La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/11/2012 | FRANCE | N°330609

France | France, Conseil d'État, 10ème sous-section jugeant seule, 26 novembre 2012, 330609


Vu le pourvoi, enregistré le 7 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ; le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1 à 4 de l'arrêt n° 07MA00155 du 25 juin 2009 de la cour administrative d'appel de Marseille réformant le jugement du 20 novembre 2006 du tribunal administratif de Marseille et faisant droit, à hauteur de 20 882 euros, à la deman

de de la SARL Evasion Sport en décharge des rappels de taxe sur la ...

Vu le pourvoi, enregistré le 7 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ; le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1 à 4 de l'arrêt n° 07MA00155 du 25 juin 2009 de la cour administrative d'appel de Marseille réformant le jugement du 20 novembre 2006 du tribunal administratif de Marseille et faisant droit, à hauteur de 20 882 euros, à la demande de la SARL Evasion Sport en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1997 ainsi que des intérêts de retard correspondants ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête d'appel de la SARL Evasion Sport ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 13 septembre 2012, présentée pour la SARL Evasion Sport,

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Berriat, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SARL Evasion Sport,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SARL Evasion Sport ;

1. Considérant que la SARL Evasion Sport a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant notamment sur les exercices clos en 1996 et 1997, à l'issue de laquelle l'administration fiscale lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée correspondant à des livraisons intracommunautaires de biens à Louvain en Belgique au titre des périodes correspondant à ces deux années ; que, par un jugement du 20 novembre 2006, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande en décharge de la SARL Evasion Sport ; que, par un arrêt du 25 juin 2009, la cour administrative d'appel de Marseille a prononcé une décharge partielle des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ; que le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat demande l'annulation de cet arrêt en tant qu'il a prononcé cette décharge partielle ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 262 ter du code général des impôts dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : " I. - Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : 1° Les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre État membre de la Communauté européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue au profit des livraisons intracommunautaires de biens est notamment subordonnée à la condition, d'une part, que l'acquéreur de ces biens soit assujetti à cette taxe ou ait la qualité de personne morale non assujettie et ne bénéficiant pas dans l'Etat membre dans lequel elle est établie d'un régime dérogatoire l'autorisant à ne pas soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée ses acquisitions intracommunautaires et, d'autre part, que le bien ait été expédié ou transporté hors de France par le vendeur, par l'acquéreur ou par un tiers pour leur compte, à destination d'un autre Etat membre ; que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération ; que, s'agissant de la réalité de la livraison d'une marchandise sur le territoire d'un autre Etat de l'Union européenne, seul le redevable de la taxe sur la valeur ajouté est en mesure de produire les documents afférents au transport de la marchandise, lorsqu'il l'a lui-même assuré, ou tout document de nature à justifier la livraison effective de la marchandise, lorsque le transport a été assuré par l'acquéreur ;

3. Considérant que, pour juger que la SARL Evasion Sport apportait la preuve de la réalité du transport à Louvain des marchandises en cause, la cour administrative d'appel s'est fondée, d'une part, sur des tickets de carte bleue, qui indiquaient seulement l'achat de carburant ou le paiement de péages autoroutiers sans identification des voyages correspondants, d'autre part, sur une attestation, dans la comptabilité de l'acquéreur, du paiement d'une facture de transport ne permettant pas d'identifier précisément les marchandises concernées, enfin, sur des rapprochements entre la comptabilité de la SARL Evasion Sport et celle de l'acquéreur des marchandises ; que ni ces éléments pris isolément ni leur conjonction n'étaient de nature à permettre d'établir avec certitude le transport à Louvain des marchandises en cause ; que, par suite, le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat est fondé à soutenir que la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en jugeant que la SARL Evasion Sport apportait la preuve, qui lui incombait, de la livraison des biens facturés à un acquéreur appartenant à un autre Etat de l'Union européenne et à demander l'annulation des article 1er à 4 de l'arrêt attaqué ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

5. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment des mentions de la notification de redressement en date du 20 mai 1999 que le vérificateur s'est rendu à sept reprises entre le 27 novembre 1998 et le 22 février 1999 au siège de la société et que les opérations de vérification se sont déroulées en présence de son représentant et de son comptable ; qu'il appartient, dès lors, à la société requérante, qui soutient que le vérificateur l'aurait privée du débat oral et contradictoire auquel elle avait droit en ce qui concerne notamment la remise en cause des opérations de livraisons intracommunautaires, d'établir que le vérificateur se serait refusé à tout échange de vues avec son représentant ; que cette preuve n'est pas rapportée ; que la SARL Evasion Sport n'est pas fondée à se prévaloir des termes de la réponse ministérielle faite à M. Herment, sénateur, publiée le 6 octobre 1994, qui est relative à la procédure d'imposition ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales : " Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts (...) " ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, il ne résulte pas de l'instruction que le vérificateur lui aurait demandé, après l'expiration du délai de trois mois prévu par les dispositions précitées de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, de lui fournir les justificatifs des opérations de livraison de biens vers la Belgique ; que, sur ce point, les premiers juges ont retenu à bon droit que la communication spontanée par la société, à l'issue du délai précité, de divers documents n'était pas de nature à révéler que les dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales auraient été méconnues ;

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus la SARL Evasion Sport n'apporte pas, par les éléments qu'elle produit, la preuve qui lui incombe de la réalité du transport des marchandises permettant de bénéficier de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la livraison de biens facturés à destination d'un acquéreur appartenant à un État membre de l'Union européenne ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Evasion Sport n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de décharge ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 1 à 4 de l'arrêt du 25 juin 2009 de la cour administrative d'appel de Marseille sont annulés.

Article 2 : La requête de la SARL Evasion Sport devant la cour administrative d'appel de Marseille est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances et à la SARL Evasion Sport.


Synthèse
Formation : 10ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 330609
Date de la décision : 26/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 26 nov. 2012, n° 330609
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anne Berriat
Rapporteur public ?: M. Edouard Crépey
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:330609.20121126
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award