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30/01/2008 | FRANCE | N°276865

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 30 janvier 2008, 276865


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 janvier 2005 et 24 mai 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Franck A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 16 novembre 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 5 novembre 2002 du tribunal administratif de Paris rejetant son recours dirigé, d'une part, contre la décision du 20 mars 1997 du trésorier-payeur général des créances spéciales du Trésor rejetant

sa demande de remise gracieuse de la somme de 72 306 francs (11 022,98 e...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 janvier 2005 et 24 mai 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Franck A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 16 novembre 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 5 novembre 2002 du tribunal administratif de Paris rejetant son recours dirigé, d'une part, contre la décision du 20 mars 1997 du trésorier-payeur général des créances spéciales du Trésor rejetant sa demande de remise gracieuse de la somme de 72 306 francs (11 022,98 euros), mise à sa charge par un titre exécutoire du 11 novembre 1989 en remboursement des frais de scolarité de l'école de santé des armées de Bordeaux et, d'autre part, contre le titre de perception ;

2°) statuant au fond, d'annuler la décision du 20 mars 1997 du trésorier-payeur général des créances spéciales du Trésor rejetant sa demande de remise gracieuse et le titre de recettes du 11 décembre 1989 émis à son encontre ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 alors en vigueur ;

Vu le décret n° 74-515 du 17 mai 1974 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Francis Girault, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. A, admis en 1987 à l'école du service de santé des armées , a contesté devant le tribunal administratif de Paris, d'une part le titre exécutoire du 11 décembre 1989 mettant à sa charge le remboursement à l'Etat de la somme de 11 022,98 euros représentant les frais de scolarité et d'entretien émis à la suite de sa radiation en raison de son échec aux examens, et d'autre part la décision du 20 mars 1997 par laquelle le trésorier-payeur général des créances spéciales du Trésor a rejeté sa demande de remise gracieuse ; que par jugement du 5 novembre 2002 le tribunal administratif de Paris a rejeté tant ses conclusions dirigées contre le titre de perception du 11 décembre 1989 que celles dirigées contre le refus de remise gracieuse en date du 20 mars 1997 ; que par l'arrêt du 16 novembre 2004, contre lequel M. A s'est pourvu en cassation, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel contre ce jugement du tribunal administratif de Paris ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant d'une part, que pour répondre au moyen soulevé par M. A au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision du 20 mars 1997 du trésorier-payeur général des créances spéciales du Trésor rejetant sa demande de remise gracieuse, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise celui-ci en ne relevant pas que son inaptitude physique prévenait le requérant de poursuivre sa carrière dans le service de santé des armées, la cour administrative d'appel de Paris s'est bornée à juger que sa demande ne comportait pas de moyen spécifique ; que d'autre part, à l'appui des conclusions dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejetait ses conclusions dirigées contre le titre exécutoire du 11 novembre 1989, M. A a soulevé devant la cour le moyen tiré de ce que le décret du 17 mai 1974 modifié portant statut particulier des corps militaires des médecins, des pharmaciens et des vétérinaires biologistes des armées ne prévoit pas une obligation de remboursement pour un élève involontairement rayé des contrôles de l'école de service de santé des armées en cas d'échec aux examens ; que la cour n'a pas répondu à ce moyen soulevé devant elle ; qu'il résulte de ce qui précède que dans ses réponses aux conclusions tendant à l'annulation tant de la décision de refus de remise gracieuse du 20 mars 1997 que du titre exécutoire du 11 novembre 1989, la cour a entaché son arrêt d'insuffisance de motivation ; que le requérant est par suite fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut « régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie » ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Sur les conclusions relatives au titre exécutoire du 11 novembre 1989 :

Considérant que si M. A soutient en appel que le jugement du tribunal administratif du 5 novembre 2002 a omis de répondre au moyen tiré de ce que le décret du 17 mai 1974 modifié portant statut particulier des corps militaires des médecins, des pharmaciens et des vétérinaires biologistes des armées ne prévoit pas une obligation de remboursement pour un élève involontairement rayé des contrôles de l'école de service de santé des armées en cas d'échec aux examens, il ressort des pièces du dossier qu'il n'a pas soulevé ce moyen dans ses écritures devant le tribunal ; qu'il se contentait en effet d'invoquer l'incompétence des auteurs de ce décret et la rupture d'égalité qu'il instituait ; qu'ainsi, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'un défaut de motivation ;

