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16/11/2005 | FRANCE | N°264404

France | France, Conseil d'État, 9eme et 10eme sous-sections reunies, 16 novembre 2005, 264404


Vu 1°), sous le n° 264404, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 février et 10 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean Y, demeurant ... ; M. Y demande que le Conseil d'Etat :

1°) annule l'arrêt en date du 9 décembre 2003 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant que, par cet arrêt, ladite cour a annulé le jugement du tribunal administratif de Pau du 11 mars 1999 annulant la décision du ministre de la défense du 21 novembre 1996 refusant de prendre en compte les rémunérations afférent

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Vu 1°), sous le n° 264404, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 février et 10 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean Y, demeurant ... ; M. Y demande que le Conseil d'Etat :

1°) annule l'arrêt en date du 9 décembre 2003 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant que, par cet arrêt, ladite cour a annulé le jugement du tribunal administratif de Pau du 11 mars 1999 annulant la décision du ministre de la défense du 21 novembre 1996 refusant de prendre en compte les rémunérations afférentes au 8ème échelon du groupe VIII des ouvriers des établissements industriels de l'Etat pour la liquidation de sa pension de retraite ;

2°) mette à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 264562, le recours enregistré le 17 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande que le Conseil d'Etat :

1°) annule l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 9 décembre 2003 en tant que, par cet arrêt, ladite cour a confirmé le jugement du tribunal administratif de Pau du 11 mars 1999 annulant sa décision du 21 novembre 1996 refusant d'accorder à M. Jean Y le bénéfice de la bonification d'ancienneté prévue à l'article 9-II de la loi du 31 décembre 1992 ;

2°) statuant au fond, annule le jugement du tribunal administratif de Pau sur ce point et rejette la demande présentée devant lui par M. Y ;

…………………………………………………………………………

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi n° 59-1479 du 28 décembre 1959 ;

Vu la loi n° 92-1476 du 31 décembre 1992 portant loi de finances rectificative pour 1992, notamment son article 99 ;

Vu le décret n° 65-836 du 24 septembre 1965 ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hugues Hourdin, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. Y,

- les conclusions de M. Stéphane Verclytte, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;

Considérant que M. Y, recruté en 1961 en tant qu'agent non titulaire du ministère des armées, exerçait la profession d'ouvrier d'entretien professionnel faisant fonction de chef d'équipe, classée alors au 8ème échelon du groupe VII des rémunérations des ouvriers des établissements industriels de l'Etat, lorsque, le 1er septembre 1982, il a été nommé fonctionnaire dans le corps des techniciens d'études et de fabrication ; qu'affecté à l'atelier de construction de Tarbes, devenu Giat Industrie, l'intéressé a bénéficié, en 1994, d'une cessation anticipée d'activité dans les conditions prévues à l'article 99 de la loi du 31 décembre 1992 portant loi de finances rectificative pour 1992 ; que, radié des cadres à sa demande le 1er octobre 1994, il a ensuite opté, pour la liquidation de ses droits à pension, en faveur d'une pension ouvrière, comme lui en ouvraient la possibilité les dispositions de l'article unique de la loi du 28 décembre 1959 et a été mis en retraite le 7 juin 1995 ; que M. Y ayant contesté les bases de liquidation de sa pension au double motif que la pension qui lui a été concédée n'était pas calculée sur la base des émoluments afférents au groupe VIII des rémunérations des ouvriers des établissements industriels de l'Etat et qu'elle ne prenait pas en compte la bonification d'ancienneté mentionnée au II de l'article 99 de la loi de finances rectificative pour 1992 susmentionnée, le MINISTRE DE LA DEFENSE a, par décision du 21 novembre 1996, rejeté sa demande ; que, par jugement du 11 mars 1999, le tribunal administratif de Pau a fait droit à la demande de M. Y tendant à l'annulation de cette décision ; que, par l'arrêt dont M. Y et le MINISTRE DE LA DEFENSE demandent respectivement et partiellement l'annulation, la cour administrative d'appel de Bordeaux, saisie d'un appel par ce dernier, a annulé ce jugement en tant qu'il faisait droit aux conclusions de M. Y relatives au salaire de référence de sa pension ouvrière et a rejeté le surplus des conclusions du recours du ministre relatives à la prise en compte de la bonification d'ancienneté en cause ;

En ce qui concerne le salaire de référence :

Considérant qu'aux termes de l'article unique de la loi du 28 décembre 1959 : Les fonctionnaires du corps technique du ministère des armées, nommés dans un corps de fonctionnaires après avoir accompli au moins dix années de services en qualité d'ouvriers affiliés au régime des pensions fixé par la loi n° 49-1097 du 2 août 1949, pourront, lors de leur mise à la retraite, opter pour une pension ouvrière liquidée en application de la loi susvisée, s'ils perçoivent encore à cette date une indemnité différentielle basée sur les rémunérations ouvrières. Les émoluments de base retenus pour la liquidation de la pension sont ceux correspondant au salaire maximum de la profession à laquelle appartenaient les intéressés lors de leur nomination en qualité de fonctionnaire ;

