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07/05/2010 | FRANCE | N°339210

France | France, Conseil d'État, 07 mai 2010, 339210


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 4 mai 2010, présentée par M. Kasim A, demeurant ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 20 avril 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a rejeté son recours tendant, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Ain de lui indiquer un lieu d'hébergement en qualité de demandeur d'asile ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de lui indiquer u

n lieu d'hébergement dans un délai de quarante-huit heures à compter de la not...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 4 mai 2010, présentée par M. Kasim A, demeurant ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 20 avril 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a rejeté son recours tendant, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Ain de lui indiquer un lieu d'hébergement en qualité de demandeur d'asile ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de lui indiquer un lieu d'hébergement dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

il soutient que le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a inexactement motivé l'ordonnance qu'il a rendue en relevant qu'il ne pouvait valablement soutenir que l'administration n'avait accompli aucune diligence en sa faveur dès lors qu'il ne soulevait pas un tel moyen ; qu'il n'est pas contesté qu'il ne dispose d'aucun logement ; qu'ainsi l'ordonnance attaqué méconnaît la directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003 ; qu'en outre le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a relevé de façon erronée qu'il touchait une allocation temporaire d'attente de 14,96 euros, alors que son montant est de 10, 54 euros ; qu'en outre cette allocation est distincte de celle prévue par la directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003 pour assurer le logement d'un demandeur d'asile ; que son maintien dans un logement indécent constitue une grave et manifestement illégale au droit d'asile ;

Vu la décision du tribunal administratif de Lyon du 20 avril 2010 dont l'annulation est demandée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003 ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret 2009-124 du 4 février 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant qu'au titre de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaire à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ; qu'en vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience publique lorsqu'il est manifeste, au vu de la demande, qu'elle est mal fondée ; qu'à cet égard, il appartient au juge d'appel de prendre en compte les éléments recueillis par le juge de premier degré dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée ;

Considérant que le droit constitutionnel d'asile, qui a le caractère d'une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié ; que la privation des demandeurs d'asile des mesures prévues par la loi leur garantissant des conditions matérielles d'accueil décente est susceptible de constituer une atteinte grave et manifestement illégale à cette liberté fondamentale ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003 relative à l'accueil des demandeurs d'asile : Définitions. Aux fins de la présente directive, on entend par : ... conditions matérielles d'accueil : les conditions d'accueil comprenant le logement, la nourriture et l'habillement, fournis en nature ou sous forme d'allocation financière ou de bons, ainsi qu'une allocation journalière... ; qu'aux termes de son article 13 : ...2. Les Etats membres prennent des mesures relatives aux conditions matérielles d'accueil qui permettent de garantir un niveau de vie adéquat pour la santé et d'assurer la subsistance des demandeurs. ...5. Les conditions d'accueil matérielles peuvent être fournies en nature ou sous la forme d'allocations financières ou de bons ou en combinant ces formules. Lorsque les Etats membres remplissent les conditions matérielles d'accueil sous forme d' allocations financières ou de bons, l'importance de ces derniers est fixée conformément aux principes définis dans le présent article. ; qu'aux termes de l'article 14 : modalités des conditions matérielles d'accueil :... 8. Pour les conditions matérielles d'accueil, les États membres peuvent, à titre exceptionnel, fixer des modalités différentes de celles qui sont prévues dans le présent article, pendant une période raisonnable, aussi courte que possible, lorsque : - une première évaluation des besoins spécifiques du demandeur est requise, - les conditions matérielles d'accueil prévues dans le présent article n'existent pas dans une certaine zone géographique, - les capacités de logement normalement disponibles sont temporairement épuisées, - le demandeur d'asile se trouve en rétention ou à un poste frontière, dans un local qu'il ne peut quitter. /Ces différentes conditions couvrent, en tout état de cause, les besoins fondamentaux. ;

