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30/10/2002 | FRANCE | N°243233

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 30 octobre 2002, 243233


Vu la requête, enregistrée le 18 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA CHARENTE ; le PREFET DE LA CHARENTE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 janvier 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Poitiers qui a annulé l'arrêté du 14 janvier 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Karim X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention de Genève du 28 jui

llet 1951 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi...

Vu la requête, enregistrée le 18 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA CHARENTE ; le PREFET DE LA CHARENTE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 janvier 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Poitiers qui a annulé l'arrêté du 14 janvier 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Karim X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi du 25 juillet 1952 ;
Vu la loi du 11 juillet 1979 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Lafouge, Conseiller d'Etat ;
- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : " Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (.) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (.) " ;
Considérant que M. X..., de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 15 novembre 2001, de la décision du 12 novembre lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, il était dans l'un des cas où le préfet peut légalement décider sa reconduite à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 31 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998 : " Tout étranger présent sur le territoire français qui, n'étant pas déjà admis à séjourner en France sous couvert d'un des titres de séjour prévus par la présente ordonnance ou les conventions internationales, demande à séjourner en France au titre de l'asile, présente cette demande dans les conditions fixées à l'article 10 de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 " ; qu'aux termes dudit article : " ( ...) l'admission en France d'un demandeur d'asile ne peut être refusée que si ( ...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... ne produit aucun élément de nature à étayer la réalité des risques qu'il prétend encourir en cas de retour en Algérie ; qu'il s'est vu d'ailleurs refuser l'asile territorial par une décision du ministre de l'intérieur du 25 septembre 2001 ; qu'ainsi, sa demande d'asile politique, au surplus présentée deux jours après l'intervention de l'arrêté attaqué ordonnant sa reconduite à la frontière, doit être regardée comme ayant pour seul but de faire obstacle à la mesure d'éloignement ; que, dès lors, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Poitiers s'est fondé sur le dépôt d'une demande d'asile politique pour annuler l'arrêté du 14 janvier 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... tant devant le Conseil d'Etat que devant le tribunal administratif ;

Considérant que l'arrêté attaqué comporte l'exposé des considérations de fait et de droit qui justifient la mesure de reconduite à la frontière ; qu'ainsi, il est suffisamment motivé ;
Considérant que, par arrêté du 3 décembre 2001 régulièrement publié, M. Y..., secrétaire général de la préfecture de la Charente et signataire de l'arrêté attaqué, a reçu délégation à l'effet de signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière ; que la qualité du signataire de l'ampliation de l'arrêté est sans incidence sur la légalité de celui-ci ;
Considérant que la circonstance que l'arrêté attaqué ne serait pas accompagné de la décision distincte fixant le pays de destination, est, à la supposer établie, sans incidence sur la légalité dudit arrêté ;
Considérant que si M. X... fait valoir que ses deux frères vivent en France et qu'il projette de se marier avec une ressortissante française, ces circonstances ne suffisent pas à établir que l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure de reconduite sur sa situation personnelle ;
Considérant, enfin, que le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui n'est opérant qu'à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi, doit, en tout état de cause, être écarté en l'absence de tout élément étayant la réalité des risques que M. X... encourrait en cas de retour en Algérie ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA CHARENTE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté du 14 janvier 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Article 1er : Le jugement du 22 janvier 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Poitiers est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. X... devant le tribunal administratif de Poitiers sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA CHARENTE, à M. Karim X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 243233
Date de la décision : 30/10/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 03 décembre 2001
Arrêté du 14 janvier 2002
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3
Loi 52-893 du 25 juillet 1952 art. 10
Loi 98-349 du 11 mai 1998
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 31


Publications
Proposition de citation : CE, 30 oct. 2002, n° 243233
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lafouge
Rapporteur public ?: Mlle Fombeur

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:243233.20021030
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