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26/03/2010 | FRANCE | N°326097

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 26 mars 2010, 326097


Vu le pourvoi, enregistré le 16 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 5 février 2009 par lequel le tribunal administratif de Besançon, à la demande de M. René A, d'une part, a annulé l'arrêté du 18 novembre 1985 lui concédant une pension de retraite en tant qu'il ne prend pas en compte la bonification mentionnée au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, d'autre part, a enjo

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Vu le pourvoi, enregistré le 16 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 5 février 2009 par lequel le tribunal administratif de Besançon, à la demande de M. René A, d'une part, a annulé l'arrêté du 18 novembre 1985 lui concédant une pension de retraite en tant qu'il ne prend pas en compte la bonification mentionnée au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, d'autre part, a enjoint au ministre de modifier, dans le délai de deux mois suivant la notification du jugement, les conditions dans lesquelles la pension de M. A lui a été concédée et de revaloriser rétroactivement cette pension ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté économique européenne ;

Vu le traité instituant l'Union européenne, notamment son protocole n° 2 ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alain Boulanger, chargé des fonctions de Maître des requêtes,

- les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes de l'article 119 du traité instituant la Communauté économique européenne, devenu l'article 141 du traité instituant la Communauté européenne : Chaque Etat membre assure au cours de la première étape, et maintient par la suite, l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail. Par rémunération, il faut entendre au sens du présent article le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier. L'égalité de rémunération, sans discrimination fondée sur le sexe, implique : a) que la rémunération accordée pour un même travail payé à la tâche soit établie sur la base d'une même unité de mesure ; b) que la rémunération accordée pour un travail payé au temps soit la même pour un même poste de travail ; que si le principe de l'égalité des rémunérations s'oppose à ce qu'une bonification, pour le calcul d'une pension de retraite accordée aux personnes qui ont assuré l'éducation de leurs enfants, soit réservée aux femmes, alors que les hommes ayant assuré l'éducation de leurs enfants seraient exclus de son bénéfice, il résulte des stipulations du protocole n° 2 sur l'article 119 du traité instituant la Communauté économique européenne signé le 7 février 1992, que des prestations en vertu d'un régime professionnel de sécurité sociale ne seront pas considérées comme rémunération si et dans la mesure où elles peuvent être attribuées aux périodes d'emploi antérieures au 17 mai 1990, exception faite pour les travailleurs ou leurs ayants droit qui ont, avant cette date, engagé une action en justice ou introduit une réclamation équivalente selon le droit national ; que ces limitations dans le temps de l'effet direct de l'article 119 de ce traité font obstacle à ce que soit satisfaite une demande se rapportant à un droit à pension ouvert pendant la période qui va du 1er janvier 1962, date de l'entrée en vigueur de cet article, au 17 mai 1990 et se rapportant à des périodes d'emploi antérieures à cette dernière date ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la pension versée à M. A, qui lui a été concédée par un arrêté du 18 novembre 1985, se rapporte à des périodes d'emplois antérieures au 17 mai 1990 ; que, par suite, elle ne peut se voir appliquer le principe d'égalité des rémunérations au sens des stipulations précitées de l'article 119 du traité instituant la Communauté économique européenne ; que l'intéressé, qui n'avait pas introduit de demande avant le 17 mai 1990, ne peut donc utilement se prévaloir de ces stipulations pour faire obstacle à l'application du b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction applicable à la date de la liquidation de sa pension en ce qu'il réservait aux femmes fonctionnaires le bénéfice de la bonification d'ancienneté d'un an par enfant ; que, dès lors, le tribunal administratif de Besançon a, par son jugement du 5 février 2009, commis une erreur de droit en annulant l'arrêté du 18 novembre 1985 portant concession de pension civile de retraite de M. A en tant qu'il ne prend pas en compte cette bonification ; que, par suite, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est fondé à demander l'annulation de ce jugement ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative;

Considérant ainsi qu'il a été dit, que M. A ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 119 du traité instituant la Communauté économique européenne devenu article 141 du traité instituant la Communauté européenne, pour faire obstacle à l'application du b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction applicable à la date de la liquidation de sa pension en ce qu'il réserve aux femmes fonctionnaires le bénéfice de la bonification d'ancienneté d'un an par enfant ; que, par suite, ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 novembre 1985 portant concession de sa pension en tant qu'il ne prend pas en compte le bénéfice de cette bonification doivent être rejetées ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 5 février 2009 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Besançon est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à M. René A.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 326097
Date de la décision : 26/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 26 mar. 2010, n° 326097
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Chantepy
Rapporteur ?: M. Alain Boulanger
Rapporteur public ?: Mlle Courrèges Anne

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:326097.20100326
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