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28/03/2011 | FRANCE | N°347815

France | France, Conseil d'État, 28 mars 2011, 347815


Vu la requête, enregistrée le 25 mars 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Thierry Gérard A, élisant domicile à ... ; le requérant demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1102021 du 15 mars 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de suspendre les effets de la mesure d'éloignement prise à son encontre le 6

janvier 2011, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de ...

Vu la requête, enregistrée le 25 mars 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Thierry Gérard A, élisant domicile à ... ; le requérant demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1102021 du 15 mars 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de suspendre les effets de la mesure d'éloignement prise à son encontre le 6 janvier 2011, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de lui proposer une solution d'hébergement, de nourriture et d'habillement dans le délai de vingt-quatre heures à compter de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

2°) de surseoir à statuer jusqu'à la décision du Conseil constitutionnel sur la question prioritaire de constitutionnalité n° 2011-120 QPC ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de prendre les mesures sollicitées en première instance ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que l'urgence est caractérisée, dès lors qu'il ne peut bénéficier des mesures prévues par la loi pour les demandeurs d'asile et que le refus de séjour a de graves conséquences ; que le juge des référés aurait dû surseoir à statuer jusqu'à la décision du Conseil constitutionnel sur la question prioritaire de constitutionnalité n° 2011-120 QPC, qui porte sur des dispositions qui lui ont été appliquées ; que l'ordonnance est, sur ce point, entachée d'un défaut de motivation ; que les dispositions des articles L. 5423-8 du code du travail et L. 348-1 et suivants du code de l'action sociale et des familles sont contraires au droit européen en ce qu'elles excluent du bénéfice des mesures prévues par la loi pour assurer des conditions matérielles d'accueil ceux qui relèvent de la procédure prioritaire ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003 ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ; qu'en vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience publique lorsqu'il est manifeste, au vu de la demande, qu'elle est mal fondée ; qu'à cet égard, il appartient au juge d'appel de prendre en compte les éléments recueillis par le juge de premier degré dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte des dispositions combinées de l'article L. 723-1 et du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides statue par priorité sur les demandes émanant de personnes auxquelles le document provisoire de séjour prévu à l'article L. 742-1 a été refusé au motif, notamment, que la demande d'asile n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ; que, selon l'article L. 742-6 du même code, l'étranger qui se trouve dans ce cas bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'office, aucune mesure d'éloignement ne pouvant être mise à exécution avant cette décision ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, de nationalité congolaise et entré irrégulièrement en France, a fait l'objet d'une décision de reconduite à la frontière prise par le préfet de la Seine-Saint-Denis le 6 janvier 2011 et notifiée le même jour ; qu'il n'a pas formé, à l'encontre de cette décision, le recours à caractère suspensif qu'il pouvait introduire dans le délai de quarante-huit heures, conformément aux dispositions de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il a toutefois présenté, le 8 janvier, une demande d'admission au séjour au titre de l'asile, qui a donné lieu à un refus, opposé par le préfet le 3 février suivant en application du 4° de l'article L. 741-4 du même code ; que, le 11 mars 2011, il a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en lui demandant d'enjoindre à l'administration de suspendre les effets de la mesure d'éloignement prise à son encontre, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de lui procurer les conditions matérielles d'accueil prévues pour les demandeurs d'asile ;

Considérant que, ainsi que l'a rappelé à bon droit le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil, un arrêté de reconduite à la frontière, qui peut faire l'objet d'un recours suspensif, n'est pas justiciable, en principe, des procédures de référé instituées par le livre V du code de justice administrative, hormis le cas où les mesures par lesquelles il est procédé à l'exécution d'un tel arrêté comporteraient des effets qui, en raison de changements dans les circonstances de droit ou de fait depuis l'intervention de cet arrêté, excèderaient le cadre qu'implique normalement sa mise à exécution ; que M. A ne conteste pas en appel le motif par lequel le juge des référés a jugé que tel n'était pas le cas en l'espèce ; que le requérant, qui a déclaré, d'après le procès-verbal établi lors de son interpellation, être entré en France pour y trouver du travail, ne conteste pas davantage le motif par lequel le premier juge a estimé que le préfet avait pu regarder comme dilatoire sa demande d'asile, présentée alors qu'il était sous le coup d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant que, si M. A soutient que le juge des référés aurait dû surseoir à statuer jusqu'à la décision du Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur des dispositions qui lui ont été appliquées, aucune disposition n'obligeait ce juge, qui n'était pas lui-même saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, à procéder ainsi, ni à s'en expliquer davantage ;

Considérant, enfin, qu'un moyen tiré de l'incompatibilité de dispositions législatives avec les règles du droit de l'Union européenne n'est de nature à être retenu, eu égard à son office, par le juge des référés saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, qu'en cas de méconnaissance manifeste des exigences qui découlent du droit de l'Union ; que les dispositions des articles L. 5423-8 du code du travail et L. 348-1 et suivants du code de l'action sociale et des familles critiquées en appel par le requérant ne font pas apparaître une méconnaissance manifeste des objectifs de la directive du 27 janvier 2003 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il est manifeste que l'appel de M. A ne peut être accueilli ; que la requête doit, par conséquent, être rejetée, y compris les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 de ce code ;

O R D O N N E :

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Article 1 : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Thierry Gérard A.

Copie en sera adressée pour information au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 347815
Date de la décision : 28/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 28 mar. 2011, n° 347815
Inédit au recueil Lebon

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:347815.20110328
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