait valoir que ses biens personnels et familiaux se trouvent en France, qu'elle ne pourrait subvenir seule à ses besoins au Maroc où elle est dépourvue de tout soutien matériel et moral depuis la mort de son grand-père, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée, célibataire et sans enfant, n'est pas dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine où vit une de ses soeurs ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la brièveté du séjour de l'intéressée en France, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté susvisé du 3 décembre 2001 au motif que le refus de titre de séjour opposé à Mlle X... avait méconnu les dispositions du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle X... devant le tribunal administratif ;
Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour ( ...). La commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15" ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles 12 bis et 15 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que, comme il a été dit ci-dessus, Mlle X... n'était pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application du 11° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précité ; que, par suite, le PREFET DU VAL-D'OISE n'était pas tenu, en application de l'article 12 quater, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;
Considérant que la décision de refus de titre de séjour prise à l'encontre de Mlle X... comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent son fondement ; qu'ainsi, cette décision est suffisamment motivée ;
Considérant que si Mlle X... vit depuis le 28 mai 1998 en France où vivent ses parents ainsi que plusieurs de ses frères et soeurs, elle a néanmoins conservé des attaches au Maroc ; qu'ainsi qu'il a été dit, elle est célibataire et sans enfants ; que, par suite, la décision contestée n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de Mlle X... en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du PREFET DU VAL-D'OISE du 3 décembre 2001 n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à demander l'annulation du jugement du 13 décembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 3 décembre 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X... ;
Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 13 décembre 2001 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-D'OISE, à Mlle Khadija X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 3 ss
Numéro d'arrêt : 241607
Date de la décision : 06/09/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 03 décembre 2001
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 12 bis, art. 12 quater, art. 15


Publications
Proposition de citation : CE, 06 sep. 2002, n° 241607
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Burguburu
Rapporteur public ?: M. Austry

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:241607.20020906
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award