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07/11/2012 | FRANCE | N°361995

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 07 novembre 2012, 361995


Vu le mémoire, enregistré le 17 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. Laurent A, demeurant ..., en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; M. A demande au Conseil d'Etat, à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de la décision n° 4917 du 10 juillet 2012 par laquelle la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des médecins, après avoir annulé la décision du 8 juillet 2011 de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l'ordre des mé

decins d'Aquitaine, lui a infligé la sanction de l'interdiction ...

Vu le mémoire, enregistré le 17 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. Laurent A, demeurant ..., en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; M. A demande au Conseil d'Etat, à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de la décision n° 4917 du 10 juillet 2012 par laquelle la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des médecins, après avoir annulé la décision du 8 juillet 2011 de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l'ordre des médecins d'Aquitaine, lui a infligé la sanction de l'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant trois ans, et décidé que cette sanction ne sera exécutée que pendant un an, à compter du 1er octobre 2012, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 145-1 et L. 145-2 du code de la sécurité sociale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code de la sécurité sociale, notamment les articles L. 145-1 et L. 145-2 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jérôme Marchand-Arvier, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de M. A et de Me Foussard, avocat du médecin conseil chef de service de l'échelon local de la Haute-Garonne et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute Garonne,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de M. A et à Me Foussard, avocat du médecin conseil chef de service de l'échelon local de la Haute Garonne et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute Garonne ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et qu'elle soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant que le requérant soutient que les dispositions de l'article L.145-1 du code de la sécurité sociale, qui déterminent la nature des faits susceptibles d'être soumis aux juridictions du contrôle technique, et de l'article L. 145-2 du même code, qui fixent la nature et l'échelle des sanctions susceptibles d'être prononcées par ces juridictions, sont contraires au principe " non bis in idem " découlant des exigences de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, dans la mesure où, en particulier, le neuvième alinéa de l'article L. 145-2 n'interdit pas qu'un praticien puisse être poursuivi et sanctionné deux fois pour les mêmes faits par les juridictions du contrôle technique et par les juridictions disciplinaires ordinales ;

3. Considérant qu'aux termes du neuvième alinéa de l'article L. 145-2 du code de la sécurité sociale, inséré par l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996, plus particulièrement mis en cause par le requérant : " Les sanctions prévues au présent article ne sont pas cumulables avec les peines prévues à l'article L. 4124-6 du code de la santé publique lorsqu'elles ont été prononcées à l'occasion des mêmes faits. Si les juridictions compétentes prononcent des sanctions différentes, la sanction la plus forte peut être seule mise à exécution. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, sous réserve des limites qui sont ainsi faites au cumul de sanctions à caractère administratif, elles n'interdisent pas le cumul des poursuites d'un praticien à l'occasion des mêmes faits devant les juridictions du contrôle technique et les juridictions disciplinaires ordinales au titre de deux législations différentes qui poursuivent des buts distincts ;

4. Considérant que ces dispositions du code de la sécurité sociale sont applicables au présent litige au sens et pour l'application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ; qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce qu'en n'interdisant pas le cumul, à l'occasion des mêmes faits, des poursuites au titre des législations qui viennent d'être rappelées, ces dispositions portent atteinte à un principe " non bis in idem " ayant valeur constitutionnelle soulève une question nouvelle ; qu'ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La question de la conformité à la Constitution de l'article L. 145-2 du code de la sécurité sociale est renvoyée au Conseil constitutionnel.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur le pourvoi de M. A jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité ainsi soulevée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Laurent A, au médecin-conseil chef de service de l'échelon local de la Haute-Garonne, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne et à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Copie en sera adressée au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 361995
Date de la décision : 07/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 nov. 2012, n° 361995
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Marc Dandelot
Rapporteur ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Rapporteur public ?: Mme Gaëlle Dumortier
Avocat(s) : SCP COUTARD, MUNIER-APAIRE ; FOUSSARD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:361995.20121107
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