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26/11/2007 | FRANCE | N°280376

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 26 novembre 2007, 280376


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 mai et 12 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Florence A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 10 mars 2005 par laquelle le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 26 juin 2003 du tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés des 22 décembre 1998 et 24 février 1999 la plaçant

en congé de longue maladie, à l'annulation des arrêtés des 7 octobre 199...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 mai et 12 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Florence A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 10 mars 2005 par laquelle le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 26 juin 2003 du tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés des 22 décembre 1998 et 24 février 1999 la plaçant en congé de longue maladie, à l'annulation des arrêtés des 7 octobre 1999 et 7 août 2000 la plaçant en congé de longue durée, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 50 000 F au titre du préjudice moral, de 120 000 F au titre du préjudice d'une perte de chance de carrière, à l'annulation des mises en demeure de rejoindre son poste des 29 juin et 23 juillet 2001, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 4 000 F par mois depuis le 1er août 2001, à la condamnation de l'Etat à l'indemniser de son préjudice financier et de perte de chance de carrière, à l'annulation de l'arrêté du 5 février 2002 prononçant son licenciement, à ce que soit ordonnée sa réintégration, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 610 euros par mois du 1er août 2001 au 5 février 2002 et de 2 000 euros par mois à compter du 5 février 2002 en réparation des troubles subis dans ses conditions d'existence et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme représentant trois fois la rémunération mensuelle qu'elle aurait dû percevoir si elle avait été en activité depuis le 1er mars 2002 jusqu'à la date du jugement en réparation de son préjudice financier et de sa perte de chance de carrière ;

2°) statuant au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Francis Girault, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Choucroy, Gadiou, Chevallier, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Didier Casas, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumises au juge du fond que l'avis de réception du pli recommandé portant notification du jugement du tribunal administratif de Paris du 26 juin 2003, adressée à Mme A, comporte la seule mention de la date de présentation de ce pli, le 21 juillet 2003 ; qu'en l'absence de mention de la date de distribution, celle-ci doit être regardée comme indiquée par la date figurant sur le cachet de la poste apposé sur l'avis de réception lors de la remise du pli au destinataire au bureau de poste ; que la date figurant sur le cachet de la poste indique que le pli recommandé a été remis au bureau de poste à Mme A le 28 juillet 2003, comme en atteste sa signature ; que le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris a donc entaché son ordonnance de dénaturation en considérant que le pli recommandé avait été notifié à Mme A le 21 juillet 2003, date de sa présentation, et en en déduisant la tardiveté de l'appel de Mme A, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 24 septembre 2003 ; que dès lors, Mme A est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance en date du 10 mars 2005 par laquelle le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 26 juin 2003 a été notifié à Mme A le 28 juillet 2003 ; que sa requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 24 septembre 2003, a donc été présentée dans le délai de recours et qu'elle est dès lors recevable ;

Sur les conclusions de Mme A tendant à l'annulation des arrêtés en date des 22 décembre 1998, 24 février 1999, 7 octobre 1999 et 7 août 2000 la plaçant en congé de longue maladie et congé de longue durée :

Considérant que Mme A, attachée de service administratif des services déconcentrés, détachée à la date des faits dans le corps des attachés d'administration centrale, en fonction au ministère de la défense, demande l'annulation de l'arrêté du 22 décembre 1998 la plaçant d'office en congé de longue maladie du 4 août 1998 au 4 février 1999, de l'arrêté du 24 février 1999 prolongeant cet arrêt jusqu'au 3 août 1999, de l'arrêté du 7 octobre 1999 la plaçant en congé de longue durée jusqu'au 3 novembre 1999 et de l'arrêté du 7 août 2000 la maintenant en congé de longue durée et la réintégrant dans ses fonctions à la date du 4 octobre 2000 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 relative à la fonction publique de l'Etat Le fonctionnaire en activité a droit...3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans le cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée ; qu'aux termes de l'article 34 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime des congés de maladie des fonctionnaires: Lorsqu'un chef de service estime, au vu d'une attestation médicale ou sur le rapport des supérieurs hiérarchiques, que l'état de santé d'un fonctionnaire pourrait justifier qu'il lui soit fait application des dispositions de l'article 34 (3° ou 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, il peut provoquer l'examen médical de l'intéressé dans les conditions prévues aux alinéas 3 et suivants de l'article 35 ci-dessous. Un rapport écrit du médecin chargé de la prévention, attaché au service auquel appartient le fonctionnaire concerné, doit figurer au dossier soumis au comité médical; qu'aux termes de l'article 35 du même décret: Pour obtenir un congé de longue maladie ou de longue durée, les fonctionnaires en position d'activité ou leurs représentants légaux doivent adresser à leur chef de service une demande appuyée d'un certificat de leur médecin traitant spécifiant qu'ils sont susceptibles de bénéficier des dispositions de l'article 34 (3° ou 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée... ;

En ce qui concerne les moyens de légalité externe :

Considérant que les arrêtés attaqués sont suffisamment motivés ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées des articles 34 et 35 du décret du 14 mars 1986, applicables à l'espèce, que la saisine du comité médical peut être exercée à l'initiative de l'administration ou de l'intéressé ; que si Mme A soutient que le comité médical n'aurait pas été saisi par son chef de service, il ressort des pièces du dossier que ce moyen manque en fait ;

