Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 avril 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris qui a annulé son arrêté du 22 novembre 2001 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Nadia X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle Nadia X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Denis-Linton, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X..., de nationalité tunisienne s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification le 26 octobre 2001 de la décision du PREFET DE POLICE du même jour lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, par lequel le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant, toutefois que Mlle X..., née à Paris en 1979, a vécu en France jusqu'à l'âge de 8 ans avant de repartir en Tunisie avec ses parents ; qu'elle est revenue en France en 1999 à l'âge de 20 ans pour rejoindre son père titulaire d'une carte de résident ; qu'à la date de l'arrêté du 22 novembre 2001 ordonnant sa reconduite, sa mère et ses trois frères et soeurs mineurs avaient bénéficié du regroupement familial en France par une décision du 6 août 2001, procédure dont, étant majeure, elle a été écartée ; qu'ainsi l'intéressée doit être réputée avoir ses attaches familiales en France ; que, dans ces conditions, et alors même qu'elle est majeure, l'arrêté contesté a porté au droit au respect dû à sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il méconnaît par suite les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 22 novembre 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressé ;
Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mlle Nadia X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.