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27/04/2007 | FRANCE | N°252163

France | France, Conseil d'État, 5ème / 4ème ssr, 27 avril 2007, 252163


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 décembre 2002 et 2 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SA DENNERY, dont le siège social est 2, Quai Blanqui et 4, rue de Charenton à Alfortville Cedex (94147), représentée par son président directeur général en exercice et par Me C...A..., demeurant..., ès qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession et d'administrateur de la SA DENNERY ; la SA DENNERY et Me A...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 2 octobre 2002 par lequel la

cour administrative d'appel de Paris a rejeté la requête de la SA DENNERY...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 décembre 2002 et 2 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SA DENNERY, dont le siège social est 2, Quai Blanqui et 4, rue de Charenton à Alfortville Cedex (94147), représentée par son président directeur général en exercice et par Me C...A..., demeurant..., ès qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession et d'administrateur de la SA DENNERY ; la SA DENNERY et Me A...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 2 octobre 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté la requête de la SA DENNERY tendant à l'annulation du jugement du 10 décembre 1999 du tribunal administratif de Paris ayant rejeté sa demande tendant à la condamnation de la Ville de Paris à lui verser la somme de 204.353.115,80 F, augmentée des intérêts de droit et de la capitalisation des intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait des décisions prises en vue de l'aménagement de la "promenade plantée Bastille-Reuilly" ;

2°) statuant au fond, de faire droit à leur demande devant le tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge de la Ville de Paris le versement de la somme de 10 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 21 mars 2007, présentée pour la SA DENNERY ;

Vu le premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Damien Botteghi, Auditeur,

- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de la SA DENNERY et autres et de Me Foussard, avocat de la ville de Paris,

- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par délibération du 19 février 1990, le conseil de Paris a donné un avis favorable à l'opération d'aménagement d'une promenade plantée et des quartiers contigus, entre la place de la Bastille et la zone d'aménagement concerté de Reuilly, opération dont il élargissait le périmètre par rapport à celui qui résultait de sa précédente délibération du 2 février 1987, et a autorisé le maire de Paris à acquérir à l'amiable divers immeubles compris à l'intérieur du périmètre ainsi élargi, à faire usage sur ces biens du droit de préemption et à mettre en oeuvre la procédure préalable à la déclaration d'utilité publique de l'opération ; qu'en particulier, les terrains bâtis situés 4, 6 et 8 rue Moreau à Paris (XIIème), qui appartenaient à la société DENNERY et où était situé son siège social, ont été alors inclus dans le périmètre par cette décision ; que, toutefois, la Ville de Paris a ensuite renoncé à son projet d'inclure dans l'aménagement de la promenade plantée les terrains bâtis appartenant à la société DENNERY après l'annulation, par un arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 31 octobre 1995, de l'arrêté du préfet de Paris du 8 avril 1992 déclarant d'utilité publique l'opération d'aménagement en tant qu'il déclare d'utilité publique l'acquisition desdits terrains bâtis ; que la société a recherché la responsabilité de la Ville de Paris à raison des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de cette opération d'urbanisme et de son déroulement qui l'aurait placée dans l'impossibilité de donner suite à deux promesses d'achat portant sur ses terrains signées le 3 janvier 1990 et le 23 janvier 1992 et à la possibilité de réaliser des travaux sur ses immeubles à la suite des refus opposés le 14 janvier 1991 et le 11 mars 1993 par le maire de Paris à ses demandes de permis de construire ;

Sur la régularité de l'arrêt :

