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26/03/2010 | FRANCE | N°314793

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 26 mars 2010, 314793


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 avril et 30 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Mamadou A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 22 novembre 2007 par lequel la cour régionale des pensions de Paris a, d'une part, réformé le jugement du tribunal départemental des pensions de Paris en date du 7 septembre 2005, d'autre part, rejeté l'ensemble de ses demandes, enfin, fixé au 1er janvier 1997 la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité ;

2°) de

mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Lyon...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 avril et 30 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Mamadou A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 22 novembre 2007 par lequel la cour régionale des pensions de Paris a, d'une part, réformé le jugement du tribunal départemental des pensions de Paris en date du 7 septembre 2005, d'autre part, rejeté l'ensemble de ses demandes, enfin, fixé au 1er janvier 1997 la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 portant loi de de finances pour 1960 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002, notamment son article 68 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alain Boulanger, chargé des fonctions de Maître des requêtes,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A,

- les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par arrêté du 16 octobre 1959, une pension militaire d'invalidité au taux de 50 % a été accordée à titre définitif à M. A, ressortissant sénégalais ; qu'en application des dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959, cette pension a été remplacée par une indemnité annuelle à compter du 1er janvier 1975 ; que, par un arrêté du 12 juillet 2004, le ministre de la défense a fait droit à compter du 2 janvier 2002 à la demande de décristallisation que M. A avait présentée par une lettre en date du 10 avril 2000 en invoquant les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 22 novembre 2007 par lequel la cour régionale des pensions de Paris a fixé au 1er janvier 1997 la date de revalorisation de sa pension militaire d'invalidité et rejeté ses demandes tendant au versement d'intérêts moratoires au titre du rappel d'arrérages ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la troisième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux trois années antérieures ; qu'au sens et pour l'application de ces dispositions, une demande tendant à la revalorisation d'une pension militaire d'invalidité cristallisée en vertu des dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 pour mettre fin aux effets de cette cristallisation et obtenir le versement d'arrérages doit être regardée comme une demande de liquidation d'une pension ; que la prescription prévue par cet article a été édictée dans un but d'intérêt général en vue notamment de garantir la sécurité juridique des collectivités publiques en fixant un terme aux actions, sans préjudice des droits qu'il est loisible aux créanciers de faire valoir dans les conditions et délais fixés par ce texte ; que, par suite, les dispositions de cet article ne peuvent être regardées comme contraires aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de son premier protocole additionnel qui garantissent le droit à un recours effectif et à un procès équitable et protègent les droits patrimoniaux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la cour régionale des pensions de Paris, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que, par application des dispositions de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et compte tenu de la date à laquelle la demande a été présentée, le 10 avril 2000, la revalorisation de la pension d'invalidité de M. A devait prendre effet au 1er janvier 1997 ;

Considérant, en second lieu, que les bénéficiaires de pensions militaires d'invalidité ont droit, sur leur demande, en cas de retard apporté au versement des sommes qui leur sont dues, à des intérêts moratoires ; que, dès lors, la cour régionale des pensions de Paris a commis une erreur de droit en estimant que le rappel des arrérages dus à M. A à compter du 1er janvier 1997 ne pouvait donner lieu à versement d'intérêts moratoires ; qu'il y a lieu d'annuler son arrêt sur ce point ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond dans la mesure de l'annulation prononcée ;

Considérant que M. A a demandé le versement des intérêts sur les arrérages de la pension militaire d'invalidité qui lui étaient dus ; qu'il y a lieu de faire droit à ses conclusions, à compter du 10 avril 2000 ; qu'il a simultanément demandé la capitalisation des intérêts afférents à ces arrérages ; qu'à cette dernière date, il n'était pas dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il n'y a lieu de faire droit à cette demande qu'à compter du 10 avril 2001, date à laquelle il était dû une année d'intérêts, et à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date ;

Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à ce titre de la somme de 1 000 euros ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Paris du 22 novembre 2007 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. A tendant au versement des intérêts moratoires sur les arrérages de sa pension et à la capitalisation de ces intérêts.

Article 2 : L'Etat versera à M. A à compter du 10 avril 2000 les intérêts moratoires sur les arrérages de pension militaire d'invalidité dus. Les intérêts échus à la date du 10 avril 2001 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le jugement du tribunal départemental des pensions de Paris du 7 septembre 2005 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : L'Etat versera à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. A est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Mamadou A et au ministre de la défense.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 314793
Date de la décision : 26/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 26 mar. 2010, n° 314793
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Chantepy
Rapporteur ?: M. Alain Boulanger
Rapporteur public ?: Mlle Courrèges Anne
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:314793.20100326
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