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09/06/2010 | FRANCE | N°332483

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 09 juin 2010, 332483


Vu la saisine, enregistrée le 5 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES, dont le siège est Service Juridique 33, avenue de Wagram à Paris (75176 Cedex 17) et fondée, en application de l'article L. 52-15 du code électoral, sur la décision du 23 septembre 2009 par laquelle cette commission a rejeté le compte de campagne de Mme Ixabel A, tête de liste à l'élection des représentants au Parlement européen qui a eu lieu les 6 et 7 juin 2009 dans la circonscription sud-oue

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ...

Vu la saisine, enregistrée le 5 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES, dont le siège est Service Juridique 33, avenue de Wagram à Paris (75176 Cedex 17) et fondée, en application de l'article L. 52-15 du code électoral, sur la décision du 23 septembre 2009 par laquelle cette commission a rejeté le compte de campagne de Mme Ixabel A, tête de liste à l'élection des représentants au Parlement européen qui a eu lieu les 6 et 7 juin 2009 dans la circonscription sud-ouest ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;

Vu la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Talabardon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral, rendu applicable, comme les autres dispositions du titre Ier du livre Ier de ce code, à l'élection des représentants au Parlement européen par l'article 2 de la loi du 7 juillet 1977 : Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celles de la campagne officielle par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article L. 52-4. (...) / Au plus tard avant dix-huit heures le neuvième vendredi suivant le tour du scrutin où l'élection a été acquise, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes [...] accompagné de justificatifs de ses recettes ainsi que des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du même code : Les dons consentis par une personne physique dûment identifiée pour le financement de la campagne d'un ou plusieurs candidats lors des mêmes élections ne peuvent excéder 4 600 euros. / Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services, ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués ; qu'enfin, les articles L. 52-10 et R. 39-1 du même code prévoient que le mandataire financier du candidat est tenu de délivrer à chaque donateur un reçu détaché d'une formule numérotée éditée par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et délivrée sur demande par la préfecture ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 52-15 du même code : Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, la commission saisit le juge de l'élection ; que l'article L. O. 128, rendu applicable à l'élection des représentants au Parlement européen par l'article 5 de la loi du 7 juillet 1977, rend inéligible pendant un an celui qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits par l'article L. 52-12 ; que, toutefois, l'article L. 118 permet au juge de l'élection de ne pas prononcer l'inéligibilité du candidat dont la bonne foi est établie ;

Sur le grief tiré des concours en nature consentis par des personnes morales de droit privé :

Considérant que, si les dispositions précitées de l'article L. 52-8 du code électoral ont pour effet d'interdire aux personnes morales, qu'il s'agisse de personnes publiques ou de personnes morales de droit privé, à l'exception des partis ou groupements politiques, de consentir à un candidat des dons, en nature ou en espèce, sous quelque forme et de quelque montant que ce soit, aucune disposition législative n'oblige la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques à rejeter le compte d'un candidat faisant apparaître qu'il a bénéficié de la part de personnes morales d'un avantage prohibé par l'article L. 52-8 ; qu'il appartient à la commission, sous le contrôle du juge de l'élection, d'apprécier si, compte tenu notamment des circonstances dans lesquelles le don a été consenti et de son montant, sa perception doit entraîner le rejet du compte ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, l'association Batasuna , qui n'a pas la qualité d'un parti ou de groupement politique, a fourni à Mme A des T-shirts pour un montant de 821 euros et que, d'autre part, Mme A a bénéficié de concours en nature consentis à titre gratuit par diverses associations et sociétés dont les montants peuvent être évalués respectivement à 110 euros pour des frais de bouche et à 3 343 euros pour des frais de publication ; que Mme A a ainsi bénéficié de dons prohibés par les dispositions précitées de l'article L. 52-8 du code électoral ; qu'eu égard, toutefois, au montant limité de ces dons qui s'élève au total à 4 274 euros alors que le plafond des dépenses électorales applicables dans la circonscription était de 1 265 000 euros, la perception par Mme A de ces dons prohibés n'est pas, à elle seule, de nature à justifier le rejet du compte de campagne de la liste Euskal Herria Alde ;

Sur le grief tiré de l'absence de production de certains justificatifs :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que le compte de campagne transmis le 6 août 2009 à la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES par Mme A, candidate tête de liste à l'élection des représentants au Parlement européen qui s'est déroulée le 7 juin 2009 dans la circonscription du sud-ouest, n'était pas accompagné de tous les justificatifs requis par l'article L. 52-12 précité ;

Considérant, en premier lieu, que si Mme A soutient qu'une partie des recettes, qu'elle évalue à 11 083,35 euros, a été recueillie dans des sébiles par des sympathisants de son parti lors de différentes manifestations organisées à l'occasion de la campagne électorale, ces collectes se sont faites en méconnaissances des dispositions précitées des articles L. 52-8 et R. 39-1 du code électoral qui exigent que des dons faits par des personnes physiques soient dûment identifiés et que le mandataire financier du candidat délivre à chaque donateur un reçu pour son don ;

Considérant, en second lieu, que pour justifier la dépense relative au loyer de sa permanence électorale, Mme A a produit un contrat de bail ne comportant, ni le montant du loyer et des charges à acquitter, ni la date de la signature de ce contrat ; qu'un tel document, imprécis et lacunaire, ne peut pas être regardé comme un justificatif au sens des dispositions de l'article L. 52-12 du code électoral ; que, si Mme A invoque la perquisition de son local par les forces de la police qui auraient emporté les autres justificatifs, elle n'apporte aucun élément étayant cette allégation ;

Considérant qu'au vu de tout ce qui précède, le compte de campagne déposé par Mme A ne peut être regardé comme comportant une description sincère de la totalité des recettes relatives à son élection ; que, dans les circonstances de l'espèce et eu égard notamment au caractère clair et dépourvu d'ambiguïté des dispositions qui ont été méconnues, il n'y a pas lieu de faire bénéficier Mme A des dispositions de l'article L. 118 du code électoral qui permettent au juge de l'élection, dans certaines circonstances, de ne pas prononcer l'inéligibilité d'un candidat ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Mme A est déclarée inéligible en qualité de représentant au Parlement européen pendant un an à compter de la présente décision.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES, à Mme Ixabel A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 332483
Date de la décision : 09/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 09 jui. 2010, n° 332483
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Dandelot
Rapporteur ?: M. Olivier Talabardon
Rapporteur public ?: Mme Dumortier Gaëlle

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:332483.20100609
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