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19/12/2008 | FRANCE | N°292286

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 19 décembre 2008, 292286


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 avril et 1er août 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Antonio A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 21 février 2006 de la cour administrative d'appel de Versailles en tant qu'il a sur l'appel formé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, annulé l'article 3 du jugement du tribunal administratif de Versailles du 29 avril 2004 le déchargeant des pénalités pour mauvaise foi appliquées aux cotisations suppl

mentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée e...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 avril et 1er août 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Antonio A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 21 février 2006 de la cour administrative d'appel de Versailles en tant qu'il a sur l'appel formé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, annulé l'article 3 du jugement du tribunal administratif de Versailles du 29 avril 2004 le déchargeant des pénalités pour mauvaise foi appliquées aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée et de contribution pour le remboursement de la dette sociale auxquelles il a été assujetti au titre des années 1996 et 1997, et rétabli lesdites pénalités ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Parmentier, Didier, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Claire Legras, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme A ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 1995 à 1997 ; qu'à la suite de ce contrôle, ils ont été taxés d'office sur le fondement des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales à raison de revenus d'origine indéterminée s'élevant respectivement à 1 657 930 F et 1 111 320 F pour 1996 et 1997 et assujettis à des compléments d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée et de contribution pour le remboursement de la dette sociale s'élevant respectivement à 879 371 F et 625 235 F au titre des ces années ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 21 février 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a, d'une part, sur l'appel formé par le requérant contre le jugement du 29 avril 2004 du tribunal administratif de Versailles, après avoir annulé partiellement ledit jugement, rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée et de contribution pour le remboursement de la dette sociale et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1996 et 1997 et, d'autre part, sur l'appel formé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, annulé l'article 3 du jugement du tribunal administratif de Versailles du 29 avril 2004 prononçant la décharge des pénalités pour mauvaise foi, et rétabli lesdites pénalités à sa charge au titre des années 1996 et 1997 ;

Considérant que dans ses écritures devant le tribunal administratif de Versailles, M. A avait, au soutien de ses conclusions tendant à la décharge des pénalités correspondant aux suppléments d'impôt sur le revenu pour l'ensemble des années en litige, soutenu que, dans le cadre de la réponse aux observations du contribuable, le supérieur hiérarchique du vérificateur n'avait pas porté le visa prévu en cas d'application des pénalités pour mauvaise foi ; que la cour a fait droit aux conclusions du ministre tendant à rétablir à la charge de M. A l'intégralité des pénalités dont la décharge lui avait été accordée par l'article 3 du jugement attaqué, sans se prononcer sur ce moyen, qui n'était pas inopérant ; qu'elle a ainsi omis de répondre à l'un des moyens dont elle était saisie par la voie de l'effet dévolutif de l'appel ; que, par suite, M. A est fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi relatifs aux pénalités, à demander, l'annulation de l'arrêt attaqué sur ce point ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond dans les limites de l'annulation prononcée par la présente décision ;

Sur la régularité de la procédure suivie en matière de pénalités :

Considérant que, pour obtenir la décharge des pénalités, M. A a soutenu devant les premiers juges que la procédure suivie à son encontre était irrégulière, au motif que la réponse aux observations du contribuable confirmant l'application des pénalités pour mauvaise foi ne comportait pas le visa du supérieur hiérarchique du vérificateur ;

Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en l'espèce : (...) lorsque la pénalité mise en recouvrement ne constitue pas l'accessoire d'une imposition ou lorsqu'elle sanctionne une infraction dont la qualification est fondée sur l'appréciation du comportement du contribuable, la motivation est portée à sa connaissance au moins trente jours avant la notification du titre exécutoire ou de son extrait. Durant ce délai, le contribuable peut présenter ses observations ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration a l'obligation, au moins trente jours avant la mise en recouvrement de pénalités visées par le second alinéa de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, d'adresser au contribuable un document comportant la motivation des pénalités qu'elle envisage de lui appliquer, et indiquant qu'il dispose d'un délai de trente jours pour présenter ses observations ; que l'administration est tenue de renouveler cette formalité si, pour quelque motif que ce soit, elle modifie, avant leur mise en recouvrement, la base légale, la qualification ou les motifs des pénalités qu'elle se propose d'appliquer au contribuable ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en l'espèce : La décision d'appliquer des majorations prévues à l'article 1729 du code général des impôts, lorsque la mauvaise foi est établie ou lorsque le contribuable s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses, est prise par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités ; que le document comportant la motivation des pénalités au sens de ces dispositions s'entend du document que l'administration a l'obligation de faire parvenir au contribuable en application du second alinéa de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, un tel document doit être visé par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressements en date du 1er septembre 1999, qui comportait la motivation des pénalités de mauvaise foi mises en recouvrement à l'encontre de M. A, avait été régulièrement visée par un agent ayant le grade d'inspecteur principal ; que l'administration n'a pas entendu, dans sa réponse aux observations du contribuable du 19 octobre 1999, modifier la base légale, la qualification ou les motifs des pénalités qu'elle se proposait d'appliquer et que, d'ailleurs, M. A n'a pas discuté l'application desdites pénalités dans les observations adressées au service vérificateur le 6 octobre 1999 ; que par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que la procédure suivie à son encontre était entachée d'irrégularité ;

Sur les conclusions du ministre tendant au rétablissement des pénalités exclusives de bonne foi :

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 1728 et 1729 du code général des impôts que la majoration prévue à l'article 1729 est applicable lorsque la bonne foi du redevable ne peut être admise ; qu'il résulte de l'instruction que, pour motiver l'application de la pénalité de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, le vérificateur s'est fondé, dans le cadre de la notification de redressements du 1er septembre 1999, d'une part, sur l'importance des revenus d'origine indéterminée par rapport aux revenus portés par les époux A sur leur déclaration de revenus et, d'autre part, sur la circonstance qu'ils ne pouvaient ignorer l'existence de ces revenus, qui constituaient l'essentiel de leurs ressources financières, et leur permettaient de faire face aux dépenses de leur train de vie ; que par suite, l'administration doit être regardée comme ayant établi leur volonté d'éluder une partie des impositions dont ils étaient redevables ; qu'il suit de là que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a estimé que le service n'établissait pas l'intention délibérée du contribuable de minorer les bases de l'impôt ; que par suite, il y a lieu d'annuler l'article 3 du jugement du tribunal administratif de Versailles du 9 avril 2004 et de rétablir à la charge de M. A les pénalités exclusives de bonne foi afférentes aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée et de contribution pour le remboursement de la dette sociale auxquelles il a été assujetti au titre des années 1996 et 1997 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 3 et 4 de l'arrêt du 21 février 2006 de la cour administrative d'appel de Versailles et l'article 3 du jugement du tribunal administratif de Versailles du 29 avril 2004 sont annulés.

Article 2 : Les pénalités mentionnées à l'article 1729 du code général des impôts afférentes aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée et de contribution pour le remboursement de la dette sociale auxquelles M. A a été assujetti au titre des années 1996 et 1997 sont rétablies à sa charge.

Article 3 : Les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Antonio A et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 292286
Date de la décision : 19/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-04-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES. GÉNÉRALITÉS. AMENDES, PÉNALITÉS, MAJORATIONS. PÉNALITÉS POUR MAUVAISE FOI. - APPLICABILITÉ À DES COTISATIONS SUPPLÉMENTAIRES DE CSG OU DE CRDS - EXISTENCE [RJ1].

19-01-04-03 Les majorations prévues à l'article 1729 du CGI sont applicables à des cotisations supplémentaires de contribution sociale généralisée ou de contribution pour le remboursement de la dette sociale.


Références :

[RJ1]

Cf., pour la CSG, 26 novembre 2007, Chiumento, n° 289790, inédite au recueil, RJF 5/08 n° 556.


Publications
Proposition de citation : CE, 19 déc. 2008, n° 292286
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Benoit Bohnert
Rapporteur public ?: Mme Legras Claire
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:292286.20081219
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