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10/12/2003 | FRANCE | N°248773

France | France, Conseil d'État, 7eme et 5eme sous-sections reunies, 10 décembre 2003, 248773


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juillet 2002 et 18 novembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour les ETABLISSEMENTS CABROL FRERES, dont le siège est ... (81206) ; les ETABLISSEMENTS CABROL FRERES demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 23 mai 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 14 juin 1998 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser

la somme de 93 551,88 euros, assortie des intérêts de droit à compt...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juillet 2002 et 18 novembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour les ETABLISSEMENTS CABROL FRERES, dont le siège est ... (81206) ; les ETABLISSEMENTS CABROL FRERES demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 23 mai 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 14 juin 1998 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 93 551,88 euros, assortie des intérêts de droit à compter du 31 octobre 1995, représentant la somme qui lui restait due au titre du paiement direct dans le cadre d'un marché de sous-traitance conclu avec la société Nord France Entreprise, attributaire des travaux de construction d'un bâtiment du centre d'essais aéronautiques de Toulouse ;

2°) statuant comme juge du fond, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 613 660,12 F (93 551,88 euros) augmentée des intérêts ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes respectives de 15 000 et 5 000 euros, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, dans le cadre de l'instance d'appel et de la première instance ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 et le décret n° 76-476 du 31 mai 1976 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christnacht, Conseiller d'Etat,

- les observations de Me Copper-Royer, avocat des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES,

- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES demande l'annulation de l'arrêt, en date du 23 mai 2002, par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 93 551,88 euros en sa qualité d'entreprise sous-traitante ayant droit au paiement direct pour les travaux réalisés pour le Centre d'essais aéronautiques, organisme dépendant du ministère de la défense ;

Considérant qu'aux termes de l'article 186 ter du code des marchés publics alors en vigueur : Au vu des pièces justificatives fournies par le sous-traitant et revêtues de l'acceptation du titulaire du marché, l'ordonnateur mandate les sommes dues au sous-traitant (...). Dès réception de ces pièces, l'administration avise le sous-traitant de la date de réception de la demande de paiement envoyée par le titulaire et lui indique les sommes dont le paiement à son profit a été acceptée par ce dernier./ Dans le cas où le titulaire d'un marché n'a ni opposé un refus motivé à la demande de paiement du sous-traitant dans le délai de quinze jours suivant la réception, ni transmis celle-ci à l'administration, le sous-traitant envoie directement sa demande de paiement à l'administration par lettre recommandée avec avis de réception postal ou la lui remet contre récépissé dûment daté et inscrit sur le registre tenu à cet effet./ L'administration met aussitôt en demeure le titulaire, par lettre recommandée avec avis de réception postal, de lui faire la preuve, dans un délai de quinze jours à compter de la réception de cette lettre, qu'il a opposé un refus motivé à son sous-traitant. Dès réception de l'avis, elle informe le sous-traitant de la date de la mise en demeure. ;

Considérant qu'en déduisant des dispositions du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux publics, lequel était au surplus inapplicable au cas de l'espèce, que, du fait de l'absence de transmission par la société Nord-France-Entreprise, titulaire du marché, au maître de l'ouvrage, tant du projet de décompte que lui avait adressé la société des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES que d'un refus motivé d'accepter les pièces justificatives du sous-traitant permettant son paiement direct par l'administration, un délai de quinze jours était imposé à la société des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES pour envoyer directement au maître de l'ouvrage, une copie de son projet de décompte, la cour administrative d'appel de Bordeaux a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que, par suite, la société des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES est fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 23 mai 2002 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Nord-France-Entreprise, n'a pas transmis à l'administration les pièces justificatives du solde des travaux effectués par la société des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES que celle-ci lui avait adressées le 18 juillet 1995 en sa qualité d'entreprise sous-traitante agréée ; qu'elle n'a pas davantage opposé à celle-ci un refus motivé d'accepter sa demande de paiement, dans le délai de quinze jours à compter de la réception de ces pièces justificatives ; que la société des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES au lieu d'envoyer directement, comme elle devait le faire, sa demande de paiement à l'administration s'est bornée à lui transmettre, d'ailleurs tardivement, le 11 janvier 1996, une copie pour information de sa mise en demeure à la société Nord France de transmettre à l'Etat la situation de travaux qu'elle avait fait parvenir au mois de juillet 1995 ; que l'Etat, qui a procédé au règlement du solde des travaux à l'entreprise Nord France le 16 janvier 1996 est fondé à soutenir qu'il n'a pas été saisi en temps utile d'une demande de paiement direct et qu'il n'a pas commis de faute en mandatant dans des délais normaux la totalité du solde du marché à l'entreprise titulaire, alors même qu'il aurait eu connaissance d'un différend opposant le titulaire du marché à l'entreprise sous-traitante ;

Considérant que si le maître d'ouvre a informé la société des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES, dès le 25 octobre 1995, que la situation présentée par la société Nord France en juillet 1995, ne faisait pas apparaître le montant des sommes dues à l'entreprise sous-traitante, il n'y était tenu, contrairement à ce que soutient la société requérante, ni par le code des marchés publics, ni par la loi du 31 décembre 1975, ni par aucune autre disposition législative ou réglementaire ;

Considérant que la circonstance que le projet de décompte a été établi dans le cadre d'une situation mensuelle est sans incidence sur l'obligation du sous-traitant d'informer le maître de l'ouvrage de sa situation dans les formes prescrites par le code des marchés publics pour pouvoir bénéficier du paiement direct ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 93 551,88 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à la société des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 23 mai 2002 est annulé.

Article 2 : La requête d'appel de la société des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES et le surplus de ses conclusions devant le Conseil d'Etat sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société des ETABLISSEMENTS CABROL FRERES et au ministre de la défense.


Synthèse
Formation : 7eme et 5eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 248773
Date de la décision : 10/12/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 10 déc. 2003, n° 248773
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: M. Alain Christnacht
Rapporteur public ?: M. Piveteau
Avocat(s) : COPPER-ROYER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:248773.20031210
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