Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE ; le PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 5 mai 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nancy a annulé son arrêté du 20 avril 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Khalissa X... et la décision du même jour, fixant le pays à destination duquel elle doit être reconduite ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Nancy ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles modifié ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Logak, Maître des Requêtes ;
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (.) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (.)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 22 novembre 1999, de l'arrêté du 18 novembre 1999 par lequel le PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que Mme X... est entrée en France le 25 février 1999, où elle réside avec son époux qui est en situation régulière ; qu'à la date de l'arrêté attaqué le couple venait d'avoir un enfant qui n'était âgé que de cinq semaines ; que, dans ces circonstances, l'exécution de l'arrêté en date du 20 avril 2000 du PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE décidant la reconduite à la frontière de Mme X..., qui conduirait à séparer l'enfant de son père ou de sa mère, a porté à la vie familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté prononçant la reconduite à la frontière de Mme X... ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à verser à Mme X... une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Mme X... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE, à Mme Khalissa X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.