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24/11/2010 | FRANCE | N°328714

France | France, Conseil d'État, 7ème sous-section jugeant seule, 24 novembre 2010, 328714


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 juin et 9 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Michèle A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 081754 du 9 avril 2009 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision en date du 20 décembre 2007 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant au bénéfice des dispositions de l'article 34-2° de la loi n

84-16 du 11 janvier 1984 ainsi que, par voie de conséquence, l'imputation...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 juin et 9 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Michèle A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 081754 du 9 avril 2009 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision en date du 20 décembre 2007 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant au bénéfice des dispositions de l'article 34-2° de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ainsi que, par voie de conséquence, l'imputation au service de son accident survenu le 23 mars 2007 dans le cadre de son activité professionnelle ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision du 20 décembre 2007 du ministre de la défense ;

3°) de mettre la somme de 3 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n°86-442 du 14 mars 1986 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, Auditeur,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de Mme A ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / (..) ; qu'aux termes de l'article R. 421-2 du même code : Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet. / Les intéressés disposent, pour se pourvoir contre cette décision implicite, d'un délai de deux mois à compter du jour de l'expiration de la période mentionnée au premier alinéa. (..) ; qu'aux termes de l'article R. 421-3 du même code : Toutefois, l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet : (..) 2° Dans le contentieux de l'excès de pouvoir, si la mesure sollicitée ne peut être prise que par décision ou sur avis des assemblées locales ou de tous autres organismes collégiaux ; (..) ; qu'aux termes de l'article 26 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation de médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa version applicable à l'espèce : Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, les commissions de réforme prévues aux articles 10 et 12 ci-dessus sont obligatoirement consultées dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 34 (2°), 2° alinéa, de la loi du 11 janvier 1984 (..) / La consultation de la commission de réforme n'est toutefois pas obligatoire lorsque l'imputabilité au service d'un accident est reconnue par l'administration et que l'arrêt de travail qu'il entraîne ne dépasse pas quinze jours. ; qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa version applicable à l'espèce : Le fonctionnaire en activité a droit : (..) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient (..) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juges du fond que Mme A, adjointe administrative en fonction au centre territorial d'administration et de comptabilité de Rennes, a, par lettre du 24 mars 2007, déclaré s'être blessée sur son lieu de travail la veille ; que par lettre datée du 26 mars 2007, reçue par son administration au plus tard le 5 avril suivant, Mme A a demandé le bénéfice des dispositions du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 précitées ; que, par une décision du 20 décembre 2007, le ministre de la défense a rejeté cette demande ;

Considérant que le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Rennes, en ne répondant pas au moyen non inopérant, soutenu devant lui et tiré de ce que le délai de forclusion opposable au recours formé contre la décision implicite de rejet intervenue le 5 juin 2007 n'avait pas commencé à courir dès lors que cette décision avait été prise sans qu'ait été recueilli l'avis de la commission de réforme tel qu'il est prévu par les dispositions de l'article 26 du décret du 14 mars 1986 précitées, a entaché son ordonnance d'insuffisance de motivation ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'ordonnance attaquée doit être annulée ;

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : La juridiction est saisie par requête. (..) Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. ; qu'il résulte de l'instruction que les mémoires produits utilement par Mme A contiennent, conformément aux dispositions de cet article, l'exposé des faits et moyens au soutien des conclusions présentées par elle ; que la fin de non-recevoir opposée à ce titre par le ministre de la défense doit être écartée ;

Considérant qu'il est constant que ni la décision implicite du 5 juin 2007 du ministre de la défense, ni la décision expresse du 20 décembre 2007 rejetant la demande de Mme A n'ont été prises après qu'ait été recueilli l'avis de la commission de réforme prévu par les dispositions de l'article 26 du décret du 14 mars 1986 précitées ; qu'il résulte de l'instruction que l'imputabilité au service de l'accident dont Mme A a été victime le 23 mars 2007 n'a pas été reconnue par l'administration ; qu'ainsi, la consultation de la commission de réforme prévue à l'article 26 du décret du 14 mars 1986 était obligatoire avant de rendre une décision sur la demande de Mme A de bénéficier des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 précitées ; qu'il suit de là que le délai de recours prévu par les dispositions de l'article R. 421-3 du code de justice administrative précitées ne peut pas être opposé à Mme A et que son recours contre la décision attaquée n'est pas tardif ; qu'il en résulte également, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la décision attaquée est entachée d'irrégularité et qu'elle doit dès lors être annulée ;

Considérant que l'exécution de la présente décision implique que la demande de Mme A de bénéficier des dispositions du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 précitées soit réexaminée ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au ministre de la défense de procéder à une nouvelle instruction de cette demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Mme A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre la somme de 3 000 euros à la charge de l'Etat ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du 9 avril 2009 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Rennes est annulée.

Article 2 : La décision du 20 décembre 2007 du ministre de la défense est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de la défense de procéder à une nouvelle instruction de la demande de Mme A dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : L'Etat versera 3 000 euros à Mme A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Michèle A et au ministre de la défense.


Synthèse
Formation : 7ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 328714
Date de la décision : 24/11/2010
Type d'affaire : Administrative

Publications
Proposition de citation : CE, 24 nov. 2010, n° 328714
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Schwartz
Rapporteur ?: Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir
Rapporteur public ?: M. Boulouis Nicolas
Avocat(s) : SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:328714.20101124
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