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13/11/2002 | FRANCE | N°241977

France | France, Conseil d'État, 13 novembre 2002, 241977


Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 15 janvier et 21 février 2002, présentés par Mme Oumou Gane X..., ; Mme X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2001 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
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°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un dél...

Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 15 janvier et 21 février 2002, présentés par Mme Oumou Gane X..., ; Mme X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2001 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 1 000 F par jour de retard ;
4°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 1 000 F par jour de retard ;
5°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., de nationalité sénégalaise, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 15 mars 2001, de la décision du même jour du préfet de police lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'aux termes du 8° de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, ne peut faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière "l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi" ;
Considérant que Mme X..., à l'occasion du recours gracieux, reçu le 28 mars 2001, dirigé contre la décision lui refusant le renouvellement de son titre de séjour, a informé le préfet de police des répercussions sur son état de santé de l'accident dont elle avait été victime le 29 janvier 2001, soit postérieurement à l'examen médical ayant motivé le refus de séjour et antérieurement à la date de l'arrêté attaqué ; qu'il résulte des certificats médicaux versés au dossier, corroborés par la circonstance que l'intéressée a subi deux interventions chirurgicales, le 5 décembre 2001 et le 1er juillet 2002, que Mme X... est atteinte d'une affection qui nécessite des soins dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'il n'est pas établi que ces soins puissent lui être dispensés dans le pays à destination duquel elle doit être reconduite ; que, dès lors, Mme X... est fondée à soutenir que l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière a été pris en méconnaissance des dispositions précitées du 8° de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2001 par lequel le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière ;

Considérant que la présente décision n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour à Mme X... ; qu'ainsi les conclusions de la requête de Mme X... tendant ce qu'il soit prescrit à l'administration de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent être accueillies ;
Considérant qu'aux termes du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, ( ...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas" ; qu'il y a lieu, par application de ces dispositions, d'enjoindre au préfet de police de délivrer à Mme X... une autorisation provisoire de séjour ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à verser à Mme X... la somme de 750 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 17 décembre 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 11 septembre 2001 du préfet de police ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme X... une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à Mme X... la somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme X..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 241977
Date de la décision : 13/11/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 11 septembre 2001
Code de justice administrative L761-1
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25, art. 22 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 13 nov. 2002, n° 241977
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Séners

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:241977.20021113
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