La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/12/2010 | FRANCE | N°310803

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 15 décembre 2010, 310803


Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS, dont le siège est Europarc du Chêne 1 rue J. Monod à Bron (69500), et la SOCIETE MONSANTO SAS, dont le siège est Europarc du Chêne 1 rue J. Monod à Bron (69500); la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS demandent au Conseil d'Etat :

1°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 1 259 857,29 euros, augmentée des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice qu'elles estiment avoi

r subi du fait de la non-inscription des dix-sept variétés de maïs génét...

Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS, dont le siège est Europarc du Chêne 1 rue J. Monod à Bron (69500), et la SOCIETE MONSANTO SAS, dont le siège est Europarc du Chêne 1 rue J. Monod à Bron (69500); la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS demandent au Conseil d'Etat :

1°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 1 259 857,29 euros, augmentée des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice qu'elles estiment avoir subi du fait de la non-inscription des dix-sept variétés de maïs génétiquement modifié AW241Z, AW452Z, MLX9522LL, MCA324B, MEB610BT, MEB561BT, MEB552BT, MEB483BT, MEB441BT, MEB307BT, TPX947G, TEB580D, TEB525D, TXP939AV, TCA553E, TXP258D et EA4801EZA1 au catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 novembre 2010, présentée pour la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS ;

Vu le décret n° 81-605 du 18 mai 1981 ;

Vu l'arrêté du 20 juillet 2010 modifiant le catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées en France (semences de maïs et sorgho) ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Fabienne Lambolez, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et de la SOCIETE MONSANTO SAS,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Monod, Colin, avocat de la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et de la SOCIETE MONSANTO SAS ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS ont, entre février 1999 et janvier 2005, demandé au ministre chargé de l'agriculture l'inscription de dix-sept variétés de maïs génétiquement modifié au catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées ; que le comité technique permanent de la sélection des plantes cultivées a proposé, les 28 janvier 2000, 31 janvier 2001, 31 janvier 2002, 31 janvier 2003, 20 janvier 2005 et 15 février 2006, l'inscription de ces dix-sept variétés de maïs génétiquement modifié à ce catalogue ; que le silence gardé par le ministre sur les demandes d'inscription présentées par la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS a fait naître des décisions implicites de rejet ; que, par une décision du 12 juin 2009, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé pour défaut de motivation ces décisions implicites de rejet et a enjoint au ministre chargé de l'agriculture de prendre les mesures nécessaires au réexamen de ces demandes dans un délai de trois mois ; que, par la présente requête, la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS demandent la réparation du préjudice qu'elles estiment avoir subi du fait de l'illégalité de ces décisions implicites de rejet ;