Considérant qu'aux termes du 5ème alinéa de l'article 35 précité du décret du 14 mars 1986 : L'avis du comité médical est transmis au ministre qui le soumet pour avis, en cas de contestation par l'administration ou l'intéressé, ou dans l'hypothèse prévue au deuxième alinéa de l'article 28 ci-dessus, au comité médical supérieur visé à l'article 8 du présent décret ; que si Mme A a présenté un recours hiérarchique contre son placement en congé de longue maladie, l'administration l'a informée qu'elle pouvait saisir le comité médical supérieur ; qu'en l'absence de réponse de l'intéressée, l'administration a pu, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article 35 du décret du 14 mars 1986, estimer que celle-ci n'entendait pas donner suite à sa contestation et provoquer la saisine du comité médical supérieur ;

Considérant qu'aux termes du sixième alinéa de l'article 19 du décret du 14 mars 1986 : Le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de la partie administrative de son dossier. Un délai minimum de huit jours doit séparer la date à laquelle cette consultation est possible de la date de la réunion de la commission de réforme ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A a été mise à même d'obtenir communication de la partie administrative de son dossier et de produire devant le comité médical des certificats émanant de médecins de son choix ; qu'elle ne peut en conséquence invoquer une méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure ;

En ce qui concerne les moyens de légalité interne :

Considérant que si Mme A soutient que les décisions contestées seraient basées sur des faux, il ne ressort pas des pièces du dossier que les documents et certificats médicaux au vu desquels le comité médical s'est prononcé aient été des faux ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que les décisions contestées seraient fondées sur des inexactitudes matérielles ;

Considérant que la requérante ne peut utilement invoquer, à l'encontre des ces décisions prises en considération de son état de santé, une discrimination illégale ;

Considérant que compte tenu des affections dont était atteinte Mme A, la rendant temporairement inapte à l'exercice de ses fonctions, les décisions attaquées plaçant la requérante en congé de longue maladie et de longue durée ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des arrêtés attaqués des 22 décembre 1998, 24 février 1999, 7 octobre 1999 et 7 août 2000 ;

Sur les conclusions de Mme A tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 février 2002 prononçant son licenciement :

En ce qui concerne les moyens de légalité externe :

Considérant que l'arrêté prononçant la licenciement de Mme A est suffisamment motivé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 45 du décret du 14 mars 1986 : Le fonctionnaire qui, à l'expiration de son congé de longue maladie ou de longue durée, refuse sans motif valable lié à son état de santé le ou les postes qui lui sont proposés, peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire ;

Considérant que Mme A avait été reconnue apte à reprendre ses fonctions le 1er août 2000 et réintégrée à compter du 4 octobre 2000 ; que faute d'élément nouveau, un nouvel avis du comité médical n'était pas requis avant que le ministre ne prenne acte de son refus de reprendre son service et ne prononce son licenciement ;

Considérant que si la requérante a reçu la lettre l'invitant à prendre connaissance de son dossier le matin même du jour où le rendez-vous lui était fixé, le 23 novembre 2001, elle disposait d'un délai suffisant pour solliciter, le cas échéant, un autre rendez-vous dès lors que la commission administrative paritaire appelée à donner son avis sur son cas ne s'est réunie que le 5 décembre suivant ;

Considérant que Mme A appartenant au corps des attachés de service administratif des services déconcentrés du ministère de la défense, seule la commission administrative paritaire de ce corps était compétente pour connaître de sa situation ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le vote de cette commission paritaire, saisie du projet de licenciement de Mme A, soit intervenu dans des conditions irrégulières ;

En ce qui concerne les moyens de légalité interne :

Considérant que si Mme A soutient que la décision contestée reposerait sur des faux, il ressort des pièces du dossier que son moyen manque en fait ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le licenciement de Mme A a été prononcé légalement sur le fondement des dispositions précitées de l'article 45 du décret du 14 mars 1986, en raison du refus persistant de Mme A de reprendre l'exercice de ses fonctions, alors même qu'elle avait été reconnue apte à cette reprise à compter du 4 octobre 2000 ; que, dans ces conditions, la décision contestée, qui ne repose pas sur des inexactitudes matérielles, n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que la discrimination et le détournement de pouvoir allégués ne sont pas établis ;

Considérant qu'il en résulte que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 5 février 2002 prononçant son licenciement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de Mme A dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 26 juin 2003, en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation des arrêtés des 22 décembre 1998, 24 février 1999, 7 octobre 1999, 7 août 2000 et 5 février 2002, doivent être rejetées ; que, par voie de conséquence, ses conclusions dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 26 juin 2003, en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires, doivent être rejetées ainsi que ses conclusions à fin d'injonction ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat les sommes que demande Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance en date du 10 mars 2005 du président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris est annulée.

Article 2 : La requête présentée par Mme A devant la cour administrative d'appel de Paris est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de Mme A présentées devant le Conseil d'Etat et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A et au ministre de la défense.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 280376
Date de la décision : 26/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 26 nov. 2007, n° 280376
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: M. Francis Girault
Rapporteur public ?: M. Casas
Avocat(s) : SCP CHOUCROY, GADIOU, CHEVALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:280376.20071126
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