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30/07/2010 | FRANCE | N°327394

France | France, Conseil d'État, 8ème sous-section jugeant seule, 30 juillet 2010, 327394


Vu le pourvoi, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 24 avril 2009, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 23 février 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, faisant droit à la requête de M. et Mme Jean-Pierre A, a annulé le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 9 février 2006 et a déchargé M. et Mme A des cotisations supplémentaires d'impôt

sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années ...

Vu le pourvoi, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 24 avril 2009, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 23 février 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, faisant droit à la requête de M. et Mme Jean-Pierre A, a annulé le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 9 février 2006 et a déchargé M. et Mme A des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1997 et 1998 et des pénalités correspondantes ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête d'appel de M. et Mme A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Nicolas Agnoux, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire, avocat de M. et Mme A,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire, avocat de M. et Mme A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société civile d'exploitation agricole (SCEA) Domaines Jean A, qui exploite un domaine viticole dans une zone d'appellation contrôlée et dans laquelle M. Jean-Pierre A et M. Christophe A sont associés, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle lui ont été notifiés des redressements en matière de bénéfices agricoles qui ont consisté à remettre en cause la valeur des stocks ; que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu résultant de ces redressements ont été établies au nom de M. et Mme Jean-Pierre A et de M. et Mme Christophe A, à raison de la quote-part de chacun des associés dans la société ; que M. et Mme Jean-Pierre A et M. et Mme Christophe A, après avoir vainement réclamé auprès de l'administration fiscale, ont contesté ces impositions devant le tribunal administratif de Bordeaux, qui a rejeté leurs demandes, après les avoir jointes, par un jugement en date du 9 février 2006 ; que, par un arrêt en date du 23 février 2009, contre lequel le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté comme irrecevables les conclusions présentées devant elle par la SCEA Domaines Jean A, et, après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 9 février 2006 et décidé de statuer par un arrêt distinct sur la requête d'appel de M. et Mme Christophe A, a accordé à M. et Mme Jean-Pierre A la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1997 et 1998 et des pénalités correspondantes ;

Considérant qu'eu égard à l'argumentation qu'il développe, le ministre doit être regardé comme contestant l'arrêt attaqué en tant seulement qu'il porte sur les impositions relatives à l'année 1998 ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes du 3 de l'article 38 du code général des impôts : (...) les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient... ; qu'aux termes de l'article 38 sexdecies de l'annexe III du même code : I. Le prix de revient des produits de l'exploitation compris dans les stocks peut être déterminé forfaitairement en appliquant au cours du jour à la clôture de l'exercice une décote correspondant au bénéfice brut susceptible d'être réalisé lors de la vente. Cette décote est appréciée par l'exploitant sous le contrôle de l'administration (...); qu'aux termes du 1 de l'article 39 du même code : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment (...) / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables... ; que, lorsqu'une entreprise constate que l'ensemble des matières ou produits qu'elle possède en stock ou une catégorie déterminée d'entre eux a, à la date de clôture de l'exercice, une valeur probable de réalisation inférieure au prix de revient, elle peut à concurrence de l'écart constaté soit opérer une décote soit constituer une provision pour dépréciation ; qu'une telle provision ne peut cependant être admise que si l'entreprise est en mesure de justifier de la réalité de cet écart et d'en déterminer le montant avec une approximation suffisante ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SCEA Domaines Jean A a pratiqué au titre de l'exercice clos en octobre 1997 une décote directe en retenant le cours du jour du vin de consommation courante sur le fondement du I de l'article 38 sexdecies de l'annexe III précité ; que l'administration a réintégré cette décote en l'estimant injustifiée et a retenu pour évaluer la valeur des stocks le cours provenant de la cotation établie par la chambre syndicale de la compagnie régionale des courtiers en vins pour les vins d'appellation contrôlée de la récolte de l'année précédente à la date du 31 octobre 1997 ; que la société a constitué au titre de l'exercice clos en 1998 une provision pour dépréciation sur le fondement du 5° du 1 de l'article 39 du code en estimant que le prix de vente de sa récolte correspondait au prix du vin de consommation courante ; que l'administration a remis en cause cette provision au motif qu'elle correspondait à un risque éventuel et non probable et a retenu comme montant des stocks la valeur qui résultait du prix de revient tel qu'il avait été calculé par la société ; que la cour a relevé que le cours retenu par l'administration pour l'année 1997 ne correspondait pas à celui des vins provenant de la dernière récolte à la fin du mois d'octobre et ne pouvait être regardé comme le prix auquel, aux dates de clôture des deux exercices, la SCEA Domaines Jean A pouvait, dans les conditions de son exploitation, normalement escompter vendre son stock de vins en provenance de la récolte ayant précédé la date de la clôture d'exercice ; qu'elle en a déduit que l'administration avait à tort remis en cause la décote de l'année 1997 comme la provision de l'année 1998 ; qu'en se fondant ainsi, pour prononcer la décharge de l'imposition en litige, sur les dispositions de l'article 38 sexdecies de l'annexe III, alors qu'étaient seules applicables, pour l'année 1998, celles du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, le ministre est fondé à demander l'annulation des articles 2, 3, 4 et 5 de l'arrêt attaqué en tant qu'ils portent sur l'année 1998 ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme demandée par M. et Mme A au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les articles 2, 3, 4 et 5 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 23 février 2009 sont annulés en tant qu'ils sont relatifs aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre de l'année 1998 et aux pénalités correspondantes.

Article 2 : L'affaire est, dans la mesure mentionnée à l'article 1er, renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : Les conclusions de M. et Mme A présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Jean-Pierre A et au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT.


Synthèse
Formation : 8ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 327394
Date de la décision : 30/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2010, n° 327394
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bachelier
Rapporteur ?: M. Nicolas Agnoux
Rapporteur public ?: M. Olléon Laurent
Avocat(s) : SCP COUTARD, MAYER, MUNIER-APAIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:327394.20100730
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