Considérant qu'aux termes de l'article 5 du décret du 18 mai 1981 pris pour l'application de la loi du 1er août 1905 sur la répression des fraudes en ce qui concerne le commerce des semences et plants, dans sa rédaction applicable au présent litige : Le ministre de l'agriculture tient un catalogue comportant la liste limitative des variétés ou types variétaux dont les semences et plants peuvent être mis sur le marché sur le territoire national. / L'inscription sur le catalogue est subordonnée à la triple condition que la variété soit distincte, stable et suffisamment homogène. (...) ; que l'article 6 de ce décret dispose : Le ministre de l'agriculture arrête, sur proposition du comité technique permanent de la sélection des plantes cultivées, les conditions que doivent remplir les personnes qui demandent l'inscription de variétés au catalogue, les conditions d'ordre génétique, physiologique, technologique, agronomique, toxicologique ainsi que les conditions relatives à l'impact sur l'environnement que ces variétés doivent remplir pour être inscrites ainsi que les modalités selon lesquelles ces variétés doivent être expérimentées. (...) ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 7 du même décret : L'inscription de chaque variété est prononcée sur proposition du comité technique permanent de la sélection des plantes cultivées par le ministre de l'agriculture. ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le ministre de l'agriculture et de la pêche pouvait, à la date des décisions litigieuses, légalement refuser l'inscription d'une variété de maïs génétiquement modifié au catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées au motif que les conditions d'ordre génétique, physiologique, technologique, agronomique, toxicologique ou relatives à l'impact sur l'environnement exigées pour une telle inscription n'étaient pas remplies ; que le ministre pouvait également refuser l'inscription à ce catalogue d'une variété de maïs génétiquement modifié, à titre de mesure de précaution, s'il faisait état d'indices sérieux permettant d'avoir un doute raisonnable sur l'innocuité de cette variété à l'égard de la santé publique et de l'environnement ou sur le bénéfice qu'il apporte, compte tenu des risques qu'elle présente par ailleurs ; que, toutefois, dans les circonstances de l'espèce, le ministre se borne, pour justifier a posteriori les décisions de refus d'inscription, à indiquer que les éléments fournis par la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS à l'appui de leurs demandes d'inscription, notamment en ce qui concerne la traçabilité totale des variétés du champ au consommateur final et la surveillance biologique du territoire national, n'avaient pas emporté sa conviction, sans préciser ni les raisons pour lesquelles il considérait ces éléments comme insuffisants et n'avait pas suivi les propositions d'inscription faites par le comité technique permanent de la sélection des plantes cultivées entre 2000 et 2007, ni les éléments nouveaux qui l'ont conduit à inscrire le 20 juillet 2010 treize des dix-sept variétés de maïs en cause sur le catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées ; que, faute de se fonder sur des éléments précis tirés d'analyses ou d'études scientifiques relatives aux dangers des variétés de maïs génétiquement modifié concernées pour la santé publique ou l'environnement, le ministre chargé de l'agriculture n'établit pas que les décisions de refus litigieuses étaient justifiées au fond ; que les sociétés requérantes sont dès lors fondées à soutenir, dans les circonstances de l'espèce, que le ministre a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat en refusant illégalement l'inscription des variétés concernées ;

Considérant que les préjudices invoqués par la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS sont relatifs à des frais de dépôt des dossiers au comité technique permanent de la sélection des plantes, à des frais de constitution et de gestion de dossiers par l'entreprise et à des frais de production de semences ;

Considérant, en premier lieu, en ce qui concerne les frais de dépôt des dossiers d'inscription au comité technique permanent de la sélection des plantes cultivées et les frais de constitution et de gestion de ces dossiers par l'entreprise, que de tels frais sont inhérents à la procédure de demande d'inscription ; qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que treize des dix-sept variétés de maïs génétiquement modifié en cause ont été inscrites au catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées par l'arrêté ministériel du 20 juillet 2010 et que les sociétés requérantes ont retiré elles-mêmes, en 2003, les demandes d'inscription correspondant aux quatre autres variétés ; que la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS, ne sauraient, après avoir d'ailleurs demandé au Conseil d'Etat, dans une précédente instance, d'enjoindre au ministre chargé de l'agriculture de procéder à l'inscription au catalogue de leurs variétés de maïs génétiquement modifié, soutenir que cette inscription n'aurait plus présenté pour elles aucun intérêt ; qu'en effet, si elles font valoir que leurs variétés de maïs génétiquement modifié, étant devenues obsolètes à la date à laquelle le ministre a procédé à leur inscription au catalogue, ne seraient plus susceptibles d'être commercialisées, elles ne l'établissent pas ; qu'il résulte de ce qui précède que les frais engagés en vue de l'inscription de ces variétés de maïs au catalogue ne peuvent être regardés comme ayant été exposés inutilement par les sociétés requérantes ;

Considérant, en second lieu, que la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS demandent la réparation du préjudice qu'elles estiment avoir subi en raison de l'impossibilité pour elles de commercialiser les semences qu'elles avaient produites après avoir déposé les demandes d'inscription au catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées ; que les sociétés requérantes ne produisent toutefois, à l'appui de leur demande, aucune pièce justificative permettant d'établir la réalité et le montant des frais engagés pour la production de ces semences ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise sollicitée, que la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS ne sont pas fondées à demander l'indemnisation du préjudice invoqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme à la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et la SOCIETE MONSANTO SAS au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS et de la SOCIETE MONSANTO SAS est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE MONSANTO AGRICULTURE FRANCE SAS, à la SOCIETE MONSANTO SAS et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 310803
Date de la décision : 15/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 15 déc. 2010, n° 310803
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Ménéménis
Rapporteur ?: Mme Fabienne Lambolez
Rapporteur public ?: Mme Cortot-Boucher Emmanuelle
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:310803.20101215
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award