Considérant qu'il ressort de ces dispositions que le législateur a prescrit que la pension des bénéficiaires de l'option qu'il ouvrait, fût calculée sur les émoluments correspondant au salaire le plus élevé pouvant être perçu à la date de leur mise à la retraite dans la profession qu'ils ont exercée avant d'être promus fonctionnaires ; qu'il suit de là qu'en estimant, lorsque la date de radiation des cadres est, comme en l'espèce, antérieure à la date de mise à la retraite, que la première de ces deux dates devait être retenue pour apprécier le salaire à prendre en compte comme référence du calcul de la pension ouvrière, la cour a commis une erreur de droit ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête de M. Y, l'arrêt attaqué doit, dès lors, être annulé dans cette mesure ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 812-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, si M. Y a été radié des cadres le 1er octobre 1994, sa mise à la retraite n'est intervenue que le 7 juin 1995 ; que c'est, en conséquence, à cette date que doivent être appréciés, pour la liquidation de la pension ouvrière en faveur de laquelle il a opté, les émoluments correspondant au salaire le plus élevé pouvant être perçu dans la profession qu'il exerçait avant d'être promu fonctionnaire ; qu'il n'est pas contesté que, par application de l'instruction du ministre de la défense du 28 février 1995, la profession exercée par l'intéressé figurait alors au nombre de celles qui ouvraient droit à l'accès au groupe VIII des rémunérations des ouvriers des établissements industriels de l'Etat ; qu'il suit de là que le MINISTRE DE LA DEFENSE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé sa décision du 21 novembre 1996 en tant qu'elle portait refus de prendre en compte les rémunérations afférentes au groupe VIII pour liquider la pension ouvrière de retraite de M. Y ;

En ce qui concerne la bonification d'ancienneté mentionnée à l'article 99 de la loi du 31 décembre 1992 :

Considérant qu'aux termes de l'article 99 de cette loi, portant loi de finances rectificative pour 1992 : I. Les fonctionnaires du ministère de la défense âgés de plus de cinquante cinq ans en service dans des sites en restructuration à agréer par arrêté interministériel : / ayant accompli au moins quinze ans de services au sein du ministère de la défense ou dans une entreprise publique ou dans un établissement public relevant de la tutelle du ministère de la défense ; / et comptant trente ans de services pouvant être pris en compte pour la constitution du droit à pension en application de l'article L. 5 du code des pensions civiles et militaires de retraite, peuvent, sur leur demande, être radiés des cadres et peuvent bénéficier de la moitié de leur dernier traitement indiciaire, majoré d'une indemnité fixée par décret. / II. Les fonctionnaires radiés des cadres dans les conditions prévues au I bénéficient d'une bonification d'ancienneté égale à la durée de service restant à accomplir jusqu'à l'âge d'entrée en jouissance de la pension prévu par l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans la limite de quatre ans. / Cette bonification ne peut avoir pour effet de porter le nombre des annuités liquidables à plus de trente-sept ans et demi ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de cet article que la bonification d'ancienneté qu'elles instaurent, sous les seules réserves prévues au II, au bénéfice des fonctionnaires du ministère de la défense placés en cessation progressive d'activité, demeure acquise aux intéressés quelles que soient les modalités ultérieures de liquidation de leur pension ; que, par suite, en estimant que la circonstance que M. Y avait, pour la liquidation de ses droits à pension, opté en faveur du régime de la pension ouvrière telle que prévue par le décret du 24 septembre 1965, ne faisait pas obstacle à ce qu'il pût bénéficier de cette bonification d'ancienneté, la cour a fait une exacte application des dispositions précitées ; que le recours du MINISTRE DE LA DEFENSE ne peut, dès lors, qu'être rejeté ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 4 000 euros que M. Y demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le recours du MINISTRE DE LA DEFENSE, enregistré sous le n° 264562, est rejeté.

Article 2 : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 9 décembre 2003 est annulé en tant qu'il a refusé à M. Y le bénéfice de la prise en compte des rémunérations afférentes au groupe VIII pour la liquidation de sa pension ouvrière.

Article 3 : Les conclusions présentées par le MINISTRE DE LA DEFENSE devant la cour administrative d'appel de Bordeaux, dirigées contre le jugement du 11 mars 1999 du tribunal administratif de Pau et relatives à l'octroi à M. Y du bénéfice de la prise en compte des rémunérations afférentes au groupe VIII pour la liquidation de sa pension ouvrière sont rejetées.

Article 4 : L'Etat versera à M. Y la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Jean Y et au MINISTRE DE LA DEFENSE.


Synthèse
Formation : 9eme et 10eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 264404
Date de la décision : 16/11/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 16 nov. 2005, n° 264404
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: M. Hugues Hourdin
Rapporteur public ?: M. Verclytte
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:264404.20051116
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