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19/06/2008 | FRANCE | N°316617

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 19 juin 2008, 316617


Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Guy B demeurant ... ; M. Guy B demande au juge des référés du Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 15 mai 2008 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Caen, statuant en application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative a, sur la demande de M. et Mme A, enjoint au préfet du Calvados de prendre toutes mesures nécessaires pour assurer l'exécution de l'arrêt du 27 novembre 2003 de la cour d'appel de Caen ordonnant l'expulsion des con

sorts B, dans le délai de quinze jours à compter de la notific...

Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Guy B demeurant ... ; M. Guy B demande au juge des référés du Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 15 mai 2008 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Caen, statuant en application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative a, sur la demande de M. et Mme A, enjoint au préfet du Calvados de prendre toutes mesures nécessaires pour assurer l'exécution de l'arrêt du 27 novembre 2003 de la cour d'appel de Caen ordonnant l'expulsion des consorts B, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette ordonnance ;


il soutient que le refus de concours de la force publique opposé par le préfet du Calvados n'est pas entaché d'illégalité manifeste ; que la condition d'urgence prévue par l'article L.521-2 du code de justice administrative n'est pas remplie ;


Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu, enregistré le 4 juin 2008, le mémoire en défense présenté par M. et Mme A qui demandent au Conseil d'Etat de rejeter la requête de M. B et de mettre à leur charge la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils soutiennent que la requête est irrecevable dès lors qu'elle ne contient pas l'énoncé des faits et des moyens et ne comporte pas de conclusions ; qu'elle a été transmise pas télécopie mais n'a pas été confirmée par un exemplaire signé du requérant ; que M. B n'invoque aucun moyen de nature à remettre en cause la décision attaquée ;

Vu, enregistrées le 6 juin 2008, les observations présentées par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ; le ministre relève que la requête ne comporte ni moyens ni conclusions ; que l'arrêté préfectoral du 28 mai 2008 accordant le concours de la force publique aux fins d'expulser les consorts B n'est que la stricte exécution de l'ordonnance attaquée du 15 mai 2008 du juge des référés du tribunal administratif de Caen ;



Après avoir convoqué à une audience publique M. B, M. et Mme A et la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du mardi 11 juin 2008 à 16 h 30 au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Boullez, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du requérant ;
- M. Guy B ;
et à l'issue de laquelle l'instruction a été prolongée jusqu'au lundi 16 juin 2008 ;

Vu, enregistrée le 16 juin 2008, la note en délibéré présentée pour M. B ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;



Considérant que l'article L. 521-2 du code de justice administrative dispose : « Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures » ;

Considérant qu'il incombe à l'autorité administrative d'assurer, en accordant au besoin le concours de la force publique, l'exécution des décisions de justice ; que le droit de propriété a pour corollaire la liberté de disposer de ses biens et que le refus de concours de la force publique pour assurer l'exécution d'une décision juridictionnelle ordonnant l'expulsion d'un immeuble porte atteinte à cette liberté fondamentale ; que les exigences de l'ordre public peuvent toutefois justifier légalement, tout en engageant la responsabilité de l'Etat sur le fondement de l'égalité devant les charges publiques, un refus de concours de la force publique ; qu'enfin l'usage par le juge des référés des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-2 du code de justice administrative est subordonné à la condition qu'une urgence particulière rende nécessaire l'intervention dans les quarante-huit heures d'une mesure destinée à la sauvegarde d'une liberté fondamentale ;

Considérant que l'expulsion des consorts B de l'immeuble qu'ils occupent a été ordonnée par un arrêt de la cour d'appel de Caen du 27 novembre 2003 ; qu'à la suite du refus du préfet du Calvados d'accorder le concours de la force publique pour l'exécution de cet arrêt, un jugement du tribunal administratif de Caen en date du 11 mars 2008 a condamné l'Etat, sur le fondement de la rupture d'égalité devant les charges publiques, à verser à M. et Mme A, propriétaires de cet immeuble, une indemnité au titre de la perte de loyers qu'ils avaient subie ; qu'en l'absence de circonstances particulières, la demande présentée par M. et Mme A le 13 mai 2008 au tribunal administratif de Caen pour qu'il soit enjoint au préfet du Calvados, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'accorder le concours de la force publique à l'exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Caen du 27 novembre 2003 ne saurait, compte tenu des étapes antérieures de la longue procédure qui oppose M. et Mme A aux consorts B, être regardée comme répondant à la condition d'urgence qui est celle de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B, qui a présenté une requête d'appel suffisamment motivée et qui a régularisé à l'occasion de l'audience publique le défaut de signature de ses écritures, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Caen a fait droit à la demande dont il était saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ; que les conclusions de M. et Mme A présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;



O R D O N N E :
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Caen en date du 15 mai 2008 est annulée.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Caen par M. et Mme A ainsi que les conclusions de ces derniers devant le juge des référés du Conseil d'Etat tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Guy B, à M. et Mme Claude A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Calvados.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 316617
Date de la décision : 19/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2008, n° 316617
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Bernard Stirn
Avocat(s) : SCP BOULLEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:316617.20080619
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