Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 7 mai 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 8 janvier 2002 décidant la reconduite à la frontière de M. Mohamed X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête du PREFET DE POLICE ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ..." ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. Mohamed X..., de nationalité tunisienne, s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée d'un mois à compter de la notification, le 8 décembre 2000, de la décision du même jour par laquelle le PREFET DE POLICE a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a invité à quitter le territoire ; que l'intéressé se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... est entré en France au plus tard en 1993 ; qu'il s'y est marié en mai 1997 avec une ressortissante tunisienne titulaire d'une carte de résident et elle-même entrée en France à l'âge de 4 ans en 1966 ; que de leur union sont nés trois enfants sur le territoire national ; que dans les circonstances de l'affaire, l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... porte au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été décidée ; que, par suite, le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé ledit arrêté ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à la délivrance d'un titre de séjour et à l'attribution de dommages-intérêts :
Considérant que de telles conclusions sont nouvelles en appel et par suite irrecevables ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 1 000 euros qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.
Article 2 : Les conclusions incidentes de M. X... sont rejetées.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. X... la somme de 1000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Mohamed X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales