Vu le pourvoi, enregistré le 27 février 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE ; le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 0652 du 19 décembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Mata-Utu, faisant droit à la demande de Mme Catherine A
, a condamné l'Etat, représenté par le Préfet, administrateur supérieur des Iles Wallis-et-Futuna, à verser à l'intéressée une somme totale de 798 200 francs CFP correspondant aux frais de transport et aux frais médicaux qu'elle a exposés lors de deux évacuations sanitaires de Wallis à Nouméa les 18 juillet et 13 octobre 2005 ;
2°) réglant l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de rejeter la demande de Mme A
;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 98-844 du 22 septembre 1998 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Gilles Pellissier, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Julien Boucher, rapporteur public ;
Considérant que Mme A
, alors professeur à l'antenne de Wallis-et-Futuna de l'Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) du Pacifique, a bénéficié les 23 juillet et 29 novembre 2005 d'évacuations sanitaires à destination de Nouméa afin de réaliser des examens médicaux ; que le directeur de l'IUFM ayant refusé de prendre en charge les frais médicaux et de transport correspondants, Mme A
a saisi le tribunal administratif de Mata-Utu de conclusions tendant à la condamnation de son administration à lui rembourser ces frais ; que, par un jugement du 19 décembre 2007, le tribunal administratif a condamné l'Etat à lui payer une somme totale de 798 200 francs CFP correspondant aux frais de transport et aux frais médicaux qu'elle avait exposés lors des deux évacuations sanitaires susmentionnées ; que le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE demande l'annulation de ce jugement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant qu'aux termes de l'article 60 du décret du 22 septembre 1998 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les changements de résidence des personnels civils de l'Etat à l'intérieur d'un territoire d'outre-mer, entre la métropole et un territoire d'outre-mer, entre deux territoires d'outre-mer et entre un territoire d'outre-mer et un département d'outre-mer, Mayotte ou la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon, dans sa rédaction applicable au présent litige : Lorsque l'état de santé d'un agent ou de l'un des membres de sa famille nécessite une évacuation sanitaire vers un Etat étranger ou vers un territoire d'outre-mer voisin du territoire où il se trouve, ou vers le territoire métropolitain de la France, les frais de transport aller et retour ainsi que les frais supplémentaires de transport liés à l'état de santé du bénéficiaire sont pris en charge par l'administration, sur accord préalable de sa part et dans la limite des conditions prévues par le régime d'assurance maladie auquel l'agent est rattaché (...) ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles n'ont pour objet de mettre à la charge de l'administration que les seuls frais de transport ; que le ministre de l'education nationale est fondé à soutenir qu'en condamnant l'Etat, sur le fondement de ces dispositions, à rembourser les frais médicaux engagés par Mme A
, qu'il n'appartient qu'à l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna de prendre en charge en application des dispositions de l'article L. 6431-16 du code de la santé publique, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ;
Considérant d'autre part qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 60 du décret du 22 septembre 1998 que l'accord préalable qu'elles prévoient doit émaner de la personne qui prendra en charge les frais de transport ; qu'en jugeant, pour condamner l'Etat à prendre en charge les frais de l'évacuation sanitaire de Mme A, que les attestations du directeur adjoint de l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna, contenues dans des fiches de liaison, selon lesquelles la commission des évacuations sanitaires de cette agence avait estimé que l'état de santé de Mme A justifiait sa prise en charge médicale à Nouméa, devaient être regardées comme l'accord préalable prévu par les dispositions de l'article 60, alors que, s'agissant d'un agent de l'Etat, cet accord devait être donné par l'Etat, et que l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna est, aux termes de l'article L. 6431-1 du code de la santé publique, un établissement public national à caractère administratif doté de l'autonomie administrative et financière et par suite distinct de l'Etat, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Considérant qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond et de statuer sur la demande de Mme A devant le tribunal administratif de Mata-Utu ;
Considérant, qu'aux termes de l'article L. 6431-16 du code de la santé publique : Sous réserve des dispositions du 3° de l'article L. 6431-8, les frais de transfert et de soins mentionnés au 3° de l'article L. 6431-4 sont à la charge de l'agence [de santé du territoire de Wallis-et-Futuna]. ; que les dispositions du 3° de l'article L. 6431-4 du même code prévoient qu'en cas de nécessité, l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna assure le transfert des personnes dont l'état de santé requiert ses services dans un autre établissement apte à dispenser les soins requis par leur état ; qu'il résulte de ces dispositions, combinées avec celles, précitées, de l'article 60 du décret du 22 septembre 1998, que les frais de transfert et de soins d'un agent en poste à Wallis-et-Futuna doivent être pris en charge par l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna, l'Etat n'étant tenu, le cas échéant, que de prendre en charge la part de la participation que l'agence peut exiger des usagers en application des dispositions du 3° de l'article L. 6431-8 du code de la santé publique relative aux frais de transport ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander la condamnation de l'Etat à lui verser la somme correspondant aux frais de transport et aux frais médicaux des deux évacuations sanitaires dont elle a bénéficié ; qu'elle doit, si elle s'y croit fondée, saisir de cette demande à titre principal l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna et, dans le cas où cette dernière déciderait de laisser à sa charge une part de ces frais, demander à l'Etat de prendre à sa charge la part de ce surplus correspondant à des frais de transport ; que sa demande ne peut, par suite, qu'être rejetée ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Mata-Utu est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Mata-Utu est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE LA JEUNESSE ET DE LA VIE ASSOCIATIVE et à Mme Catherine A.