Considérant que le titre exécutoire du 11 décembre 1989 émis en remboursement des frais de scolarité et d'entretien de M. A comporte l'ensemble des éléments de droit et de fait sur lesquels il se fonde ; qu'il mentionne, notamment, les bases de sa liquidation ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir qu'il serait insuffisamment motivé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 32 du décret du 17 mai 1974 modifié, dans sa rédaction alors applicable : « 1. Les élèves des écoles du service de santé des armées sont entretenus et instruits gratuitement./ 2. Sont tenus à remboursement : / a) pour la durée de leur scolarité effectuée, les élèves qui, pour toute autre cause que l'inaptitude médicale dûment constatée, sont rayés des contrôles des écoles avant la fin de la scolarité ; /b) pour la durée de la scolarité effectuée et compte-tenu de la durée de services accomplis dans leur corps, les médecins, les pharmaciens-chimistes et les vétérinaires-biologistes des armées qui, sauf pour raison de santé, ne satisfont pas à l'engagement prévu au premier alinéa de l'article 31/ .3. Le montant des remboursements est égal au montant des rémunérations perçues pendant toute la période de scolarité... » ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, le remboursement des frais de scolarité et d'entretien exigé des élèves rayés de contrôles des écoles de santé des armées est une redevance pour services rendus et non une taxe à caractère fiscal ; que par suite, l'article 32-2 du décret du 17 mai 1974 modifié susvisé a pu compétemment instituer une telle redevance en application de l'article 5 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 ;

Considérant que si M. A soutient que son admission à l'école de santé des armées de Bordeaux était irrégulière et son maintien dans l'armée aurait été impossible, eu égard à l'affection dont il est atteint, il ne ressort pas de l'instruction, ni des pièces du dossier, que cette affection, à supposer qu'elle fût alors décelable, devait nécessairement faire obstacle à son engagement, ni à une carrière militaire ; qu'ainsi, il ne saurait invoquer, en tout état de cause, l'illégalité de la décision l'admettant à l'école de santé des armées pour contester la légalité du titre exécutoire ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, les dispositions précitées de l'article 32 du décret du 17 mai 1974 posent, à l'égard des élèves rayés des contrôles de l'école de service de santé des armées en raison d'échec aux examens, une obligation de remboursement pour la durée de la scolarité effectuée ; que les élèves ainsi exclus des écoles de santé des armées pour résultats scolaires insuffisants étant soumis à la même règle de remboursement des frais de scolarité et d'entretien que les anciens élèves quittant le service avant l'expiration de la durée de leur engagement, M. A n'est pas fondé à se prévaloir d'une méconnaissance du principe d'égalité , nonobstant la circonstance que les premiers ne seraient pas placés dans une situation identique à celle des seconds ;

Sur les conclusions relatives à la décision de refus de remise gracieuse du 20 mars 1997 :

Considérant qu'à l'appui des conclusions susvisées, M. A invoque le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le trésorier-payeur général des créances spéciales du Trésor en ne relevant pas l'illégalité de la décision l'admettant à l'école de service de santé des armées, compte tenu de son inaptitude physique ; que, comme il a été dit ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier, que cette affection, à supposer qu'elle fût alors décelable, devait nécessairement entraîner l'illégalité de la décision d'admission à l'école du service de santé des armées ; que, par suite, le trésorier-payeur général des créances spéciales du Trésor n'a pas entaché sa décision de refus de remise gracieuse d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant l'annulation d'une part du titre exécutoire en date du 11 novembre 1989 et d'autre part de la décision de refus de remise gracieuse du 20 mars 1997 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande M. A sur le fondement des dispositions précitées ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative de Paris en date du 16 novembre 2004 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de M. A devant la cour administrative d'appel de Paris et tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du 5 novembre 2002 ainsi que le surplus des conclusions de sa requête sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Franck A, au ministre de l'économie, des finances et de l'emploi et au ministre de la défense.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 276865
Date de la décision : 30/01/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jan. 2008, n° 276865
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: M. Francis Girault
Rapporteur public ?: M. Boulouis Nicolas
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:276865.20080130
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