Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 4 juin 2002 présentée par M. Didier X..., ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat : 1°)° d'annuler le jugement du 17 mai 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 14 mai 2002 du préfet de la Savoie ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°)° d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ....) 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., ressortissant congolais, est entré irrégulièrement en France et s'est maintenu depuis sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il entrait ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... vit en France depuis plusieurs années en compagnie de sa concubine et qu'il est le père de deux enfants nés en France en 1997 et en 2001 ; qu'ainsi, compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... porte à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise ; que le requérant est, dès lors, fondé à soutenir qu'il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 14 mai 2002 par lequel le préfet de la Savoie a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : Le jugement du 17 mai 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble et l'arrêté du 14 mai 2002 du préfet de la Savoie ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Didier X..., au préfet de la Savoie et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.