Considérant que pour écarter les conclusions de la SA DENNERY fondées sur la faute qu'aurait commise la Ville de Paris en incluant, par sa délibération du 19 février 1990, les terrains situés 4, 6 et 8 rue Moreau dans le périmètre de l'opération d'aménagement de la promenade plantée, la cour a estimé que cette inclusion, justifiée selon les termes mêmes de la délibération par l'existence " d'un lien étroit entre l'aménagement des voûtes situées au premier plan et celui de ces emprises... séparées du viaduc par une parcelle communale d'environ 60 m² " n'entachait pas la décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'elle a ainsi suffisamment motivé son arrêt ; qu'en recherchant si l'opération d'aménagement avait fait peser sur la SA DENNERY une charge spéciale et anormale hors de proportion avec les justifications d'intérêt général sur lesquelles elle reposait, la cour a implicitement mais nécessairement répondu au moyen de l'appelante tiré d'une atteinte au droit de propriété garanti par l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur le bien fondé de l'arrêt :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, d'une part, si le commissaire-enquêteur chargé de l'enquête publique portant sur l'opération d'aménagement était d'avis d'exclure du périmètre les parcelles situées au 4, 6 et 8 Moreau " à la condition que des engagements soient pris par le propriétaire de respecter pour leur affectation et leur volumétrie les contraintes jugées indispensables pour l'accompagnement de la promenade plantée et le parc de stationnement prévu ", il avait toutefois indiqué qu'il était aussi envisageable d'y intégrer l'ensemble de l'unité foncière, compte tenu de l'impossibilité de conserver en l'état la parcelle située au n°4 de la rue Moreau et de la nécessité d'y réaménager le bâti dégradé ; que, d'autre part, l'annulation prononcée par la cour administrative d'appel de Paris de l'arrêté préfectoral en date du 8 avril 1992 déclarant d'utilité publique l'opération en tant qu'il inclut les parcelles litigieuses est fondée, non sur l'absence d'utilité publique de cette inclusion, mais sur l'incompétence de l'auteur de l'acte pour la prononcer, compte tenu de l'absence de levée de la réserve du commissaire-enquêteur ; que, par suite, c'est sans dénaturer les faits soumis à son examen que la cour a estimé que la délibération du 19 février 1990 n'était pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle a inclus les terrains litigieux dans le périmètre de l'opération, eu égard au lien étroit existant entre l'aménagement des voûtes du viaduc et les terrains de la société requérante situés à proximité immédiate de la promenade ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en jugeant que la circonstance que la ville a estimé opportune la réalisation d'un équipement hôtelier sur cette unité foncière ne suffisait pas à établir que sa décision aurait été prise dans le but exclusif d'assurer l'équilibre financier du traité de concession et aurait de ce fait constitué un détournement de pouvoir, la cour a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation ;

Considérant, en troisième lieu, que la cour a exactement qualifié les faits, sans les dénaturer, en estimant que la société requérante n'invoquait aucun chef de préjudice qui soit en relation directe et certaine avec l'illégalité, constatée par un arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 1er juin 1999 devenu définitif, du refus de permis de construire opposé le 11 mars 1993 par le maire de Paris ;

Considérant, en quatrième lieu, que la cour n'a pas davantage inexactement qualifié les faits soumis à son examen en jugeant que la société requérante, qui avait conservé le libre usage de ses biens et fait usage de cette liberté en signant une promesse de vente en 1992 et en les proposant à la location en 1996, n'avait pas subi de dommage anormal et spécial à raison de l'opération d'aménagement urbain engagée par la ville de Paris ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA DENNERY n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 2 octobre 2002 ;

Sur les conclusions de la SA DENNERY et de la Ville de Paris tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Ville de Paris, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement à la SA DENNERY et à Me B...de la somme que ceux-ci demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des mêmes dispositions et de mettre à la charge de la SA DENNERY et de Me B...le versement à la Ville de Paris de la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SA DENNERY et de MeB..., administrateur judiciaire est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la Ville de Paris tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SA DENNERY, à MeB..., à la Ville de Paris et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.


Synthèse
Formation : 5ème / 4ème ssr
Numéro d'arrêt : 252163
Date de la décision : 27/04/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 avr. 2007, n° 252163
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Damien Botteghi
Rapporteur public ?: M. Olson
Avocat(s) : FOUSSARD ; SCP MONOD, COLIN ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:252163.20070427
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