Considérant qu'en application des dispositions des articles L. 348-1 et suivants et R. 348-1 et suivants du code de l'action sociale et des familles, les demandeurs d'asile peuvent être admis à l'aide sociale pour être accueillis dans les centres pour demandeurs d'asile, et que ceux qui ne bénéficient pas d'un niveau de ressources suffisant bénéficient d'une allocation mensuelle de subsistance, dont le montant est fixé par l'article 3 de l'arrêté du 31 mars 2008 portant application de l'article R. 348-4 du code de l'action sociale et des familles ; qu'ils ont également vocation à bénéficier, outre du dispositif d'accueil d'urgence spécialisé pour demandeurs d'asile, qui a pour objet de les accueillir provisoirement dans des structures collectives ou dans des hôtels en attente d'un accueil en centre pour demandeurs d'asile, du dispositif général de veille sociale prévu par l'article L. 345-2 du code de l'action sociale et des familles, lequel peut conduire à leur admission dans un centre d'hébergement d'urgence ou un centre d'hébergement et de réinsertion sociale ; qu'enfin, en vertu des articles L. 5423-8-1° et L. 5423-9-2° du code du travail, les demandeurs d'asile qui ont demandé à bénéficier du statut de réfugié peuvent bénéficier, sous condition d'âge et de ressources, d'une allocation temporaire d'attente à condition de ne pas être bénéficiaires d'un séjour en centre d'hébergement pris en charge au titre de l'aide sociale ;

Considérant que, pour une application aux demandeurs d'asile des dispositions précitées du droit interne conforme aux objectifs sus rappelés de la directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003, l'autorité compétente, qui sur sa demande d'admission au bénéfice du statut de réfugié doit, au plus tard dans le délai de quinze jours prescrit à l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mettre le demandeur d'asile en possession d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il ait été statué sur cette demande, sans préjudice, le cas échéant, de la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit également, aussi longtemps qu'il est admis à se maintenir sur le territoire en qualité de demandeur d'asile et quelle que soit la procédure d'examen de sa demande, lui assurer, selon ses besoins et ses ressources, des conditions d'accueil comprenant le logement, la nourriture et l'habillement, fournies en nature ou sous la forme d'allocations financières ou de bons ou en combinant ces formules ; que si, notamment lorsqu'une première évaluation des besoins spécifiques du demandeur est requise ou lorsque les capacités de logement normalement disponibles sont temporairement épuisées, l'autorité administrative peut recourir à des modalités différentes de celles qui sont normalement prévues, c'est pendant une période raisonnable, aussi courte que possible, et en couvrant les besoins fondamentaux du demandeur d'asile ; qu'une privation du bénéfice de ces dispositions peut conduire le juge des référés à faire usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-2 précité du code de justice administrative, lorsqu'elle est manifestement illégale et qu'elle comporte en outre des conséquences graves pour le demandeur d'asile ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. A, ressortissant serbe, a introduit une demande d'asile devant le préfet de l'Ain qui, après lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour pendant la durée nécessaire à l'instruction de cette demande, l'a transmise à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui l'a rejetée ; que le préfet de l'Ain a délivré une nouvelle autorisation provisoire de séjour à M. A, le 8 avril 2010, pour la durée de l'instruction du recours qu'il a introduit devant la Cour nationale du droit d'asile qui n'a pas encore statué ; que l'intéressé, faute de place disponible, n'a pu se voir proposer d'hébergement dans un centre d'accueil ; que l'hébergement dans un local associatif dont il avait bénéficié depuis le 6 novembre 2009 a pris fin le 31 mars 2010 ; que l'intéressé est toutefois bénéficiaire d'une allocation temporaire d'attente prévue par l'article L. 5423-8 du code du travail ; que même si l'ordonnance attaquée du juge des référés du tribunal administratif de Lyon comporte une erreur sur le montant de cette allocation, c'est à bon droit que le juge des référés a estimé, en retenant une motivation qui n'est pas entachée d'irrégularité, qu'eu égard aux diligences accomplies par l'administration, la situation de M. A ne pouvait être regardée comme révélant une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il est manifeste que l'appel de M. A ne peut être accueilli ; que la requête doit, par conséquent, être rejetée, y compris les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 de ce code, sans qu'il y ait lieu d'admettre le requérant à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. Kasim A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Kasim A.

Copie sera adressée pour information au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et au préfet de l'Ain.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 339210
Date de la décision : 07/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 mai. 2010, n° 339210
Inédit au recueil Lebon

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:339210.20100507
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